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[Musique] Chronicles of a Diamond : Black Pumas affûte ses griffes


Retrouvez la critique de l’album de la semaine : Chronicles of a Diamond de Black Pumas.

Ça a été une déflagration ou, comme le reconnaît le chanteur Éric Burton, un succès «irréel». Remontons à  2019, année ô combien fertile pour la soul et ses relectures modernes. On avait ainsi eu droit à une pépite sensuelle de Kelly Finnigan (The Tales People Tell), à une offrande «vintage» de Lee Fields & The Expressions (It Rains Love), à la folle escapade en solo de Brittany Howard, échappée alors d’Alabama Shakes (Jaime), aux belles orchestrations de Michael Kiwanuka (Kiwanuka) ou encore aux élans nostalgiques, façon Motown et Stax Record, de Durand Jones et sa bande (American Love Call). Tout droit sorti de la jungle, un duo inconnu, dénommé Black Pumas, cherchait alors à se faire une place au cœur de la mêlée. Mais vu les clients en face, on ne donnait pas cher de sa peau.

Pourtant, ce fut tout le contraire qui se produisit. Rapidement, ce tout premier disque, élégant et inventif, s’appuyant sur la tradition pour mieux en moderniser l’approche, a trouvé ses auditeurs. Et c’est peu dire : sept nominations aux Grammy Awards (dont celle de meilleur album), plus de 400 millions de «streams» pour le seul titre Colors, des louanges en pagaille et une tournée sur les scènes du monde entier, entre l’Europe et les États-Unis, jusqu’à celle de l’investiture du président Joe Biden en 2021… Être propulsé aussi subitement sur la première marche du podium nécessite toutefois d’avoir la tête sur les épaules et beaucoup de recul pour ne pas la perdre. D’où ces quatre ans de digestion pour passer l’étape du second opus. Éric Burton, lui, a la parade, préférant le voir comme un nouveau «premier album», dit-il sur Bandcamp.

Black Pumas n’invente rien, mais donne une lumière nouvelle à la « sweet soul music »

Alors oui, comment faire mieux ? Black Pumas tient sa réponse dans l’ADN même qui le compose : celui d’un duo de passionnés, dont les chemins se sont croisés il y a six ans. D’un côté, Éric Burton donc, autodidacte qui a fait ses armes sur les plages et les quais de métro de Los Angeles. De l’autre, Adrian Quesada, à la fois guitariste et producteur, explorateur-manipulateur de sons latinos et accompagnateur occasionnel de Prince. À l’époque, il cherchait un collaborateur qui «apprécie autant Neil Young que Sam Cooke». Bingo ! Entre ces deux-là, la connexion se fait de façon quasi «télépathique». «Tout prend immédiatement vie d’une manière excitante!», lâche ce dernier qui, après avoir concocté la majeure partie du premier disque seul, s’est ouvert là aux idées «bizarres» de son acolyte.

Deux notions s’imposent d’emblée : d’abord celle d’incorporer en studio toute l’énergie du live, ces moments intenses, transcendants, comme dans une «église électrique», définit Éric Burton. D’ailleurs, il n’est pas étonnant d’apprendre que Chronicles of a Diamond a été peaufiné en pleine tournée, entre le Mexique et les Pays-Bas. Ensuite, continuer à pousser tous les curseurs le plus loin possible. Au départ déjà, ils ne s’adressaient pas aux puristes, alors pourquoi se priver ! Au menu, donc, comme ils le précisent, «des touches de pop symphonique céleste, des excursions étonnantes dans le jazz-funk, des balades gospel aériennes semblant tomber des étoiles». Concrètement, Black Pumas n’invente rien, mais donne une lumière nouvelle à ce que l’on appelle la «sweet soul music».

Tout au long des dix chansons, le duo sature un peu plus les guitares et durcit le ton (un peu dans l’esprit des Black Keys), mais n’oublie pas pour autant les apparats du genre, appuyés par son groupe (dont deux chanteuses) : des chœurs gospel, des violons sucrés et un piano pleureur. Au fur et à mesure que le disque avance, il garde la tendance et s’aventure dans des directions inattendues. Une mosaïque sonore qui leur est propre, animée selon un précepte avancé par Éric Burton : «Être enthousiaste, c’est quelque chose que nous pouvons tous choisir aujourd’hui et chaque jour à venir !». Non, Black Pumas, bête sauvage et imprévisible, ne se domptera pas facilement. Et ce n’est pas demain qu’on le mettra en cage.

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