Alors que Google et le gouvernement sont en négociation avancée pour un projet d’un milliard d’euros, le Luxembourg a raté le coche ces dernières années avec Apple et Facebook, entre autres.
Un milliard d’investissement et la présence de Google au Luxembourg. L’annonce d’Étienne Schneider, le ministre de l’Économie, sur les ondes de la radio 100.7 le jeudi 6 juillet n’est pas passée inaperçue dans les milieux biens informés. Elle a d’ailleurs laissé certaines personnes sceptiques sur la communication du ministre qui a mentionné la possibilité de voir Google implanter un centre de données gigantesque au Grand-Duché, alors que rien n’est encore signé avec le géant de Mountain View qui chercherait un terrain de 25 hectares. D’autant plus que des précédents existent.
En effet, Apple, Facebook ou encore LinkedIn ont, ces dernières années, tenté d’implanter des data centers au Luxembourg, sans succès, malgré les atouts du pays. La cause majeure : le terrain.
Apple en 2014
En 2014, la firme de Cupertino est très intéressée par l’implantation d’un centre de données au Luxembourg. Cela faisait déjà un certain temps qu’Apple voulait élargir ses capacités en la matière. L’entreprise avait déjà lancé quelques mois plutôt un appel d’offres auquel le Luxembourg ne donnera jamais suite. Mais en 2014 le gouvernement est étonnamment sensible à la volonté d’Apple de venir s’établir sur le territoire. Selon des sources anonymes, «le dossier était bien avancé, mais cela a coincé au niveau du terrain. Puis, dans le même temps, l’affaire LuxLeaks est sortie», sonnant le glas du projet.
Facebook en 2015/2016
En 2015/2016, la société de Marc Zuckerberg était très intéressée et les négociations ont très vite abouti. Mais là encore, trouver un terrain a été problématique. Toujours selon d’autres sources anonymes, «Facebook voulait un terrain de 40 hectares, alors que le gouvernement n’avait que la moitié.» Pour contourner ce problème, «des solutions existaient», mais le gouvernement n’a pas approfondi ces solutions, laissant entendre que finalement Facebook n’avait pas une bonne image et que son centre de données n’allait pas créer d’emplois. Résultat, la firme a installé son deuxième data center européen à Clonee en Irlande (il sera opérationnel avant 2018), y a investi 200 millions de dollars et va y créer environ 150 emplois. Un revers flagrant pour le gouvernement et Étienne Schneider.
LinkedIn en 2007/2008
Concernant LinkedIn, le réseau social professionnel en ligne a fait marche arrière en 2007/2008 à cause de la crise financière en Europe et il a préféré se concentrer sur d’autres marchés. Ces dernières années, plusieurs acteurs importants du numérique, spécialisés dans le gaming, les TIC et l’internet, ont été intéressés par le Luxembourg, mais la plupart ont renoncé alors que le gouvernement avait largement les moyens de les accueillir.
Les atouts du Grand-Duché
Pourtant, le Grand-Duché a des atouts dans sa manche : une bonne localisation géographique en Europe, une électricité moins coûteuse, beaucoup d’énergie verte, la présence de la fibre optique, une bonne législation sur la confidentialité des données. Et puis, il ne faut pas négliger la fiscalité avantageuse, même si elle est appliquée en toute transparence.
Pour un expert du secteur, «le Luxembourg est passé plusieurs fois à côté en laissant passer le Gafam (NDLR : acronyme utilisé pour désigner les grands acteurs d’Internet : Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), notamment à cause du problème du terrain. Si aujourd’hui les acteurs du Gafam étaient au Grand-Duché, le pays n’aurait alors rien à voir avec ce qu’il est maintenant!»
En effet, les géants d’internet drainent généralement beaucoup de sociétés dans leur sillage, contribuant indirectement à la création d’emplois et plus globalement à la croissance de l’économie.
Sacro-sainte propriété privée
Un autre expert pose alors la question de la propriété privée au Luxembourg : «Elle est sacrée. Mais on arrive à des situations où une simple personne qui ne souhaite pas vendre un champ, ou bien souhaite faire monter les enchères, arrive à bloquer le pays et son développement économique. Si le dossier Google échoue à cause du terrain, il faudra vraiment se poser la question d’une réforme de cette loi sur la propriété privée, car je pense qu’il est possible de prévoir un dédommagement raisonnable et réglementé pour le propriétaire d’un terrain bloquant un tel projet.» Concernant les terrains disponibles, il y aurait de la place près du data center de Bissen, où un agrandissement du site a été envisagé, mais «il n’y a pas 25 hectares» a souligné un expert.
Des professionnels du secteur affichent également leur scepticisme à propos des chiffres annoncés dans la presse. «Un milliard, c’est quand même colossal pour un data center», a estimé l’un d’entre eux.
Outre le prix, c’est également la communication du ministre qui étonne : «C’est une erreur d’avoir lâché l’information avant même que ce soit signé. C’est assez dangereux au niveau des négociations et la stratégie du ministre serait remise en cause si le projet venait à échouer.»
Jeremy Zabatta
avantage du luxembourg : électricité moins chère … balivernes ! Merci Cattenom