Un an après en avoir montré des esquisses, Mother, la pièce d’Emanuela Iacopini, est de retour au Fundamental Monodrama Festival pour sa première.
Après dix jours de réjouissances, le Fundamental Monodrama Festival touche à sa fin; le seul en scène a été représenté dans 16 spectacles, pour se conclure, ce dimanche soir, avec de la danse. C’est un «double bill» de création luxembourgeoise qui sera à l’honneur dans l’enceinte de la Banannefabrik, avec deux pièces très personnelles, qui livrent, chacune à leur manière, une réflexion sur le corps en mouvement; à la chorégraphe Emanuela Iacopini d’ouvrir la soirée en présentant une version définitive de Mother, la pièce en solo dont elle avait présenté une «esquisse», lors de l’édition 2022 du Monodrama, dans le cadre du Monolabo. «Enfin, pour ce que « définitive » peut bien vouloir dire», lâche-t-elle dans un sourire.
Car la pièce naît d’une réflexion sur la création au sens large, la pensée de l’artiste étant guidée par la fameuse formule que Lavoisier avait appliquée à la chimie : «Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme». Il y a, de l’aveu de la chorégraphe et danseuse, l’envie de comprendre «comment on peut combiner des éléments existants pour en former d’autres», dans l’art comme dans la vie. «Mother évoque bien sûr la maternité, soit la création d’un être humain», explique cette mère de deux enfants, «mais c’est aussi la création artistique, produire, reproduire et voir les choses de la vie avancer en se combinant, par volonté, par chance ou par erreur». «C’est une pièce holistique», résume-t-elle.
La chorégraphe, qui est elle-même la danseuse sur scène, dit avoir approché son travail à travers «la recherche du mouvement», aidée par un élément central, l’eau, qui, «associé à l’idée du changement ou de la transformation, peut être tout» : «J’avais envie d’explorer la qualité principale de l’eau, sa fluidité, et amener (dans le mouvement) des changements microscopiques et continus. L’eau est un élément basique, primordial, c’est la source de la vie et la composition majoritaire de tous les êtres vivants.» Le début de la réflexion a mené Emanuela Iacopini sur une piste qui, forcément, devait lui rester ancrée au corps : «Chaque cellule du corps humain est faite d’eau; quand on bouge, des millions de microquantités d’eau bougent avec nous.»
Après avoir déroulé, dans la pièce déjà «méta» UNDO (2018), une réflexion dansée sur la pratique même de sa discipline, l’artiste poursuit dans une veine similaire avec ce seule en scène : «C’est vrai que, récemment, on a fait pas mal de pièces avec plusieurs danseurs. J’ai eu envie de revenir à quelque chose de plus simple.» Mother a été conçue par Emanuela Iacopini et son mari, le compositeur Rajivan Ayyappan; ensemble, ils ont fondé en 2015 la compagnie Vedanza, à Luxembourg.
«Depuis longtemps, on avait envie de faire une pièce qui revienne à l’essence même de ce que la compagnie a produit depuis ses débuts. Mais avec la simplicité de la forme vient une énergie plus posée. On n’est pas, comme cela peut être parfois le cas en danse, dans une pensée philosophique qui alourdit; notre réflexion peut être profonde, mais nous avons tenu à trouver une forme d’expression directe et rafraîchissante», analyse-t-elle.
Entre le début et la fin de la pièce – qui dure approximativement 40 minutes, et qui sera suivie du premier solo de Rhiannon Morgan, AdH(A)rA –, l’artiste promet se voir se développer «une toute nouvelle écologie». Dire qu’elle est seule en scène, d’ailleurs, n’est pas tout à fait vrai : elle est l’unique présence humaine, mais sa danse est accompagnée de musique, d’une projection et de sculptures en plastiline, un travail pluridisciplinaire créé par Rajivan Ayyappan. Ces éléments aussi «se transforment en live», précise Emanuela Iacopini, ajoutant que le couple avait initialement cherché une façon d’amener l‘élément de l’eau sur scène sous sa forme naturelle, sans effet.
Ce dimanche, c’est un long travail qui s’achève, et qui commence une nouvelle vie. Une création, à juste titre, qui succède à une période de réflexion et de travail «intenses». Depuis le «work in progress» présenté il y a un an au Monolabo, Mother a connu son lot de transformations, la plus importante restant la «forme d’apaisement» que la pièce connaît dans sa forme finale, grâce aux «apports de la musique, de la projection, des sculptures et de la scénographie». Ainsi, Emanuela Iacopini se dit «très reconnaissante de l’espace créatif et de la liberté» que leur a offert le Monodrama, tout en saluant «leur soutien». «Ce festival a trouvé une formule parfaite pour les artistes, et on l’adore aussi pour ça!»
Première ce dimanche, à 19 h. Banannefabrik – Luxembourg.