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Jul, le rap blockbuster


Indétrônable : en moins de dix ans, Jul s’est imposé comme le plus gros vendeur de l’histoire du rap français et celui qui a réussi à unifier toute la scène marseillaise.

L’année 2022 n’aura pas fait exception. Selon les chiffres du Syndicat national de l’édition phonographique (SNEP), Jul reste l’artiste le plus écouté dans le riche paysage du rap français : avec sept albums en solo dans le top 200, le prolifique artiste marseillais présente 582 635 ventes cumulées, sans compter les albums collectifs 13’Organisé (2020) et Le Classico organisé (2021), qu’il a initiés.

Au total, il aura vendu plus de six millions d’albums depuis ses premiers morceaux en 2013. Avec plus de cinq milliards de streams, il est devenu le rappeur français le plus écouté sur Spotify, selon la plateforme musicale en tête du marché mondial.

Le tout sans l’appui d’un label – il a créé le sien – ou d’une équipe marketing. Seuls deux avocats l’entourent et trient, au compte-goutte, les demandes d’interview pour l’artiste à la mèche blonde et aux tempes rasées. «Jul, c’est une rock star», analyse Narjes Bahhar, responsable éditoriale rap chez Deezer, plateforme sur laquelle il est l’artiste le plus écouté.

«En survêt-claquettes», comme il se décrit dans ses chansons, Jul ne fait pas dans l’esthétisme. Dans sa vie comme dans ses textes. C’est justement cette simplicité, voire cette bonhommie, portée par des sons très dansants, qui font sa marque de fabrique… Sans oublier son signe, avec les mains mimant deux pistolets pointant vers le ciel pour faire apparaître son nom.

Un emblème devenu phénomène de mode : Rihanna, Zinédine Zidane, Wayne Rooney, Matt Damon, Travis Scott et des politiques de tous bords, d’Alain Juppé à Philippe Poutou, ont été vus en train de faire le signe Jul. En 2020, au Parlement européen, à Strasbourg, trois lycéens originaires de Marseille ont même fait le signe en guise de clôture de leur discours, sans manquer d’amuser l’hémicycle.

«Symbole de Marseille»

House, raï, disco… «Le J» mélange, innove, invente. Des productions chaloupées loin du rap des pionniers marseillais d’IAM mais qui ont fait de Jul un «artiste écouté en dehors des frontières hexagonales», assure Narjes Bahhar. De son vrai nom Julien Mari, il naît à Marseille en 1990 dans un milieu modeste. Le rap? Il en fait depuis «tout petit», raconte-t-il. «Avec ma première paye, je me suis acheté mon micro, mon ordi, ma carte son. Dès que j’ai mis ça dans ma chambre, c’était bon!», confiait-il. Ce rap «fait maison» est son ADN musical.

Les choses s’accélèrent en 2013 lorsqu’il signe sur un label des quartiers nord, avant de sortir un an plus tard son premier album, Dans ma paranoïa. En 2015, «l’Ovni», comme il se fait aussi appeler, fonde son propre label indépendant, D’or et de platine. Un moment déterminant, à partir duquel Jul ne cessera de réinventer les codes : ultraproductif, il multiplie les albums gratuits, improvise des «release parties» dans différentes villes de France, en pleine rue…

L’autre spécificité de son rap est qu’il est indissociable de Marseille, dont il parle à longueur de textes et où il tourne ses vidéos. «C’est un symbole de Marseille», rapportait l’autre star du rap de la ville, SCH. Trônant dans le top 5 des artistes les plus écoutés sur les plateformes depuis 2015 – en s’octroyant régulièrement la première place –, Jul devient en février 2020 le plus gros vendeur de disques de l’histoire du rap français, avec plus de quatre millions d’albums vendus à l’âge de 30 ans, et en sept ans de carrière. Un record.

Unifier le rap marseillais

Prolifique, il sort deux albums par an : un l’été et un l’hiver – les derniers en date ont pour titres, respectivement, Extraterrestre et Cœur blanc. Malgré le succès et une Victoire de la musique en 2017 (pour l’album My World), il reste méprisé par la critique et le milieu musical, qui moquent ses fautes d’orthographe, lui qui a abandonné l’école très tôt, et ses déboires judiciaires (excès de vitesse sous cannabis, entre autres).

Pas seulement un gros vendeur, il est aussi celui qui unifie la scène rap marseillaise à travers deux projets : 13’Organisé – 436 millions de vues sur YouTube pour le clip de la chanson phare, Bande organisée – et Le Classico organisé. Le premier est un album collectif d’artistes marseillais, le deuxième une sorte de «battle» avec des rappeurs parisiens, sur le modèle d’un classico de football.

«Il a montré que toutes les personnalités marseillaises, pourtant différentes les unes des autres, pouvaient travailler ensemble et, ça, c’est très fort», soulignait une autre star du rap marseillais, Soprano. «Il faut rendre à César ce qui est à César : Jul a réussi ce qu’un mec comme Akhenaton (NDLR : membre d’IAM) ou moi, on a essayé de faire», poursuivait-il.

L’analogie ente rap et football ne s’arrête pas là. En juin, Jul remplissait le stade Vélodrome, antre de l’OM, pour un show de trois heures. Comme la rencontre évidente de deux monuments de la deuxième ville de France. En bousculant, encore une fois, les codes, lorsqu’en plein concert, il décide de créer de toutes pièces un morceau en «live», avec le concours de sa «team»… de 60 000 spectateurs.

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