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[Made in Luxembourg] Le verjus sort des grimoires


Les origines du verjus sont plus que millénaires, mais il avait pratiquement disparu.

La vigneronne Corinne Kox (domaine L&R Kox, à Remich) a relancé le verjus en 2020. Ce jus de raisins pas encore mûrs est une aubaine pour les cuisiniers qui recherchent de nouvelles saveurs.

Le produit

Son nom dit tout de lui. Le verjus (vert-jus) est un jus de raisin vert, produit à partir de grains pas encore mûrs, vendangés au milieu de l’été alors que les baies sont grosses comme des petits pois. «Ces parcelles sont spécialement sélectionnées pour le verjus», précise la vigneronne Corinne Kox.

Trois cépages sont utilisés : le cabernet blanc, le pinotin et l’auxerrois. Les deux premiers sont des cépages interspécifiques très résistants aux maladies de la vigne qui ne nécessitent pratiquement aucun traitement, même bio. Le troisième est là pour affiner le goût. Selon les millésimes, les proportions sont variables.

Aujourd’hui, ce sont la restauration et les bars qui en achètent davantage

Une fois à la cave, les raisins entrent cépage par cépage dans le pressoir hydraulique qui les écrasera doucement, comme on le ferait pour obtenir du vin ou du crémant. Les variétés seront individualisées dans de petites cuves en inox où les jus seront refroidis puis débourbés afin d’éliminer les impuretés. Pour conserver ce jus non fermenté (donc non alcoolisé) et non filtré, on lui fera subir une pasteurisation douce.

Le résultat, c’est un jus de raisin acide très peu sucré. On peut lui trouver une accointance avec le citron, mais il est moins agressif. Il est beaucoup plus rond et doux que le vinaigre. Pour nos palais, la sensation est nouvelle, mais ce produit était courant au Moyen Âge. Le verjus était utilisé comme base aigre des plats, comme conservateur et même comme remède. C’est l’arrivée des agrumes qui l’a condamné à l’oubli.

Très populaire en Autriche où son renouveau amène une grande variété (du plus acide au plus sucré), le verjus du domaine Kox invite aux expérimentations culinaires, les chefs du pays en sont d’ailleurs de plus en plus friands. Il permet par exemple d’affiner une soupe, une sauce ou un ragoût, de déglacer un risotto ou de faire mariner des fruits et des légumes. Il est aussi très intéressant en cocktail, dans un spritz ou tout simplement avec une eau pétillante.

Photo : dr

La productrice

Le profil de Corinne Kox est atypique dans le paysage de la viticulture luxembourgeoise. Scientifique, elle a soutenu sa thèse de doctorat en microbiologie à l’université de Montpellier. Reprendre le domaine familial à la riche histoire n’était pas une évidence, son envie s’est construite petit à petit, jusqu’à franchir le pas et venir rejoindre son père Laurent et sa mère Rita en 2012.

Son père a toujours eu une âme de défricheur. Pas du genre à suivre les modes, plutôt à faire confiance à son instinct, et tant pis (tant mieux?) si ses expérimentations heurtent la clique la plus traditionaliste de la région. Corinne est faite du même bois. Rien ne l’ennuierait plus que de répéter les mêmes gestes, saison après saison. Peu après son arrivée, en 2016, elle innove en faisant venir deux kvevris de 800 litres. Des kvevris? Ce sont des jarres de terre cuite géorgiennes, identiques à celles dans lesquelles les archéologues ont découvert les premières traces de fermentation de raisins il y a 8 000 ans.

À retenir

Le verjus est un jus de raisin vert acide, peu sucré, mais très fruité. Le domaine Kox (à Remich) est le seul à en produire au Grand-Duché. Plus doux que le vinaigre, moins agressif que le citron, il est un condiment très intéressant qu’il faut réapprendre à utiliser.

Corinne Kox est une jeune vigneronne qui ne conçoit pas son métier comme une routine. Elle se remet en question, innove et va de l’avant en s’inspirant de l’histoire de la viticulture (verjus, kvevris…) comme des technologies les plus avancées (drones…).

Le verjus du domaine Kox est disponible au domaine et sur sa boutique en ligne (25,50 et 75 cl). Quelques épiceries en proposent également. Depuis quelque temps, le verjus plaît beaucoup aux chefs qui aiment jouer avec sa saveur pour agrémenter leurs plats.

www.domainekox.lu

Son regard est porté sur les origines, mais aussi vers le futur. En 2019, elle est la première vigneronne de l’Union européenne à faire voler des drones pour traiter ses vignes (en bio). Ces premiers essais sont intéressants, mais, persuadée que l’on pourrait mieux faire, elle s’allie en 2021 à un projet de recherche européen plus vaste pour faire avancer la technique.

Sa dernière idée est de relancer l’agroforesterie. Cet hiver, elle va planter des vergers au milieu de vignes pour enrichir les écosystèmes. Elle est convaincue que cette diversité biologique et microbiologique accrue permettra de produire de meilleurs vins. C’est là pour elle le but de toute chose.

Où le trouver ?

Le verjus du domaine Kox est un produit nouveau, mais déjà demandé. «La clientèle évolue, constate Corinne Kox. Aujourd’hui, ce sont la restauration et les bars qui en achètent davantage.» Dès le départ, les chefs ont été intéressés. Julien Lucas, jeune étoilé au Michelin (La Villa de Camille et Julien, à Luxembourg-Pülvermuhle) s’en est fait l’ambassadeur. «Le citron est très agressif alors que le verjus est bien plus subtil, nous assurait-il. Je trouve ce produit très intéressant, il invite à l’innovation.»

On peut se procurer le verjus directement au domaine ou sur sa boutique en ligne. Il est également en vente dans quelques bonnes épiceries comme Wanderscheid (Luxembourg), Kaf Lokal (Esch-sur-Alzette), Meyrishaff (Tandel) et vinothèques à l’image de la Vinoteca (Luxembourg).

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