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[Musique] Max Nilles (Artaban) : «Quand on fait de la musique, on ne fait que de la musique !»


Charles et Max Nilles, les deux frères derrière Artaban, ont conçu Rec. Play. Rewind. en travaillant pour la première fois dans des studios séparés. (Photo : christian aschmann)

Dix ans après leur dernier album, les frangins d’Artaban se sont fendus, fin juillet, d’un troisième disque, Rec. Play. Rewind., sorte de B. O. imaginaire d’un film que Max Nilles, moitié du duo, rembobine pour Le Quotidien.

La dernière fois que Le Quotidien a rencontré Max et Charles Nilles, c’était en 2013, pour la sortie de leur deuxième album, Flow. Depuis, plus rien ou presque… jusqu’à ce que les frangins signent leur retour sous la bannière d’Artaban pour un nouvel album, Rec. Play. Rewind., sorti fin juillet, et un concert unique dans le cadre des Congés annulés des Rotondes. Même s’il ne faut «jamais dire jamais», Max Nilles, cadet de la fratrie, rappelle qu’il s’agissait là d’une «configuration inhabituelle, comme à nos débuts», soit deux sur scène, alors que le groupe s’était enrichi d’un troisième membre – Aurélie, multi-instrumentiste et épouse de Max – et d’un VJ.

Un concert «un peu particulier» pour un nouvel album qui l’est tout autant. Loin de leurs accents electro-pop des débuts, Artaban vit de façon décomplexée sa cinéphilie et propose de plonger dans la bande originale d’un film imaginaire, qui aurait pu sortir quelque part en Europe dans les années 1970. En neuf titres et 45 minutes d’une electro riche et éclectique, le duo alterne des compositions évoquant ici du suspense (Barman), là une scène d’action (Chevrotine), et d’autres qui se dessinent de manière organique (Moebius, Skog). Un voyage étonnant et addictif à faire sur toutes les plateformes, mais Artaban a aussi pensé aux amateurs de vinyle grâce à une sortie limitée sur Muaaaah! Records, le tout jeune label luxembourgeois dédié à la réédition qui fait une entorse à son credo, au bénéfice de ses talentueux copains.

Qu’est-ce qui a déclenché l’idée d’un nouvel album, dix ans après le précédent?

Max Nilles : Chez nous, il n’y a rien de planifié. On n’essaie pas de s’imposer un défi ou d’atteindre un objectif. Cet album, on ne s’est jamais dit qu’il fallait ou pas le faire, mais on savait qu’on voulait le faire; il aurait pu arriver n’importe quand et sous n’importe quelle forme. On a eu des périodes creuses, d’autres où on a travaillé des idées, ce qui nous en a amené d’autres, et c’est comme ça que le projet a pris forme. Cet album a été composé pour le studio. Pour les deux précédents, on a créé les morceaux en répétitions et on les a peaufinés par la suite. Là, c’était le processus inverse : on a travaillé chacun de notre côté des idées qui traînaient depuis un moment. Toute la réalisation de cet album a couru sur trois ou quatre ans, pendant lesquels on a composé des choses que l’on a modifiées, avant de recommencer à zéro par souci de cohérence. Si on n’a pas de label, c’est justement pour cette raison : personne ne nous met de pression! (Il rit.)

En travaillant séparément, avez-vous eu des difficultés à retrouver le son du groupe?

Moi, je m’occupe plus de la partie analogique et rythmique, batterie-basse. C’est surtout de mon frère, soit de la partie electro, que viennent les premières ébauches. Je n’influe pas du tout là-dedans, je le laisse complètement faire – mais ça, c’est moi qui le dis (il rit). Quand il m’a fait écouter ses premières idées, j’avais encore un peu de recul et ça me faisait parfois sourire, car j’y retrouvais des petits trucs. Aujourd’hui, c’est à des oreilles objectives de juger de ça! En tout cas, c’est Charles qui continue à tisser le fil rouge d’Artaban.

On écoute un peu cet album comme on écoute une B. O. de film « vintage »…

Au-delà de l’influence que ça a eu sur la musique, le cinéma a toujours fait partie de notre quotidien. Musicalement, on a toujours adoré les B. O. de films des années 60 à 80, surtout français, car ça nous évoque plein de souvenirs d’enfance. La vie un peu rurale, les voitures aux phares jaunes, ça nous a toujours parlé – on est très « phares jaunes », c’est un de nos mots-clefs (il rit). C’est un cinéma dans lequel on avait de tout : des films d’auteur aux compositions très classes, des comédies super kitsch avec des musiques délirantes, et des types complètement à part, comme Cosma, Magne… Le nom Artaban vient du film Fantômas contre Scotland-Yard, et de la scène de « l’opération Artaban », où les policiers déguisent un chien en renard… On est dans la comédie un peu lourde, mais qui est contrebalancée par un côté esthétique soigné, dont fait bien sûr partie la musique de Michel Magne.

Pour les passionnés que vous êtes, un film d’Artaban pourrait voir le jour?

Quelque part, la musique est notre échappatoire, alors, quand on fait de la musique, on ne fait que de la musique! C’est un exercice dans lequel on doit être à fond. Donc un film d’Artaban, aujourd’hui, on serait plutôt tenté de le donner à quelqu’un d’autre. Surtout qu’on est très chiants entre nous (il rit)! Mais à l’époque, le visuel faisait complètement partie du groupe, car on avait intégré le VJing à nos concerts, à une époque où ça ne s’était pas encore démocratisé. Le VJ travaillait avec nous en live; on le laissait faire, et on aimait avoir une autre approche du projet par quelqu’un qui amenait sa vision.

Vous, qui n’avez pas de label, avez trouvé refuge chez Muaaaah! Records pour la sortie du disque en vinyle. C’est vous qui avez forcé vos copains à s’aventurer dans autre chose que la réédition?

(Il rit) C’était avant tout un hasard! On voulait sortir Rec. Play. Rewind. sur vinyle, mais en restant tout de même réalistes. Autrement dit : si ça nous coûtait trop cher, tant pis pour le physique. Et on ne pensait pas du tout à Muaaah! Records, qui s’étaient effectivement donné comme ligne éditoriale la réédition. On a été surpris que ça les intéresse, d’ailleurs, mais on a trouvé un arrangement! On se connaît très bien, et ils savent qu’on ne partira pas trois mois en tournée de sitôt. Eux comme nous, on fait ça par passion.

Charles et vous disiez au Quotidien, il y a dix ans, qu’Artaban était votre « projet le plus solide ». C’est encore le cas aujourd’hui?

Oui, par définition : on est encore là et on fait encore de la musique ensemble. Ce sont les liens fraternels qui font que l’on reste très proches. C’est sans doute ça qui nous donne l’envie, aussi, mais ce n’est pas quelque chose que l’on travaille, comme c’est souvent le cas dans un groupe avec plusieurs membres. Artaban avait toujours été un truc à part, parmi d’autres groupes et d’autres projets à côté. Si on a pu refaire un album, c’est parce qu’on avait plus de temps à lui consacrer.

Rec. Play. Rewind.,
d’Artaban. Muaaaah! Records.

Un film d’Artaban, aujourd’hui, on serait plutôt tenté de le donner à quelqu’un d’autre. Surtout qu’on est très chiants entre nous!

Ce sont les liens fraternels qui font que l’on reste très proches. C’est sans doute ça qui nous donne l’envie, aussi

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