Accueil | Editoriaux | Dindons de la farce

Dindons de la farce

Souvenons-nous les hivers dernier et avant-dernier. Masque sur le nez, autotest dans chaque narine, papy et mamie faisaient bûche à part dans la cuisine. Fenêtres grandes ouvertes aux quatre vents glacés pour assainir l’air vicié par un virus encore vicieux. Le cadet de nos soucis à l’époque, puisque nous débordions d’énergie. Ça gazait, malgré tout.

En ce mois de décembre 2022, il fallait bien redoubler d’originalité car le covid – bien que surfant sur une nouvelle vague – ne devrait plus jouer les trouble-fêtes. Point d’abondance sur nos tables de réveillon bien dressées, l’heure est à la sobriété. Au moins n’aurons-nous pas à attendre janvier pour nous mettre à la diète et au sec. Les flammes des bougies danseront dans l’obscurité, du moins s’il en reste en boutique… D’autant plus que nous aurons tous fait sauter les plombs en illuminant notre beau sapin, roi du quartier, en dehors des périodes creuses. Sans compter qu’il aura fallu dépanner le voisin allemand qui n’a déjà plus la lumière à tous les étages. De toute façon, le résineux risque davantage de finir dans la cheminée, vu la flambée des cours du bois, qu’à la déchetterie.

La liste des pénuries est aujourd’hui plus longue que le menu d’un boui-boui dont le chef Etchebest fait des cauchemars derrière des fourneaux éteints car trop gourmands. Ainsi, nous ne nous gaverons pas forcément de foie gras ni de juteuses volailles, la grippe aviaire s’étant chargée de décimer ces autres dindons de la farce avant qu’ils ne passent à la casserole. Pas de quoi relever non plus le rôti un peu fade avec une pointe de moutarde à l’ancienne, qu’elle soit fine ou forte, le condiment de Dijon produit au Canada désertant toujours les rayons clairsemés. Les Saint-Jacques se dégusteront sans doute sans riz, trop rare.

Et au petit matin de la nativité, après le passage du vieux barbu – si toutefois les rennes parviennent à carburer –, les gamins ne déballeront ni Lego ni Barbie, hors de prix en cette année inflationniste. Esprit de Noël, seras-tu là quand même? Viendras-tu réchauffer nos cœurs froids comme la pierre et nos crèches humides? Inutile, par ailleurs, de chercher des mouchoirs pour sécher ses larmes. Ça manque aussi. Papier trop cher…

Alexandra Parachini

PUBLIER UN COMMENTAIRE

*

Votre adresse email ne sera pas publiée. Vos données sont recueillies conformément à la législation en vigueur sur la Protection des données personnelles. Pour en savoir sur notre politique de protection des données personnelles, cliquez-ici.