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Acier: manif des patrons lundi, l’OGBL réagit


Les employeurs de la sidérurgie européenne, par le biais de leur fédération Eurofer, organisent le lundi 15 février à Bruxelles une grande marche pour s’opposer à l’octroi du statut d’économie de marché à la Chine. Des bus seront affrétés pour les salariés. Au Luxembourg, l’OGBL s’oppose à cette marche, regrettant notamment que les syndicats n’aient pas été concertés.

Ce dossier de l’acier s’inscrit dans un contexte plus large pour l’industrie européenne, dont l’association Aegis Europe organise le 15 février à Bruxelles une grande marche pour s’opposer à l’octroi du statut d’économie de marché à la Chine, ce qui pourrait déboucher sur une baisse des droits de douanes. La décision doit être prise à l’OMC en fin d’année. La Commission, qui négocie pour les 28 Etats membres, a ouvert le débat européen à la mi-janvier. Sa réponse n’est pas attendue avant des mois.

En amont de la manifestation, Aegis Europe, qui regroupe 30 secteurs industriels – acier, aluminium, céramique, verre, panneaux solaires notamment – pesant plus de 500 milliards d’euros de chiffre d’affaires, a lancé lundi un manifeste européen pour « un commerce libre et juste » dont le message central est « la Chine n’est pas une économie de marché ». « L’Europe ne peut pas risquer plus de 3,5 millions d’emplois et 228 milliards d’euros en perte annuelle de PIB », a affirmé le porte-parole d’Aegis Europe, Milan Nitschke.

« Bruxelles n’est pas Davos »

Les employeurs de la sidérurgie européenne, par le biais de leur fédération Eurofer, prendront part à la marche du 15 février. Eurofer espère ainsi mobiliser plusieurs milliers de personnes à Bruxelles pour dénoncer le dumping chinois sur l’acier.

« Bruxelles n’étant pas Davos, ce ne seront évidemment pas les dirigeants qu’on risque de retrouver dans les rues de la capitale belge, mais leurs salariés, que les directions sont en train de mobiliser dans les usines et les administrations », déplore le syndicat Sidérurgie et Mines de l’OGBL, dans un communiqué diffusé jeudi. « Cette mobilisation patronale a été lancée sans concertation préalable avec les organisations syndicales et sans vérification de la position de notre fédération européenne IndustriAll », dénonce le syndicat.

L’OGBL d’accord sur certaines revendications

Sur le fond, l’OGBL « peut effectivement se retrouver dans l’une ou l’autre revendication formulée par Eurofer, mais il ne peut accepter la manière unilatérale de procéder, ni les revendications exprimées.» Le syndicat luxembourgeois pense également qu’accorder le statut d’économie de marché à la Chine serait «une erreur fondamentale, remettant en question la survie des quelque 380 000 emplois sidérurgiques en Europe».

Mais contrairement au patronat, l’OGBL estime « qu’il ne faut pas se limiter à des mesures d’urgence et ayant uniquement des effets à court terme (comme par exemple l’établissement d’un prix plancher pour les produits sidérurgiques), mais qu’il faut avant tout mettre en place des mesures qui visent à pérenniser l’industrie sidérurgique européenne et des emplois de qualité. »

Si l’OGBL, « ainsi qu’une très grande majorité des syndicats libres européens », ne sera pas aux côtés d’Eurofer ce 15 février, le syndicat assure qu’il « n’empêchera évidemment personne de s’associer à titre personnel à cette manifestation ». Tout en ironisant : « L’OGBL espère que les employeurs accorderont les mêmes facilités aux salariés qui souhaiteront manifester aux côtés des syndicats dans les semaines et mois à venir. »

Des employeurs « largement responsables de la situation »

Le syndicat rappelle que « ces mêmes employeurs, qui aujourd’hui appellent leurs salariés à manifester, sont largement responsables de la situation actuelle et de ses conséquences ». L’OGBL pointe notamment les « joint ventures » existant entre certains groupes européens et chinois, ainsi que la réduction drastique des budgets de recherche, mais surtout « le nombre disproportionné de fermetures de sites de production en Europe et les sous-capacités qui en découlent, qui ont contribué à créer un appel d’attraction pour certains produits chinois (en plus des prix bas pratiqués) ».

Le Quotidien avec AFP

Les gouvernements mobilisés

« L’Union européenne ne peut rester passive lorsque l’augmentation des pertes d’emplois et des fermetures d’aciéries montre qu’il existe un risque important et imminent d’effondrement du secteur européen de l’acier », ont écrit les ministres de l’Economie de sept pays européens dans une lettre adressée à la Commission européenne et au Conseil.

Avec cette initiative inédite, les ministres français, allemand, britannique, italien, polonais, belge et luxembourgeois font monter la pression sur la Commission, invitée à utiliser tous les moyens disponibles pour « lutter contre le commerce déloyal » et « assurer des conditions de concurrence équitable ».

La Chine n’est pas nommément visée dans la lettre, mais les décisions attendues de la Commission concernent une enquête antidumping en cours visant des produits plats en acier laminé à froid venant de Chine et Russie et l’ouverture d’un nouveau dossier ciblant des produits plats en acier laminé à chaud venant de Chine.

« Claire, massive, directe »

Les ministres européens vont plus loin et réclament que des mesures de défense puissent être prises plus rapidement, sans attendre « que les dommages causés par les pratiques déloyales deviennent irréversibles » pour l’industrie européenne.

Une porte-parole de l’exécutif européen a répondu lundi que la Commission était « bien consciente de la situation ». « La lettre soulève un nombre de points que nous avons nous-même soulevés aussi », a-t-elle dit, en assurant que la Commission « appliqu(e) les instruments à (sa) disposition ».

La commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmström, avait déjà haussé le ton la semaine dernière, en demandant par courrier à son homologue chinois Gao Hucheng de prendre des mesures pour réduire les surcapacités du pays en acier, et en brandissant la menace de nouvelles procédures antidumping.

 

« Un besoin urgent d’agir » selon ArcelorMittal

Les exportations d’acier chinois ont bondi de plus de 50% en 2015, des milliers d’emplois ont été supprimés dans le secteur et des dizaines de milliers d’autres sont menacés, a-t-elle relevé, alors que la Chine, en plein ralentissement et qui détient 50% de la capacité mondiale de production, cherche des débouchés.

De son côté, la Chine a fait connaître son intention de réduire sa production d’acier de quelque 150 millions de tonnes sur les cinq prochaines années, alors que sa surproduction est estimé à 340 millions de tonnes par des experts. « Une bonne annonce », mais cela « prendra du temps », a commenté vendredi dernier le patron d’ArcelorMittal, Lakshmi Mittal, déterminé à lutter contre le dumping chinois. Il y « un besoin d’urgent d’agir », a insisté le groupe, qui venait d’annoncer une lourde perte nette pour 2015, plombée par des dépréciations d’actifs liées à la chute des prix de l’acier.

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