Déi Lénk a réclamé, mercredi à la Chambre, une hausse substantielle du salaire social minimum. Le parti a trouvé peu d’alliés. Il a été renvoyé vers la réadaptation automatique, prévue début 2023.
L’introduction d’un cadre pour la mise en place d’un salaire minimum à l’échelle de l’UE constitue le projet phare du commissaire européen luxembourgeois Nicolas Schmit. Il est sur le point de devenir réalité. Le vote formel de la directive est prévu pour septembre. Les Parlements nationaux auront alors deux ans pour ratifier le texte. Déi Lénk ne veut plus attendre.
Le parti d’opposition est monté, mercredi, à la tribune de la Chambre des députés, pour réclamer au plus vite une nouvelle hausse substantielle du salaire social minium (SSM) au Luxembourg. La revendication n’a pas trouvé de majorité, même si le LSAP et déi gréng, deux membres de la coalition gouvernementale, se sont montrés ouverts à une telle mesure.
« Les conditions de travail et de vie doivent être améliorées »
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le fait que le Luxembourg dispose du salaire minimum le plus élevé de l’UE ne l’exemptera pas de revoir sa politique salariale une fois la directive européenne entrée en vigueur. «L’objectif est clair : les conditions de travail et de vie doivent être améliorées», souligne Myriam Cechetti en ouverture du débat. «La directive est un très bon levier pour obtenir une hausse substantielle du salaire minimum au Luxembourg qui doit contribuer à une réduction des inégalités sociales», poursuit l’élue de déi Lénk. Car les 2 313 euros pour les travailleurs non qualifiés et les 2 776 euros pour les travailleurs qualifiés «ne sont pas suffisamment élevés pour pouvoir mener une vie décente».
La directive européenne à venir appelle les États membres à assurer que le salaire minimum national corresponde soit à 60 % du salaire médian ou 50 % du salaire moyen. Selon déi Lénk, il faudrait augmenter le SSM luxembourgeois de 150 euros par mois pour respecter le premier critère et de 350 euros pour le second. «Nous privilégions bien entendu le second montant», affirme Myriam Cecchetti.
Une motion appelant le gouvernement à procéder à cette hausse du SSM a finalement été rejetée par les 31 élus de la majorité tricolore (DP, LSAP, déi gréng), 25 abstentions (CSV, ADR). Seuls déi Lénk et le Parti pirate ont voté pour.
Le LSAP et déi gréng ouvrent la porte
«Il est bizarre qu’on ne soit pas d’accord sur cette motion, alors que tous les partis affirment que beaucoup de personnes n’arrivent plus à joindre les deux bouts», s’étonne la députée sudiste. Il est vrai que lors du débat, le LSAP de Dan Kersch a noté qu’«une hausse structurelle du salaire minimum reste d’actualité», non sans préciser, qu’il est peu probable que cette dernière intervienne encore avant la fin de la législature en cours. Charles Margue (déi gréng) énonce de son côté qu’«une hausse structurelle ne doit pas être un tabou».
Dans le camp de la majorité, le DP et son orateur Frank Colabianchi se sont contentés d’une mise en garde : «Il faut faire attention que les hausses régulières du salaire minimum n’impactent pas trop lourdement les entreprises.»
En tant que principal parti d’opposition, le CSV a botté en touche. «Il n’y a pas encore de directive qui est votée. Cela me dérange un peu. Il faudra attendre la base chiffrée et le texte de loi à venir», avance Marc Spautz. L’ADR renvoie vers le début de la prochaine législature, en octobre 2023, pour envisager une hausse forfaitaire de 100 euros du SSM, «uniquement à condition que la situation économique le permette», précise Fernand Kartheiser. Les pirates veulent eux faire un pas de plus. «Le salaire minimum doit être supérieur à 20 % au seuil de pauvreté», tranche Marc Goergen.
Influencer d’autres coûts
Concernant les seuils avancés par la Commission européenne, le ministre du Travail, Georges Engel (LSAP), dresse un autre calcul que déi Lénk : «En juin, le salaire minimum qualifié équivalait à 58,62 % du salaire médian.» Avec le crédit d’impôt énergie, plus favorable aux bas revenus, la situation financière des ménages concernés devrait encore s’améliorer, estime le ministre. Il se dit toutefois conscient que «tous ne peuvent pas vivre décemment. D’où la réflexion d’influencer d’autres coûts, tels que le loyer ou l’imposition».
La seule concession majeure faite, hier, est la mise en perspective de la prochaine adaptation automatique (bisannuelle) du salaire minimum dû début 2023. Les quelque 60 000 personnes qui touchent le SSM devront donc encore patienter avant de voir leur revenu revalorisé.