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La sexualité n’a pas d’âge


L'objectif de cette journée était la prise en compte de la sexualité dans les politiques de soins et d'accompagnement des personnes âgées. (photo: le Quotidien)

Pourquoi l’amour et la sexualité s’arrêteraient-ils en raison de l’âge?» Mercredi, à Walferdange, quelque 80 membres de Help, le réseau luxembourgeois d’aides et de soins, ont participé à une journée de réflexion intitulée «Amour et sexualité en vieillissant : entre préjugés, tabous et réalité».

Les intervenants citent tous l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui défend la notion de santé comme «un état de bien-être physique, émotionnel, mental et social en relation avec la sexualité, et non pas simplement l’absence de maladies, de dysfonctionnements ou d’infirmité. La santé sexuelle requiert une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles ainsi que la possibilité d’avoir des expériences sexuelles agréables et sûres sans contrainte, discrimination et violence».

Et cela même en étant un «jeune vieux» (de 65 à 75 ans), un «moyen vieux» (de 75 à 85 ans) ou «vieux vieux» (plus de 85 ans). «Selon une enquête menée par l’université de Manchester en 2015 sur 7 000 seniors, 54 % des hommes et 31 % de plus de 70 ans disent continuer à être sexuellement actifs, cite Catherine Gapenne, la directrice du service Aides et Soins de la Croix-Rouge luxembourgeoise.

Un tiers d’entre eux déclarent au moins deux relations sexuelles par mois. Et 31 % des hommes et 20 % des femmes déclarent échanger régulièrement des baisers et des caresses.»
C’est donc bien une réalité, la sexualité ne s’arrête pas avec le vieillissement. Mais elle change. «Nous constatons ces dernières années un pic de séparation chez les couples âgés de 60 ans.

Beaucoup avancent « une envie de s’éclater », note le Dr Laurent Le Saint, psychiatre-psychothérapeute et sexologue clinicien. Le défi de la vieillesse, c’est admettre l’évolution du corps qui se transforme. Il y a une nécessité de découvrir et d’apprendre ce corps qui est différent. La sexualité fait partie de cet apprentissage.»

«Être à l’écoute et parler de la sexualité»

Le praticien poursuit en soulignant que «dans l’imaginaire de la société, la ménopause chez la femme aux alentours de 50 ans et l’andropause chez l’homme aux alentours de 60 ans sonnent la fin de l’activité sexuelle, mais la réalité démontre le contraire». C’est simplement un cap à passer.

Le Dr Laurent Le Saint détaille les thérapies possibles pour (re)trouver une activité sexuelle avec certaines maladies. De manière plus générale, il explicite l’évolution des relations sexuelles avec l’âge. En effet, les quatre phases (excitation, plateau, orgasme et résolution) changent avec l’âge.

Chez l’homme, durant la phase d’excitation, l’érection demande plusieurs minutes pour apparaître, la phase de plateau peut durer plus longtemps que chez les jeunes et l’érection complète n’arrive que juste avant l’orgasme. La plupart des hommes âgés continuent à avoir des orgasmes, mais ils sont moins intenses.

Quant à la phase de résolution, elle est plus longue c’est-à-dire que le jeune doit attendre, en moyenne, entre 20 et 30 minutes, alors que pour l’homme plus âgé on peut passer à deux ou trois jours. Chez la femme, la phase d’excitation est également plus longue en raison de la diminution de la lubrification qui intervient en moyenne cinq ans après la fin des règles. Elle est toujours capable d’avoir des orgasmes multiples et la phase de résolution est plus courte chez la femme ménopausée.

«La sexualité chez les personnes âgées passe toujours par la séduction, indique le Dr Laurent Le Saint. Il y a par exemple beaucoup de galanterie. Et d’une intimité relationnelle peut découler une relation sexuelle. Mais avec le grand âge, le besoin d’un orgasme est moindre. En revanche, l’envie de tendresse est beaucoup plus présente. La sexualité s’adapte avec l’âge. Le personnel soignant doit écouter la personne âgée parler de sexualité et en tenir compte.»

C’est également le message lancé par Nathalie Dehard, infirmière sociale et sexologue : «De manière générale, le personnel soignant et les institutions doivent évoluer et prendre en compte la question de la sexualité.» «Parler de la sexualité aide les patients et le personnel soignant qui est plus serein, poursuit-elle. Il faut accompagner la personne, c’est-à-dire être à côté d’elle, ni devant ni derrière, et ne pas se mettre à sa place. La laisser libre de son chemin. Il n’y a pas de cours ni de réponses toutes faites. Chaque situation est particulière. L’idée est d’être à l’écoute et de parler de la sexualité.»

C’était l’objectif de la journée d’hier. Après une matinée de conférences, les 80 membres du personnel de Help présents ont pris part à des ateliers : «Quand la vie sexuelle du soigné fait irruption dans la relation de soins, quelle attitude adopter?», «Amour et sexualité chez la personne âgée, un tabou?» ou encore «Sexualité des seniors, normes et stéréotypes de la société : quelle place pour le senior et le professionnel de la santé?»

«Le but de cette journée est d’ouvrir la discussion sur cette thématique, de mieux comprendre ce qui relève du « normal » et du « pathologique », conclut Catherine Gapenne. Elle doit nous amener vers une démarche de réflexion commune pour améliorer nos politiques de soins et d’accompagnement. Il nous faudra aussi inclure cette thématique dans nos programmes de formation initiale et nos programmes de formation continue.»

Guillaume Chassaing

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