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Mort par overdose : à qui la faute ?


La qualité de la cocaïne consommée n’est pas responsable du décès de la jeune femme, mais plutôt les grandes quantités consommées.

Une jeune femme est morte après avoir consommé de la cocaïne de deux dealers différents. Le tribunal doit trancher à qui ou à quoi revient la responsabilité de ce décès.

Mathieu, toxicomane depuis une quinzaine d’années, prétend avoir servi de chauffeur à un dealer de drogue contre quelques grammes de cocaïne. «Je l’emmenais, mais je ne savais pas toujours où nous allions ni pourquoi. Je lui ai procuré des cartes SIM de téléphone aussi», témoigne le jeune Belge qui, sans le savoir, a mis les pieds dans un milieu qui semble le dépasser. Il est soupçonné d’avoir participé à un trafic de stupéfiants avec Naoifel et Farès à Esch-sur-Alzette et à Pétange.

Naoifel comparaissait hier face à la 9e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg dans deux affaires de trafic de stupéfiants. La première concernait le décès par overdose d’une jeune femme et la deuxième portait plus directement sur ses activités. La jeune femme est décédée après avoir consommé de la cocaïne, une bonne partie des 10 grammes achetés à Naoifel et des 4 grammes offerts par Karim, un autre dealer avec lequel elle aurait entretenu des liens d’amitié. Le tribunal a dû déterminer quels étaient les responsables de cette overdose : les dealers, la qualité du produit ou la trop grande consommation de la défunte?

Selon un expert judiciaire, la consommation de cocaïne «est la cause unique de la mort» et plus particulièrement «la somme de toutes les injections, plus la dernière». Les 14 grammes de cocaïne ont été consommés en quelques douzaines d’heures. Mais dans quel ordre?

«Il s’agit, au vu des quantités de stupéfiants vendues, d’un trafic conséquent», estime la représentante du ministère public. Un trafic dont Mathieu s’est fait, selon elle, coauteur en le facilitant et en achetant de la drogue pour certains de ces amis. Elle a requis une peine de 15 mois de prison et une interdiction de conduire de 18 mois à son encontre, une peine de 36 mois et une amende appropriée contre Farès qui a été jugé par défaut ainsi que des peines de 8 ans de prison contre Naoifel et Karim, tous deux suspectés d’avoir causé la mort de la jeune femme.

«On a profité de sa gentillesse»

«La drogue vendue par mon client est-elle bien la drogue qui a causé la mort de la jeune femme?», interroge Me Stroesser, l’avocat de Karim, incarcéré en Belgique pour une affaire similaire. «Laquelle des deux drogues a causé la mort? La preuve n’a pas été rapportée.» L’avocat a tenté de minimiser l’activité de son client et de culpabiliser la victime. «Les overdoses de cocaïne sont extrêmement rares parce qu’il faut en consommer énormément pour risquer sa vie.»

Me Wies, l’avocat de Naoifel, souligne a contrario que, selon le compagnon de la victime, la dernière drogue consommée aurait été celle donnée par Karim et que ce n’était pas la première fois que la jeune femme faisait un malaise après avoir consommé de la drogue fournie par le jeune homme. Comme son confrère, il insiste sur la très grande quantité de drogue absorbée. Si le tribunal décide de ne retenir que la dernière drogue consommée ce soir-là, ce n’était pas celle achetée à Naoifel.

Ce dernier, pour tenter de se disculper, dit s’être approvisionné auprès d’un certain Farès dans la rue Aloyse-Kayser à Pétange. Le procureur, en se rapportant aux éléments d’enquête, démontre pourtant que les stupéfiants qu’il allait récupérer chez Farès lui appartenaient et que les deux hommes travaillaient en équipe. «Il se déresponsabilise dans tout le dossier et reporte tout sur les autres, comme cela a été le cas avec Mathieu» dans la voiture duquel il a laissé 25 grammes de cocaïne en s’enfuyant face à un contrôle de la police qui était sur ses traces depuis un certain temps.

Son avocat demande qu’une peine de prison «similaire à celle d’un primo-délinquant» soit prononcée à son encontre et a précisé que le prévenu était sans papiers, ce qui pouvait avoir orienté son choix d’activité. Une situation qui a touché Mathieu au point de vouloir aider le prévenu en mettant des cartes SIM à sa disposition ou en lui servant de chauffeur à l’occasion. «Il était loin de se douter des conséquences de ses actes», assure Me Hellinckx, arguant que le handicap mental du jeune Belge et sa toxicomanie l’avaient à l’époque empêché «d’agir en toute connaissance de cause». Il demande que son client soit acquitté des chefs d’inculpation de vente et de mise en circulation de drogues.

«On a profité de sa gentillesse», indique l’avocat. Mathieu ne doit pas être considéré comme coauteur ou complice des faits. À ce titre, il plaide en faveur d’une suspension du prononcé ou d’une peine de prison inférieure à six mois et assortie d’un sursis intégral.

Le prononcé est fixé au 30 juin.

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