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Macron en politique : vent de fraîcheur ou vieilles recettes ?


Emmanuel Macron en visite le 6 avril 2016 chez Procter & Gamble à Amiens. (Photo : AFP)

«Disruptif», Emmanuel Macron ? Le ministre de l’Économie, qui a lancé cette semaine son propre mouvement veut faire souffler un vent de fraîcheur sur la politique et la société française. Tout en s’appuyant sur des modèles socio-économiques connus de longue date.

Un vendredi matin, face à des décideurs et des entrepreneurs rassemblés dans l’hémicycle du Conseil économique, social et environnemental (CESE) pour le «Printemps de l’optimisme». Le publicitaire Jacques Séguéla, 82 ans, tombe dans les bras du locataire de Bercy.

«C’est le meilleur ministre que n’ait jamais eu la France !», s’enflamme l’homme d’affaires et ex-stratège des campagnes Mitterrand, qui se définit aujourd’hui comme un «sarkozyste primaire, voire primate».

Une réaction certes expansive, mais pas si rare. Chefs d’entreprise, responsables associatifs, élus locaux… Nombreux sont ceux qui manifestent leur ferveur, lors des nombreux déplacements du jeune ministre, à coups de selfies ou d’interminables poignées de main.

A l’origine de cette «Macron mania»: l’image de rupture que le ministre de 38 ans, un adepte du numérique, loin du stéréotype du technocrate froid et distant, souhaite incarner. «Les gens en parlent. Il est jeune, nouveau, transgressif, souriant, malin», confie un député de la majorité.

35 heures, fonctionnaires, déchéance de nationalité… depuis son arrivée à la tête de Bercy voilà 18 mois, l’énarque passé par la banque d’affaires Rotschild n’a pas hésité à multiplier les déclarations iconoclastes, quitte à mettre en porte-à-faux son propre camp.

«Il veut faire bouger les lignes», déclare l’économiste Philippe Aghion. «Il considère que le clivage aujourd’hui ne se situe pas entre la gauche et la droite mais entre les réformistes et les non réformistes», ajoute celui qui est considéré comme l’un des «parrains» intellectuels d’Emmanuel Macron.

Une initiative saluée par le numéro un du Medef, Pierre Gattaz, la jugeant «rafraîchissante». Pour le politologue Philippe Braud, si cette stratégie est dans une certaine mesure «transgressive», elle n’est pas novatrice.

«Faire bouger les lignes»

«Depuis toujours, une majorité de Français souhaite qu’on dépasse le clivage droite-gauche», explique-t-il rappelant que jusqu’à présent, toutes les tentatives d’hommes politiques en la matière avaient échoué, se heurtant aux appareils de droite ou de gauche.

De fait, des deux côtés de l’échiquier, les réactions au lancement du mouvement En Marche fusent. «Il serait absurde de vouloir effacer» les différences entre la gauche et la droite, a ainsi déclaré le Premier ministre Manuel Valls.

De son côté, Henri Guaino, député LR, a dit avoir «horreur de la politique qui fait des discours de droite, se dit de gauche, et cherche à faire de la politique centriste». «Je déteste une politique qui se dit sociale-libérale et qui n’est en réalité que libérale, et absolument pas sociale», a ajouté M. Guaino, pointant aussi «une politique qui cherche à dresser les Français les uns contre les autres».

Car le ministre en s’en cache pas, il prône une approche libérale de l’économie. Il a «cette idée que tous les citoyens quelle que soit l’origine sociale, doivent avoir accès aux mêmes opportunités d’épanouissement individuel, mais qu’il ne faut pas décider à leur place», défend M. Aghion.

Son mouvement «s’inscrit dans un courant de pensée, le social-libéralisme, qui s’est développé depuis près de trente ans», selon l’économiste. Rien de bien nouveau donc. La plupart des mesures qu’il prône ne sont pas non plus révolutionnaires, ayant été inspirées de la commission Attali de 2007, comme la libéralisation des autocars ou la réforme des qualifications pour les artisans.

Ses idées sont de «vieilles idées libérales», affirme Dany Lang, professeur à l’université Paris XIII, et membre de l’association des Economistes attérrés.

Emmanuel Macron «représente une vision du XIXe siècle qui n’est pas du tout à la hauteur des enjeux d’aujourd’hui», comme «l’importance de la transition écologique», estime-t-il, ne voyant dans le ministre qu’un «lobbyiste financier professionnel».

«C’est l’imposture de la modernité dans une course à l’échalote à qui sera le plus moderne, mais sur le fond c’est une vision archaïque, ringarde de la société et des solutions pour s’en sortir», estime le secrétaire national d’Europe Ecologie-Les Verts David Cormand.

Le Quotidien/AFP

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