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Esch : le Brésil, le foot et les souvenirs de la terre natale


À Esch-sur-Alzette, les Brésiliens de la boulangerie Good Tasty nous expliquent la passion du maillot Auriverde ! (Photo : HG).

La Seleçao joue son deuxième match de Coupe du monde ce vendredi à 14 heures. On imagine mal, depuis le Luxembourg, ce que représente le foot au Brésil… nous sommes allés à la rencontre des Brésiliens du café Good Tasty, à Esch-sur-Alzette. Et quel voyage !

Esch est un livre et peu importe la page que l’on ouvre, on tombe toujours sur une belle histoire à raconter. Ainsi de Jefferson, 26 ans, et de sa maman Geusa, derrière le comptoir de la boulangerie Good Tasty. Sur la glacière de l’entrée, il y a bien un drapeau auriverde. « Mais le foot, on n’y connait pas grand-chose », sourit Geusa, très fière de l’effet. Du coup, pour parfaire la rencontre, un ami est appelé en renfort : Stacke, les épaules carrées et le sourire d’acier, « s’y connait vraiment »…

Au café Good Tasty D'Esch-sur-Alzette, on nous a reçu avec sympathie ! Le Brésil, le foot, Esch et autant de belles histoires à raconter (Photo : HG).

Au café Good Tasty D’Esch-sur-Alzette, on nous a reçu avec sympathie ! De gauche à droite : Stacke, Geusa et Jefferson. Le Brésil, le foot, Esch et autant de belles histoires à raconter (Photo : HG).

Il n’y a pas que le foot qui nous intéresse, explique t-on : les parcours d’une vie aussi. Et ça commence par une anecdote « saudade ». Jefferson est arrivé à Esch, alors qu’il avait 20 ans à peine, pour «recommencer ma vie, glisse-t-il. J’étudiais l’ingénierie au Brésil, mon cursus démarrait bien. Puis j’ai perdu mon papa. Il fallait que je parte, j’avais envie d’être près de ma maman, qui était installée au Luxembourg. » Aujourd’hui, ils tiennent tous les deux le Good Tasty, rue de l’Alzette, où l’on peut déguster du sucré-salé dans une ambiance agréable… et les très bons cafés brésiliens, évidemment !

« Quand je dis que je n’y connais rien, j’ai joué cinq ans au foot… »

Le foot, Jefferson y a joué entre 8 ans et 13 ans dans sa commune de Goiânia, au centre du Brésil. « C’est un sport évident au pays. Même moi, quand je te dis que je n’y connais rien, j’y ai quand même joué cinq ans… » Oui le Brésil est bien le pays du football car « les habitants pensent souvent au foot, toujours même. » Et personne n’est exclue de cette fête permanente : ni les filles, ni les familles, « au contraire, rien ne rassemble autant que le football ». Jefferson nous décrit des jours de match où le temps s’étire, avec des préparations de barbecue qui peuvent durer pendant huit heures…et le foot, qui se mélange au parfum culinaire de l’atmosphère.

Rio de Janeiro et au loin, le mythique stade Maracanã : mais l'amour du foot commence avec le championnat national (Photo : AFP).

Rio de Janeiro et au loin, le mythique stade Maracanã : mais l’amour du foot commence avec le championnat national (Photo : AFP).

Avant même de parler Coupe du monde, il faut évoquer le championnat national. L’attache à un club est un sentiment très fort, qui détermine une mentalité et presque une façon d’être… On tente au hasard : « Flamengo ? » Stacke s’étouffe. « Oh non pas eux ! Grêmio vaut beaucoup mieux. » Il nous montre une photo du maillot sur son GSM. « C’est le club du sud du pays, et moi je viens de là-haut. Le Brésil est un pays vaste : tout le monde aime sa région d’origine ».

« Oui, confirme Jefferson. Il y a des accents, des façons de manger différentes, des origines différentes… Dans le sud, d’où vient Stacke, tu trouves par exemple beaucoup d’influences européennes.  D’ailleurs « Stacke » est un prénom d’origine allemande. »

Parfois le choix d’un club relève de l’instinct pur, et non d’un attachement régional. Un Brésilien de l’intérieur peut rêver d’aller vivre sur la côte, et se prend d’amour pour le club de Rio. Un autre supporte le club d’enfance de son papa. Ou tout simplement, un attaquant joue si bien ailleurs que c’est lui qu’on veut supporter !

Enfin, contrairement à ce que l’on peut imaginer, une place au stade représente un certain sacrifice financier pour un Brésilien moyen. « Ça peut être deux jours de travail ou plus, hésite Stacke. Mais on le vit comme une récompense. »

Le Brésil si varié dans un seul maillot

Le message est assez clair non ! (Photo : AFP)

Le message est assez clair non ! (Photo : AFP)

Revenons à la coupe du monde. « Le maillot auriverde représente un sentiment suprême », dit Stacke avec un sourire. Il n’y a pas là une forme de nationalisme buté, puisque le Brésil est par essence multiculturel. C’est justement ce Brésil si varié, si différent et si vaste que l’on célèbre dans un seul maillot. « Ce qui nous manque cette année, c’est de la volonté, analyse Stacke. Neymar, les gens l’aiment bien, mais moi je trouve qu’il passe son temps par terre. Coutinho est plus fiable… » Mais le rythme et l’envie ne sont pas encore à la hauteur, après le terne premier match contre la Suisse (1-1).

Aimer le maillot Auriverde, c'est célébrer les plus grands : Pelé reste le roi même pour les plus jeunes (Photo : AFP)

Aimer le maillot Auriverde, c’est célébrer les plus grands : « Pelé reste le roi » même pour les plus jeunes. (Photo : AFP)

Aimez le maillot « or », c’est surtout célébrer les plus grands artistes du pays : Romario, Ronaldo, Bebeto, Ronaldinho, Dunga, « même le gardien Taffarel ! », lance Jefferson comme ça lui vient. Et puis et puis… Pelé. « Ses exploits datent mais restent dans la mémoire collective ».   Trois fois champions du monde, six fois champions du Brésil et surtout, « l’âme » du football brésilien. « Aujourd’hui, notre football s’est adapté aux techniques mondiales, explique Jefferson. Les schémas complexes, les périmètres stricts… Normalement, notre marque de fabrique, c’est la détermination pure à marquer un but. » Ce que caractérisait bien le « roi » Pelé, indomptable la balle au pied.

La rancoeur n’est pas un mot brésilien

Ce vendredi après-midi, les Brésiliens vibreront contre le Costa Rica en deuxième match de poule. Il n’y a pas de petit match quand on rêve de soulever la coupe.

Quel adversaire serait à la hauteur d’une belle affiche, si le Brésil devait aller en finale ? « La Russie, le pays hôte », lâche Stacke avant de se raviser…  « ou l’Allemagne ». La cinglante défaite 7-1 à domicile lors de la Coupe du monde 2014 a laissé des traces. Jefferson se prend la tête entre les mains, il n’a même pas de mot pour en parler. Alors on lance : « Il y a de la rancœur ? » -« Non, la rancœur n’est pas un mot brésilien », souligne t-il, comme pour dire que le Brésil aime trop la vie pour perdre du temps avec un sentiment si négatif. Et puis, avec un sourire : « Mais si on tombe contre l’Allemagne, on va se « venger » quand même !»

Hubert Gamelon

Esch, c’est un peu le Brésil aussi !

Quand on l’interroge sur sa ville d’adoption, Jefferson est assez élogieux envers Esch-sur-Alzette : « J’ai eu du mal à m’adapter au Luxembourg les premières années. Le pays me manquait, ma famille restée là-haut aussi. Mais Esch, c’est une ville incroyable par rapport aux gens que tu croises tous les jours : des Français, des Allemands, des Africains, des Italiens… » Et des Brésiliens, une « minorité » montante. « Oui, j’ai parfois du mal à les distinguer avec les Portugais parce que les deux parlent aussi fort ! », blague Jefferson. Au Good Tasty, on peut croiser pas mal de Brésiliens, issus de différentes régions du pays. Une mosaïque culturelle dans la mosaïque…

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