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Josy Gloden (Vinsmoselle) : «En ce moment, il ne faut pas se précipiter»


Vinsmoselle a beaucoup investi ces dernières années. Désormais, Josy Gloden ne veut pas précipiter les choses. (Photo : Erwan Nonet)

La série anniversaire des dix ans de la série «Vignes et Vignerons» se clôt ce week-end avec Josy Gloden, le président des Domaines Vinsmoselle, qui revient sur les défis que doit relever la coopérative.

Les dix dernières années

Le début du bio
«Nous produisons des cuvées bios depuis 2014. C’est un élargissement intéressant de notre gamme que nous développons petit à petit. Ceci dit, je ne pense pas que le bio intéresse tant les consommateurs que ça. Ce qu’ils veulent, avant tout, ce sont de bons vins. Tant mieux s’ils sont bios, mais je ne crois pas que ce soit l’essentiel pour eux. Le vin n’est sans doute pas le produit où être bio est le plus important. Après tout, c’est un produit pressé, fermenté… Les produits agricoles bruts qui sont bios me semblent avoir plus d’importance que le vin. Je n’ai rien contre le bio, évidemment, mais ce n’est pas une voie que nous allons suivre aveuglément. D’autant que la viticulture bio pose aussi les problèmes de l’utilisation du cuivre, qui est un métal lourd très polluant.»

Définir les gammes
«Nous produisons beaucoup de vins différents et nous avons voulu mieux identifier notre haut de gamme en créant la série Vignum, aussi bien pour les vins tranquilles que pour le crémant. Les étiquettes sont bien différentes et faciles à identifier. Ces bouteilles sont issues de raisins produits sur nos meilleures parcelles, dans des vignes que nos vignerons travaillent en respectant une charte de qualité stricte. Ces vins sont différents, encore supérieurs aux grands premiers crus avec indication du lieu-dit. Là, c’est le terroir qui s’exprime. Cette gamme est née parce que nous voulions prouver qu’en tant que coopérative, nous avions le savoir-faire nécessaire pour élaborer de grands vins.»

«Mais nous ne pouvons pas produire que des vins haut de gamme et nous avons réussi au-delà de nos espérances le pari de proposer une cuvée d’assemblage populaire avec le Summerwäin. Nous avons travaillé le marketing en interne, notamment avec cette belle bouteille sérigraphiée, et ça a été une très grande réussite. C’est un vin de saison qui a été très bien accepté par les clients. Voir un vin luxembourgeois plaire alors qu’il ne porte ni le nom d’un cépage, ni le nom d’un lieu-dit, c’est un enseignement très intéressant pour nous.»

Si nos vins sont trop chers, les clients se tourneront vers d’autres provenances

«Il ne faut pas pour autant abandonner le segment de l’entrée de gamme parce que beaucoup de clients ont une limite de prix par bouteille qui n’est pas extensible. On ne peut pas vendre que des bouteilles à 50 euros. Surtout en ce moment où le contexte géopolitique et économique est très incertain. Tous les prix montent et si nos vins sont trop chers, les clients se tourneront vers d’autres provenances. C’est un problème pour nous aussi parce que nous ne pouvons pas répercuter complètement la hausse des prix des matières premières et de l’énergie, le saut serait trop important.»

Les dix prochaines années

Le vieillissement des vignerons
«On nous répète souvent que l’âge moyen de nos vignerons augmente. C’est vrai, comme tout le monde, nous prenons un an de plus tous les douze mois! Mais la moyenne d’âge est élevée parce que nous avons aussi beaucoup de personnes qui continuent de travailler quelques parcelles après leur retraite, par passion, parce que c’est toute leur vie. Je vois aussi que les transitions peuvent très bien se passer. Pit Leonardy a pris la suite de son père, Aly, à Mertert, Marc Kohll succède à sa mère Claudine à Wormeldange… Et si jamais un vigneron s’arrête sans successeur, il y aura toujours quelqu’un pour reprendre ses vignes.»

«Nous le voyons bien et c’est un peu le même phénomène partout : il y a moins d’entreprises, mais elles sont plus grandes. C’est inéluctable parce qu’il faut investir de plus en plus d’argent pour produire, car les nouvelles machines coûtent très cher. Il faut donc une surface importante pour les rentabiliser. De toute façon, on ne peut pas forcer quelqu’un à être vigneron. Si on n’a pas la fibre, il vaut mieux ne pas se lancer. Et puis je vois aussi que nous ne sommes pas les seuls à connaître cette situation. Certains vignerons indépendants sont aussi dans ce cas-là.»

Jouer la carte du Luxembourg
«Trouver une place sur le marché international est un challenge. Nous ne pourrons pas nous battre sur l’entrée de gamme avec les vins français, italiens ou espagnols. Nos coûts de production sont bien plus élevés que les leurs et il est impossible de s’aligner sur les tarifs qu’ils pratiquent. S’imposer à l’étranger ne sera donc pas facile, mais la démographie dynamique du Luxembourg est une chance. Il y a dix ans, en 2012, le pays comptait 530 000 habitants et nous sommes 645 000 aujourd’hui. Cela fait beaucoup de clients potentiels en plus. Nous devons d’abord penser au Luxembourg, satisfaire les résidents doit être notre objectif principal.»

Rester prudent
«Nous venons d’investir 5 millions d’euros dans la cave de Wellenstein, nous avons maintenant là un très bel outil de production. Heureusement, tous les matériaux avaient été commandés avant la crise sanitaire. Si nous lancions le même chantier aujourd’hui, il serait un tiers plus cher. Bien sûr, nous avons beaucoup d’autres projets dans les tiroirs, mais, en ce moment, il ne faut pas se précipiter. Pas mal d’idées sont restées à l’état de réflexions depuis le covid et nous préférons reporter leur concrétisation. Je pense par exemple à l’espace touristique que l’on avait commencé à imaginer dans la cave de Wormeldange. Encore une fois, la situation internationale appelle à la prudence. Nous avons la responsabilité des 200 familles de coopérants, nous ne pouvons pas faire n’importe quoi.»

Bientôt un nouveau directeur?

L’ancien directeur Patrick Berg avait été débarqué à la fin du mois de juillet par le conseil d’administration des Domaines Vinsmoselle. Le président Josy Gloden avait alors expliqué qu’il n’y avait pas d’urgence à trouver son remplaçant et que la coopérative attendrait certainement la fin des vendanges avant de réellement lancer le processus de sélection des candidats.

La récolte étant terminée depuis deux semaines, on peut penser que les recherches sont déjà avancées. Josy Gloden, en tout cas, n’a rien voulu dévoiler, mais on jurerait que l’annonce ne devrait pas tarder très longtemps…

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