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La « J-beauty » japonaise a quadruplé ces exports depuis 2013


Avec des ingrédients de qualité, des formulations luxueuses, des emballages élégants et un savoir-faire, les cosmétiques estampillés made in Japan gagnent en attractivité sur les marchés asiatiques et occidentaux. (Photo / AFP)

Sur une friche industrielle d’Otawara, petite ville au nord de Tokyo, le géant nippon des cosmétiques Shiseido vient d’inaugurer sa première usine au Japon depuis 36 ans pour capitaliser sur le « made in Japan », un puissant argument de vente.

Shiseido était leader en Asie-Pacifique sur le segment des cosmétiques haut de gamme en 2018, avec une part de marché de 11%, selon le cabinet d’études Euromonitor. Mais en dehors du Japon, la concurrence est rude dans la région avec des mastodontes étrangers comme les français L’Oréal et LVMH, l’américain Estée Lauder ou encore le sud-coréen Amore Pacific. Particulièrement innovante, la cosmétique sud-coréenne, ou « K-beauty » a été très active à l’export ces dernières années, surfant notamment sur la popularité en Asie de la K-pop et des « dramas », les séries télévisées du pays.

Mais la « J-beauty » japonaise n’est pas en reste: ses exportations ont presque quadruplé depuis 2013 pour atteindre 546 milliards de yens (4,5 milliards d’euros) l’an dernier, selon des données du ministère des Finances. Plus de 60% de ces exports sont destinés à la Chine et Hong Kong. Les ventes de cosmétiques au Japon sont dynamiques également, dopées par l’explosion du tourisme dans l’archipel ces dernières années, grâce notamment à l’assouplissement depuis 2015 des procédures de visas pour les visiteurs chinois, les touristes étrangers les plus friands de produits de beauté venant du Japon.

« Nous nous concentrons sur des marques haut de gamme »

En plus de l’usine d’Otawara, Shiseido a prévu d’ouvrir deux autres sites de production dans le pays d’ici 2022, pour un coût total de 120 milliards de yens (1 milliard d’euros). Un rythme de développement industriel inédit dans l’histoire de la firme, pourtant vieille de près de 150 ans. Le choix du Japon s’est imposé comme une évidence, explique le PDG de Shiseido, Masahiko Uotani, dans un entretien. « Nous nous concentrons sur des marques haut de gamme, où les consommateurs voient la valeur de la culture japonaise. Donc, stratégiquement, nous leur disons: +Ces marques viennent du Japon, elles ont été conçues au Japon+. Et cela devient un avantage concurrentiel très important », selon le PDG.

Malgré des coûts de main-d’oeuvre plus élevés qu’ailleurs en Asie, d’autres groupes de cosmétiques nippons ont déjà adopté une stratégie similaire: en 2017, Kosé a par exemple vendu son usine en Chine pour doper à la place ses capacités de production au Japon. « Quand c’est possible nous introduisons des robots, de l’intelligence artificielle et des technologies de production numériques », ajoute Uotani. « Mais dans le segment des cosmétiques de luxe, les volumes de production ne sont pas nécessairement très élevés » et le capital humain y est important, selon lui.
Ainsi dans l’usine d’Otawara, si une machine est chargée de remplir les flacons, ce sont des employés en combinaisons blanches, bleues ou roses qui vissent ensuite les bouchons à la chaîne d’un geste expert: leurs formes sont trop variées et les quantités de chaque lot trop limitées pour automatiser efficacement ce procédé, explique-t-on chez Shiseido.

Dix ans de recherche pour une innovation cosmétique

« Avec des ingrédients de qualité, des formulations luxueuses, des emballages élégants et un savoir-faire, les cosmétiques estampillés made in Japan gagnent en attractivité sur les marchés asiatiques et occidentaux », confirme Mitsue Konishi, analyste du cabinet d’études GlobalData. La J-Beauty est aussi connue pour sa haute technicité: les consommateurs nippons apprécient les rituels beauté combinant cosmétiques et objets électroniques, ou « électro-beauté », une tendance qui reste encore une niche ailleurs dans le monde.

Cette semaine, Kao, autre important groupe nippon du secteur, a par exemple lancé au Japon la commercialisation d’un spray développé avec Panasonic qui vaporise des fibres ultra-fines, lesquelles forment en s’agglutinant un masque hydratant pour le visage. Une innovation qui a toutefois nécessité dix ans de recherches. C’est le revers de la médaille des cosmétiques nippons: « La sécurité et la qualité sont élevées, mais les contrôles sont longs », tout comme le temps de développement des produits, relève Shima Yamanaka, analyste chez SMBC Nikko Securities. A l’inverse les Sud-Coréens « sont plutôt efficaces, leurs temps de développement de produits sont courts, ce qui leur permet d’être très réactifs au marché », admet le PDG de Shiseido.

 

LQ / AFP

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