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Héritage dérobé : il refuse de parler lors de son procès en appel


Alessandro S., reconnu coupable d'avoir raflé l'héritage d'une mère en état de faiblesse, avait été condamné en première instance à 4 ans de prison dont 2 avec sursis. (Photo : archives lq/Alain Rischard)

Condamné pour avoir soustrait 427 575 euros à une mère en état de faiblesse, Alessandro S. comparaissait mercredi après-midi devant la Cour d’appel. Là, où d’habitude les prévenus en profitent pour défendre leur version des faits, voire clamer leur innocence, c’est tout le contraire qui s’est passé. Le prévenu a gardé le silence. La raison? Il n’aurait pas été inculpé…

«Je laisse la parole à mon conseil juridique.» On n’aura pas beaucoup entendu le prévenu Alessandro S. (38 ans), mercredi après-midi, à la barre de la Cour d’appel. Pour avoir raflé l’héritage d’une mère en état de faiblesse, le trentenaire avait été condamné en première instance à quatre ans de prison, dont deux avec sursis, et une amende de 2 500 euros. Placé sous le régime du sursis probatoire, il avait l’obligation de rembourser les 427 575 euros. En gros, il s’agissait de la somme dont la mère avait hérité après que son fils eut assassiné son autre fils fin 2014 à Esch… Des déclarations faites début 2017 dans le cadre du procès du fratricide, où Alessandro S. comparaissait pour recel de malfaiteur, avaient éveillé les soupçons du parquet.

Mais de tout cela, il n’aura pas été question à l’audience. D’emblée, Me Roby Schons a en effet pointé du doigt le fait qu’Alessandro S. n’a été inculpé ni pour abus de faiblesse ni pour escroquerie. Selon l’avocat, impossible donc de mener un procès à son encontre. Bref, la Cour d’appel serait incompétente. En l’absence d’un acte d’inculpation formel, tout en citant l’article 12 de la Constitution, il a demandé à la Cour d’appel de poser une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle. Et de lui lancer enfin : «Avant toute continuation des débats sur le fond de l’affaire, on veut une décision sur les incidents qu’on a soulevés devant vous.»

Une demande à laquelle la Cour d’appel n’a pas donné suite. Par la voix de sa présidente, elle a fait savoir que les incidents sont joints au fond (c’est-à-dire que la Cour se prononcera dans son arrêt) et que l’instruction pouvait donc se poursuivre. Mais ce n’était pas gagné d’avance.

Me Schons avait en effet déclaré qu’il n’avait pas mandat pour plaider l’affaire au fond. La brève entrevue avec son client à laquelle la présidente l’a contraint n’y aura rien changé. Mais pour la Cour d’appel, hors de question de ne pas continuer l’affaire : «Si vous décidez que vous n’avez plus d’avocat, c’est votre droit. Mais alors, vous vous défendez vous-même!»

Il déclare avoir épluché 500 verdicts européens

Jusqu’au bout, Alessandro S. campera sur ses positions. Celui qui déclare avoir depuis sa sortie de prison, il y a sept mois, passé des journées de 11 h à 12 h en bibliothèque et épluché 500 verdicts européens a gardé le silence. «Je ne parlerai pas du fond de l’affaire parce que je n’ai pas été inculpé ou bien parce que j’ai été inculpé illégalement», a-t-il dicté au greffier quand la présidente a décidé de faire acter qu’il renonçait à son avocat pour le fond de l’affaire.

Tout ce que le prévenu Alessandro S. ajoutera, c’est que les deux témoins (dont la mère) qu’il avait demandé de convoquer pour le procès n’ont pas été cités. «J’estime que la procédure n’est pas équitable à mon sens.»

L’avocat de la partie civile Me Marc Lentz a demandé la confirmation du premier jugement. Et la représentante du parquet général s’est opposée à ce que la mère soit entendue comme témoin. «Ses déclarations ont pu être corroborées par d’autres preuves dans le dossier», a-t-elle soulevé en parlant d’une femme «totalement détruite psychologiquement».

«Je ne suis pas inculpé Madame»

Pour le parquet général, il y a lieu de confirmer la peine prononcée en première instance. Sa représentante demande aussi la confirmation de la confiscation de l’appartement à Rollingen/Mersch. L’appartement pour l’achat duquel la mère lui aurait remis la somme de 180 000 euros à l’époque et dans lequel le prévenu a indiqué toujours vivre.

Son dernier mot à la barre était : «Je ne suis pas inculpé Madame. C’est la seule chose que je puisse dire.» Quand la présidente lui a fait comprendre qu’ils avaient entendu sa ligne de défense, il a précisé : «Ce n’est pas une ligne, mais un mur…»

Prononcé le 27 novembre.

Fabienne Armborst