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Taylor Swift, un cas d’école 


La pop star américaine s’invite à la rentrée dans un cours de littérature d’une université belge, où seront décortiquées les références de ses textes et proposées des connexions inattendues, de The Great Gatsby aux soeurs Brontë.

Pour Elly McCausland, professeur assistante à l’université de Gand, les paroles composées par la chanteuse de 33 ans, outre leurs propres qualités stylistiques, sont une porte ouverte pour se plonger dans les chefs-d’œuvre de la littérature anglo-saxonne et leurs thématiques. Selon l’enseignante de littérature anglaise, on peut par exemple s’appuyer sur des titres comme The Man pour explorer le féminisme, ou encore s’intéresser à la figure de l’antihéros grâce au morceau Anti-Hero (tiré de son album Midnights).

Elle-même fan de longue date de l’auteur-compositeur à la célébrité planétaire, Elly McCausland a imaginé il y a quelques mois ce programme d’études en écoutant la chanson The Great War. «La façon dont elle recourt à la guerre comme métaphore d’une relation, cela m’a un peu dérangée, mais m’a fait penser au poème de Sylvia Plath, Daddy, qui fait la même chose et dont la lecture suscite aussi le malaise», explique-t-elle.

Des paroles comme «passerelle»

L’universitaire insiste d’emblée : le cours qu’elle propose, intitulé «Literature (Taylor’s Version)» et destiné aux étudiants de master, vise avant tout à rendre la littérature «plus accessible», et «il ne s’agit pas de créer un fan-club de la chanteuse». «L’objectif est d’amener les étudiants à réaliser que la littérature anglaise n’est pas un tas de vieux livres écrits il y a longtemps et prenant la poussière dans une bibliothèque, mais que c’est une chose vivante, qui respire et qui évolue continuellement», jusqu’à inspirer la musique pop d’aujourd’hui, souligne-t-elle.

Dans le cours concocté par Elly McCausland, les paroles de Taylor Swift sont «une passerelle» vers la lecture des géants de la littérature britannique : William Shakespeare, Charlotte Brontë (Jane Eyre), Geoffrey Chaucer (les Contes de Canterbury) ou William Thackeray (Barry Lyndon, La Foire aux vanités). On peut aussi voir dans ses chansons des références à des écrivains aussi divers que le romancier anglais Charles Dickens ou la poétesse américaine Emily Dickinson, et tresser des parallèles avec le style des poètes britanniques romantiques du début XIXe siècle.

Un amour des mots

Lors d’un entretien avec le chanteur des Beatles, Paul McCartney, publié en 2020 par le magazine américain Rolling Stone, Taylor Swift s’épanchait sur son amour des mots et de l’écriture, racontant comment, en pleine pandémie, elle lisait «plus qu’elle ne l’avait jamais fait», se plongeant notamment dans le Rebecca de Daphné du Maurier. La popularité du cours semble au rendez-vous, Elly McCausland ayant même reçu des demandes d’inscription d’étudiants extérieurs à l’université flamande, y compris via son compte Instagram.

Mais son projet a également suscité des vagues de commentaires critiques en ligne, s’interrogeant sur la nécessité d’introduire Taylor Swift dans un cursus universitaire de lettres, et plus encore au niveau du master. Pour Elly McCausland, cela rappelle la controverse déclenchée en 2016 par l’attribution du prix Nobel de littérature à Bob Dylan, auteur-compositeur-interprète lui aussi pétri de références livresques.

Une première en Europe

L’initiative de l’université de Gand intervient alors que Taylor Swift, qui avait sorti son premier album dès 2006, a vu sa carrière atteindre cette année de nouveaux sommets avec son Eras Tour (plus de 100 concerts), tournée mondiale qui pourrait dépasser la barre du milliard de dollars de recettes. La chanteuse américaine est devenue en juillet, avec son dernier opus Speak Now (Taylor’s Version), l’artiste féminine ayant le plus grand nombre d’albums numéro 1 des ventes, détrônant Barbra Streisand avec douze albums ayant été en tête du Billboard, classement de référence.

Si le cours d’Elly McCausland est sans doute une première en Europe continentale, des programmes similaires ont toutefois déjà émergé outre-Atlantique et au Royaume-Uni : le Clive Davis Institute de l’université de New York avait ainsi lancé l’an dernier l’un des premiers cours axés sur la chanteuse et l’université Queen Mary de Londres proposait en juillet une session d’été sur «Taylor Swift et la littérature».

Il ne s’agit pas de créer un fan-club de la chanteuse!

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