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La voix du peuple

Lukasz et Mateusz sont gays et heureux de l’être. Roza est cheffe d’entreprise, elle n’a ni le temps ni l’envie de devenir femme au foyer. Des «modes de vie» jusqu’à présent incompatibles avec les «traditions» polonaises, selon le parti Droit et Justice (PiS). Tous doivent éprouver un immense soulagement à l’issue des législatives de dimanche dernier. Les urnes ont livré leur verdict et les populistes ont été chassés du pouvoir. Pouvoir que ces eurosceptiques et anti-immigrés tenaient d’une poigne ferme depuis huit ans. Tordant le bras à toute avancée sociétale, pour broyer toujours plus fort les libertés individuelles. Les choses n’ont fait qu’aller de mal en PiS et les droits humains en ont pris un sale coup.

Le camp victorieux, tourné vers l’Europe, doit prendre les commandes d’un futur gouvernement sur lequel reposent autant d’attentes que d’espoirs. Parce que le taux de participation à ce scrutin a largement dépassé le record de 1989, lors de la fin du communisme dans le pays. Et parce que les femmes se sont massivement mobilisées – trois quarts des électrices – pour exprimer leur voix. Celle d’un peuple surtout guidé par le besoin viscéral d’un changement en profondeur. À commencer par la loi sur l’interruption volontaire de grossesse, parmi les plus sévères en vigueur sur le Vieux Continent. Pendant la campagne, le leader de l’opposition Donald Tusk a en effet promis de libéraliser le droit à l’avortement.

Il faut bien évidemment se méfier de la valeur des promesses en politique. Car la tentation est grande de faire chanter les sirènes de la démagogie. De penser que dire aux citoyens ce qu’ils semblent vouloir entendre est suffisant pour s’assurer la paix sociale. Sauf qu’il ne faut jamais sous-estimer les déceptions, puis la colère. Les idéologies abstraites et vides de sens finissent forcément par se fracasser contre le mur inébranlable du réel. Les populistes le découvrent donc à leurs dépens. Tant pis pour eux.

Reste que les Polonais ont manifesté leur volonté d’évolution des mentalités, d’égalité et de tolérance. Ils ont signifié leur rejet du repli sur soi qui enferme dans la haine de l’autre. Ceci au moment même où nombre de nations européennes se droitisent, parfois à l’extrême.

Alexandra Parachini

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