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Le cri des zèbres

En France, deux millions de personnes n’ont pas de relevé d’identité bancaire. Elles «ont été foutues dehors par leur banque. Sans RIB, elles ne peuvent pas payer la cantine de leur gosse ou s’inscrire dans une agence d’intérim», martèle Alexandre Jardin. Que font les politiques? «Ils votent de grandes lois qui ne changent rien», crache-t-il. «Donc j’ai trouvé des mecs qui ont inventé un truc génial : Compte Nickel.»

Ce compte bancaire est sans conditions de dépôts ni de revenus. Il s’ouvre en quelques minutes chez un buraliste. Les frais annuels sont de 20 euros.

Bien sûr, son fondateur, Ryad Boulanouar, ne bosse pas pour la gloire. Mais c’est un businessman d’un genre trop rare, car il permet à des personnes de retrouver leur dignité et une vie normale. Avec sa banque alternative, «on ne vous humilie pas au moindre découvert, et on a « rebancarisé » plus de 100 000 personnes. C’est ça, un faiseux, un zèbre.»

Drôle de zèbre justement, cet Alexandre Jardin. Écrivain et cinéaste, il débarque en militant de l’initiative populaire avec un livre, Laissez-nous faire ! On a déjà commencé, et un collectif, «Bleu Blanc Zèbre». «Le zèbre est une drôle de bête qui raisonne en dehors du cadre. Les zèbres ne sont pas des diseux, ce sont des faiseux. Ils n’attendent pas des lois pour agir. Ils font», dit-il. Optimiste, Alexandre Jardin annonce un sursaut : «Je sais que notre peuple est en train d’inventer les solutions dont il a besoin.»

Le témoignage est français, mais le phénomène est mondial. Au Luxembourg aussi, des chercheurs, des militants, des entrepreneurs, de simples particuliers, font bouger les lignes. Ils mutualisent leurs moyens pour développer les énergies renouvelables, soutiennent les producteurs luxembourgeois, lancent des monnaies locales, créent des sociétés innovantes, militent pour le vivre ensemble… Il n’y a pas de petits zèbres !

Ces initiatives sont précieuses, car elles sont, justement, des initiatives, et non le produit d’une mécanique technocratique qui grippe plutôt qu’elle ne fluidifie la société. Félicitations aux politiques qui aident les «faiseux» à démonter cette mécanique. Quant aux autres, on ne saurait que trop leur conseiller d’écouter le cri des zèbres.

Romain Van Dyck (rvandyck@lequotidien.lu)

 

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