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Luxembourg : le «Platzverweis» va entrer en application


La Chambre des députés a validé, mardi soir, l’introduction d’une nouvelle mesure qui doit permettre à la police de mieux assurer l’ordre public. Le terme allemand «Platzverweis» se traduit dans les faits par un éloignement d’une personne qui entrave l’entrée ou la sortie d’un bâtiment public ou privé.

La mesure est en discussion depuis de longues années. Mardi soir, le «Platzverweis» est devenu une réalité légale. La Chambre des députés a, en effet, voté en faveur de cette nouvelle mesure policière. Les partis de la majorité (DP, LSAP, déi gréng) ont été rejoints par le Parti pirate pour donner le feu vert. Le CSV et l’ADR se sont abstenus, déi Lénk a voté contre. Résultat des courses : 33 oui, 25 abstentions et 2 non.

Une fois la loi entrée en vigueur, a priori dans quelques jours, les agents de police vont disposer d’un moyen supplémentaire pour assurer l’ordre public.

Plus concrètement, le «Platzverweis» va équivaloir à une «garantie d’accès» aux immeubles. Si une personne bloque l’entrée d’un commerce, d’une gare, d’un logement ou de tout autre type de bâtiment, les agents pourront forcer cette même personne à quitter les lieux. Peuvent être visés des dealers, SDF et fauteurs de trouble de tout type.

Importante précision toutefois : «Il n’est pas requis que la personne se comporte de façon à créer un danger pour la sécurité publique. Sa simple présence et le fait d’entraver la liberté d’aller et de venir des autres personnes souhaitant utiliser cet accès suffisent à justifier son éloignement».

L’éloignement peut se faire «par la force»

Dans un premier temps, les agents seront amenés à procéder à un rappel à l’ordre. Si la personne n’obtempère pas, une injonction d’éloignement sera formulée, et exécutée «au besoin par la force», comme le souligne le texte de loi. Uniquement dans ce dernier cas, la carte d’identité de l’individu sera contrôlé et un rapport sera dressé.

Assez controversé, la nouvelle mesure vise à «garantir la liberté de circulation en tendant à trouver l’équilibre entre la nécessité et la proportionnalité». La rapportrice du projet de loi, Stéphanie Empain (déi gréng), estime que «la problématique des entrées occupées par des personnes est toutefois un problème de société qui requiert la collaboration d’autres acteurs, notamment des communes et des services sociaux».

Le CSV veut aller beaucoup plus loin

Le CSV n’est pas satisfait de cette solution «light». Les chrétiens-sociaux ont voulu instaurer une véritable «interdiction d’accès et de séjour». Leur proposition prévoyait d’élargir le champ d’action du «Platzverweis» afin de permettre aux policiers d’«ordonner à une personne, qui, par son comportement ou son action, trouble ou menace la sécurité publique, de quitter immédiatement un lieu déterminé ou de ne plus y accéder temporairement».

Le principal parti d’opposition plaide, aussi, pour une application plus large de la mise en détention provisoire «lorsque la personne concernée fait l’objet, endéans 24 heures, d’un deuxième rappel à l’ordre, d’une deuxième injonction de s’éloigner ou d’un deuxième éloignement par la force». Ces revendications n’ont pas obtenu de majorité à la Chambre.

La CCDH très critique

En amont du vote, la Commission consultative des droits de l’homme (CCDH) avait lourdement fustigé le projet de loi. Elle a ainsi estimé que le «Platzverweis», même allégé, consititue «une mesure répressive qui restreint les droits fondamentaux des personnes visées».

La mesure ne peut, donc, être considérée de «proportionnelle et nécessaire que s’il n’y a pas d’autres alternatives moins invasives».

Le ministre de la Sécurité intérieure, Henri Kox, a rejeté ses critiques sans tarder.