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Frank Schleck : «Je n’aimerais pas être dans la peau de Pogacar !»


Frank Schleck, coordinateur sportif du cyclisme luxembourgeois, se trouve actuellement au Portugal.

Frank Schleck, vainqueur de l’étape mythique de l’Alpe d’Huez en 2006, débriefe l’étape d’hier et évoque celle du jour. Mais pas seulement…

Changement de décor. C’est depuis l’incandescence d’Anadia et le Portugal où se poursuivent les championnats d’Europe juniors et espoirs, mais sur piste cette fois à partir d’aujourd’hui et l’entrée en lice du prometteur Niels Michotte aligné en scratch, que Frank Schleck (42 ans) suivra la si mythique étape de l’Alpe d’Huez que lui-même avait remportée en 2006. Le coordinateur du cyclisme luxembourgeois est impatient de voir à l’œuvre le vainqueur de Paris-Roubaix juniors, qu’il estime «très, très fort sur piste également». Mais c’est bien sûr du Tour qu’il est surtout question…

Avez-vous regardé l’étape du jour arrivant au sommet du Granon?

Frank Schleck : Oui, évidemment. J’ai regardé les 50 derniers kilomètres. C’était déjà le mano à mano. C’était «master prize» aujourd’hui (lisez hier, NDLR). Du top niveau ! C’était une superbe course et une course tactique parfaite de la part de l’équipe Jumbo-Visma.

Une réussite comme ça, ça n’arrive qu’une fois dans la vie. Ça s’est super bien goupillé pour Jumbo. Ils ont tout mis sur une carte et ont utilisé toute l’équipe sans se poser de questions. Les trois années précédentes, cela ne s’était pas produit pour eux. C’était ça passe ou ça casse. Et c’est passé… Incroyable étape !

Regardez Wout Van Aert qui est devant, ils l’ont fait revenir dans le groupe maillot jaune. Ils l’ont fait encore attendre pour ramener (Primoz) Roglic. Et ce jeune Jonas Vingegaard est en jaune. (Tadej) Pogacar faisait bonne figure. On le voyait rigoler en bas du Granon, faire le guignol. À mon avis, c’était un coup de bluff. On a vu aussi (Rafal) Majka faire une belle étape, ils ont travaillé, mais ils ont payé la note.

Pensez-vous que Pogacar puisse se refaire?

(Il rit) Je pense qu’il est en situation très délicate. Ce jeudi, ce sera l’étape la plus importante de sa carrière. S’il fléchit, il ne pourra pas se refaire. Je ne crois pas. Ce sera donc très important de voir comment il réagit sur l’Alpe d’Huez.

On espère revoir une aussi belle étape qu’aujourd’hui (hier, NDLR), mais ce sera une tout autre tactique. Avec l’avance que possède Vingegaard, il peut voir venir. Je constate que Pogacar ne s’est pas fait des amis dans le peloton en première semaine. Il a deux coéquipiers en moins, donc franchement, je ne vois pas comment il pourrait faire.

Même du très, très grand Pogacar, je ne vois pas comment il pourrait faire. Nous sommes à la moitié du Tour, tout le monde est déjà bien fatigué. On ne se refait pas dans un Tour. Peut-être qu’on verra un grand Pogacar sur l’Alpe. Mais je n’y crois pas. Avec tout le stress, le monde, les médias, tout s’écroule pour lui. Et en plus, il n’a plus d’équipe… Je n’aimerais pas être dans sa peau!

Vous vous attendiez à un tel retournement?

Non. Non, je ne m’attendais pas à une étape aussi belle et à une si belle tactique de la part de Jumbo-Visma.

Les cinq premiers kilomètres sont étouffants. Le Tour se jouera là. Tu as la pente, la chaleur. Ça fait bam, bam…

Aujourd’hui, avec l’arrivée à l’Alpe d’Huez, là où vous vous étiez imposé en 2006, il faut s’attendre à quoi?

Dès le départ, en sortant de Briançon, il y a 36 kilomètres d’ascension. Ensuite, après le Lautaret, tu prends à droite pour reprendre huit kilomètres de Galibier. Ensuite, tu remontes la Croix-de-Fer, un truc infernal qui ne se termine pas. Comme la descente avec replat qui fait mal. En haut, tu n’as pas d’ombre. La chaleur va jouer un rôle. Après, tu descends. Et tu montes l’Alpe d’Huez.

Les cinq premiers kilomètres sont étouffants. Le Tour se jouera là. Tu as la pente, la chaleur. Ça fait bam, bam… Un 14 juillet, je verrais bien une échappée qui va se jouer l’étape. Le général se jouera derrière. Toux ceux qu’on a vus aujourd’hui (hier, NDLR) seront là, mais je ne vois pas comment on peut bousculer Jumbo-Visma…

Vu comme ils marchent, ils sont imprenables ! L’enchaînement se fait généralement vent dans le dos, je vois bien l’équipe maillot jaune mettre un gros tempo.

Qu’est-ce qui fait le plus mal dans l’Alpe d’Huez?

Ce sont les premiers kilomètres. Jusqu’à mon virage en fait (il rit). On rentre dans l’Alpe et on est étouffé par la chaleur, l’air ne circule pas du tout. Le goudron te repousse. Les pierres sur les murs qui bordent la route dans les premiers kilomètres renvoient la chaleur. C’est là où ça fait le plus mal. Ensuite, on peut reprendre un rythme en arrivant à l’église. Mais avant, ce sera l’enfer.

J’attends l’étape de l’Alpe pour avoir des flash-back. J’y tiens beaucoup à cette étape, ça marque une vie. J’y étais encore la semaine dernière.

On vous sent passionné…

Oui, j’attends l’étape de l’Alpe pour avoir des flash-back. J’y tiens beaucoup à cette étape, ça marque une vie. J’y étais encore la semaine dernière pour l’étape du Tour (cyclosportive de masse). Même si ça fait très mal, c’est toujours un plaisir d’aller y rouler.

Vous vous êtes arrêté dans votre virage?

Ah oui, oui, j’ai pris des photos. On s’est fait plaisir… Le virage 18, Frank Schleck – Hennie Kuiper, je m’y suis arrêté, hein (il rit).

Dimanche dernier, vous avez apprécié voir Bob Jungels signer un si joli succès d’étape?

Bien sûr que c’est bon de revoir le cyclisme luxembourgeois sur le devant de la scène mondiale. Cela faisait longtemps qu’on attendait ça. On voyait bien que Bob s’était refait une santé sur le Tour de Suisse. Je suis très content pour lui, car ce n’est pas un secret que beaucoup de gens doutaient de son retour. Pour la suite, je pense qu’il devrait encore se concentrer sur une étape.

C’est mon avis, je ne sais pas ce qu’il veut faire. Mais s’il se rapproche du top 10, le peloton ne le laissera pas faire. Il a les jambes pour en gagner une deuxième. Il peut très bien le faire dans cette étape de l’Alpe d’Huez, d’ailleurs. Je le verrais bien. S’il prend du champ dans l’échappée, j’aimerais bien voir qui sera capable de le lâcher.

D’ailleurs, si mon souvenir est bon, il était échappé sur l’Alpe en 2018 (effectivement, Bob Jungels avait terminé 13e de l’étape alors remportée par Geraint Thomas). Il peut être confiant.

Et que pensez-vous de Kevin Geniets?

Il fait tous les jours un très bon job pour David Gaudu. On le voit toujours travailler. Pour un premier Tour, il fait du super boulot. On peut être fier de lui. Il est un peu à l’image des jeunes Luxembourgeois qui marchent très fort. Il n’a que 25 ans.

Chez les plus jeunes, quand on voit le titre européen de Mathieu Kockelmann en juniors dans le chrono, la 15e place de Mil Morang dans la course en ligne, la neuvième place d’Arthur Kluckers chez les espoirs, leur belle course en ligne, il y a de quoi espérer. Franchement, on n’en a pas encore fini avec les jours qui viennent. Il faut jeter un coup d’œil sur Niels (Michotte)…

Photo : ap

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