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[Le portrait] Claudio Lombardelli, droit Obut


(photo Mélanie Maps)

Propulsé nouveau coach du F91 début janvier, l’ancien international n’a déjà plus le temps de se relaxer avec la pétanque.

Le F91 Dudelange a beau avoir signé une première partie de saison dont on ne le soupçonnait plus forcément d’être capable, porté par un esprit d’équipe inattaquable, il va quand même repasser par la case «team building» en cette mi-janvier. Et c’est avec le plus grand plaisir que son nouveau coach, Claudio Lombardelli, a programmé une activité dans laquelle il va briller, une soirée… pétanque.

D’habitude, au XXIe siècle, pour souder les «millennials», c’est plutôt laser game, karting ou VTT. Il faut faire aussi cool qu’eux pour emporter l’adhésion collective, mais il semblerait que des coaches un peu «old school» peuvent encore émerger des décombres du vieux monde, même quand ils n’ont que 36 ans. Claudio Lombardelli coche les cases et surtout… il aime la pétanque. Non, il l’adore.

C’est elle qui lui a longtemps tenu compagnie après sa terrible luxation de la rotule quand, à seulement 24 ans, lors d’un banal entraînement à Kayl/Tétange, sur un simple contrôle orienté effectué avec un temps d’avance (un temps de trop), l’un des grands espoirs du football national, qui était de la victoire en Biélorussie (0-1, le 13 octobre 2007), la première en match officiel depuis plus d’une décennie, mais aussi du miracle du Letzigrund contre la Suisse (1-2, le 10 septembre 2008), a dû en finir avec le football de haut niveau.

Il en souffre toujours, de ce genou. Il gonfle encore sans qu’on ne lui ait rien demandé. À l’époque pourtant, Luc Holtz, le nouveau sélectionneur, commençait pourtant à prendre des infos en vue d’un éventuel retour du milieu de terrain offensif en sélection. Tout s’est effondré pour un faux mouvement. «J’étais sur le point d’avoir de nouveau ma chance. Mais bon, c’était inévitable : j’ai appris en regardant d’anciennes radios que cette rotule n’a jamais été alignée. Un problème de naissance. Une faiblesse. C’est sans doute pour ça qu’en sélection, j’ai dû recevoir au moins 10 000 piqûres de la part du docteur Huberty! Ah, il aimait ça les seringues !»

Je ne risquais pas de me blesser avec la pétanque

Sans genou, «le train a passé». Lombardelli, 124 matches de DN accumulés, depuis l’âge de ses 17 ans, en grande majorité avec la Jeunesse Esch (pour un titre, en 2010), 27 sélections, retrouve ainsi par défaut un amour d’enfance qui ne l’a jamais quitté. Un cochonnet, des boules Obut et un parfum de liberté : «J’y joue depuis que je suis tout petit grâce à mon père, qui est aujourd’hui président du club de Schifflange. J’en ai beaucoup fait à la fin de ma carrière. En 2021, j’étais encore vice-champion du Luxembourg. Je participais à des tournois internationaux. J’ai même été sélectionné une fois, pour un match en Allemagne. Mais j’y jouais déjà alors que j’étais footballeur. Je ne risquais pas de me blesser avec la pétanque, et c’était ma bulle d’oxygène.»

Les bulles, Claudio a dû abandonner. Toutes les bulles. D’abord parce que la fédération a lancé une vaste opération pour «sortir la pétanque de l’image du pastis» en faisant la tournée des compétitions pour «pratiquer des tests d’alcoolémie» : «Ça ne fait pas sérieux pour l’image de ce sport. Comment voulez-vous recruter des jeunes dans ces conditions ?» Ensuite parce que s’il était encore classé élite en début de saison, allant jouer une à deux fois par mois malgré son statut d’adjoint de Jamath Shoffner («les mardis où il n’y avait pas d’entraînement»), désormais, avec sa nomination au poste d’entraîneur principal – qui a suivi le départ du technicien américain pour Ostende –, impossible de poursuivre. «Je pense tout le temps à l’équipe. Ce matin, je me demandais comment pimenter nos oppositions. Pour augmenter la concentration, je pensais dire à l’équipe perdante de payer une bouffe à tout le monde, ou de ranger le matos pendant une semaine…»

Il a le sang chaud, comme moi

C’est bizarre de le retrouver là, Claudio. Outre le fait qu’il est le seul joueur de sa génération d’internationaux à qui l’on ait confié une équipe de BGL Ligue («un hasard», accorde-t-il) sans avoir jamais été pro, il demeurait aussi sous le coup d’une rocambolesque petite histoire quand, en mars 2022, après une prise de bec avec Carlos Fangueiro et alors que lui est l’adjoint de Manuel Correia à Mondorf, le technicien dudelangeois de l’époque menace de le pousser hors du club.

C’est que Claudio s’occupe aussi des U11… du F91. Vingt-deux mois plus tard… il est à la place du coach portugais ! Et pas du tout revanchard. «Il a le sang chaud, comme moi, mais le plus important, ce n’est pas cette prise de bec qu’on a eue. C’est ce qui s’est passé après : on s’est serré la main et depuis, on a eu beaucoup de très bonnes discussions.»

L’une d’elles portait-elle sur la meilleure façon de rester performant et d’aller chercher l’Europe en mai prochain ? Lombardelli a du boulot, pour ça. Lui qui manquait tellement de temps, entre ses fonctions à la mairie d’Esch et trois enfants dont un beau-fils milieu de terrain offensif de 15 ans évoluant au F91, n’avait même pas encore eu le temps d’aller plus loin que son diplôme UEFA C. Cela lui a pourtant suffi pour reprendre les plus hautes fonctions de l’actuel 2e de BGL Ligue.

Va travailler ta confiance en toi, ta créativité !

«Mais mon club m’a inscrit pour le B, qui commence en mars.» Et nul doute qu’il y mettra une touche, ce côté «vieux Duché», foot d’antan, hérité de sa formation schifflangeoise, quand cet ancien gamin, fan absolu de Manuel Cardoni, arpentait autant les cours de récréation que les terrains, à jouer tout le temps avec la fameuse génération Pjanic, Kitenge, Kettenmeyer…

«Pendant les vacances, je suis passé devant un terrain de foot à cinq et je me suis fait la remarque qu’on n’y voit jamais d’enfants jouer. Moi, même quand j’étais en U13 au CFN avec Hellers, j’allais jouer en sortant de l’entraînement. Un coach, même bon, ne vous apprendra pas la technique de la rue. J’estime que jusqu’aux U17, voire jusqu’aux U19, il faut dire aux jeunes d’aller dehors s’amuser à faire des râteaux, des petits ponts ! Va travailler ta confiance en toi, ta créativité !» Voilà un conseil qui sort de l’ordinaire, dans le foot moderne qui ne jure que par une formation calibrée. Mais venant d’un homme qui, dès qu’il met un pied dans un boulodrome, préfère pointer que tirer, construire que détruire, on prend.

En bref

Né le 14 octobre 1987, Claudio Lombardelli a commencé le football à Schifflange avant d’être transféré à la Jeunesse Esch à 16 ans, où il restera six années et conquerra un titre de champion en 2010, avant de filer à Rumelange puis Kayl/Tétange. Sélectionné à 25 reprises sous Allan Simonsen puis Guy Hellers, il mène en parallèle une discrète carrière de joueur de pétanque, pratiquement dans les mêmes villes.

Retraité, père de deux filles et d’un beau-fils, il devient coach chez les jeunes de Dudelange, mais aussi à Noertzange et à Mondorf, où il occupe le poste d’adjoint de Manuel Correia, avant de devenir celui de Jamath Shoffner au F91, cet été. Cet employé depuis 18 ans à la commune d’Esch, affecté à l’hygiène et l’écologie, habite à Dudelange.

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