Les européennes du 9 juin arrivent un an après les communales et huit mois après les législatives de 2023. Le scrutin s’annonce crucial pour l’avenir de l’UE. Au Luxembourg, six eurodéputés seront à élire.
La campagne électorale des élections européennes est officiellement lancée depuis lundi. Il reste cinq semaines aux 13 partis en lice au Luxembourg pour convaincre les électeurs. Les affiches fleurissent depuis samedi, provoquant une impression de déjà-vu. D’autant plus que le scrutin européen sera le deuxième rendez-vous politique majeur et la troisième élection en moins d’un an, si on ajoute à la liste le renouvellement, le 12 mars dernier, de la Chambre des salariés et des délégations du personnel dans les entreprises.
Une certaine lassitude des partis et des citoyens n’est certainement pas à nier. Un indice est le taux de participation assez limité des résidents non luxembourgeois appelés à voter aux élections européennes. Seuls 15,1 % des électeurs éligibles issus d’un pays de l’UE vont se présenter aux urnes, soit 30 605 citoyens. Au moins, le bilan est à la hausse par rapport aux 23 243 inscrits (11,7 %) pour le scrutin de 2019. Parmi les électeurs luxembourgeois, il reste à observer combien vont participer à l’élection des 6 eurodéputés que compte le Grand-Duché. En dépit de l’obligation de vote, à peine 84 % des électeurs inscrits avaient déposé, fin mai 2019, un bulletin dans l’urne.
L’Europe a des acquis à défendre
Les élections européennes de 2024 ont lieu dans un contexte particulier, avec un Vieux Continent confronté à une guerre qui fait rage à ses portes, l’obligation de réussir la double transition digitale et énergétique ou encore la mise en œuvre d’un très contesté pacte migratoire. Le tout à la sortie d’une pandémie qui a marqué une très large partie de la législature européenne qui est sur le point de s’achever.
Le phénomène des polycrises semble profiter en premier lieu aux partis extrémistes, ce qui inquiète fortement les eurodéputés luxembourgeois sortants. Dès le mois de janvier, ils s’étaient dits déterminés à rappeler les enjeux du scrutin. Les acquis de l’Europe doivent servir de piqûre de rappel pour voter en son âme et conscience. «On a tendance à l’oublier, mais la liberté de circulation transfrontalière, le choix d’aller suivre ses études à l’étranger ou d’aller travailler dans un autre pays européen sont tous des acquis qui facilitent notre quotidien», relate Isabel Wiseler-Lima (CSV). La liste énumérée est longue : l’espace Schengen, l’euro, la protection des consommateurs (récemment, le chargeur unique) ou encore l’Europe sociale. «Pour poursuivre sur cette lancée, il nous faut éviter que des partis antieuropéens viennent freiner le projet. J’espère, donc, que nous allons réussir à mobiliser tous ensemble les citoyens au-delà des frontières des partis», martèle Tilly Metz (déi gréng).
Le discours est semblable auprès de Marc Angel (LSAP), un des vice-présidents du Parlement européen sortant, de Charles Goerens (DP), le doyen des eurodéputés luxembourgeois, ainsi que de Martine Kemp (CSV), venue suppléer en octobre dernier Christophe Hansen et Monica Semedo, qui siège comme indépendante depuis son clash, en 2021, avec le DP.
Quel score pour la coalition CSV-DP?
Le scrutin du 9 juin comporte plusieurs enjeux et le premier concerne l’ADR. Le parti réformateur, qui a le vent en poupe après avoir doublé déi gréng aux législatives, va-t-il pouvoir conquérir le seul siège de son «ennemi juré» et ainsi gagner son tout premier mandat européen? Le deuxième duel se joue entre les deux partenaires de coalition, CSV et DP. De retour au gouvernement, les chrétiens-sociaux vont tout faire pour revenir à trois sièges, après avoir dû en céder un en 2019 aux libéraux.
Enfin, le gouvernement va pouvoir tester sa popularité lors de ces élections. En 2014, le trio DP-LSAP-déi gréng avait été puni par les électeurs. Cinq ans plus tard, la coalition tricolore avait signé un bien meilleur score, avec un DP qui avait volé la vedette au CSV.
Au total, 78 candidats vont tenter de décrocher l’un des six sièges attribués au Luxembourg dans un hémicycle qui comptera 720 députés pour la législature 2024-2029.
Le match à distance Schmit-Hansen, l’autre enjeu de ce scrutin européen
Le gouvernement CSV-DP, issu des élections législatives, s’est accordé pour proposer le député Christophe Hansen (CSV) comme prochain commissaire européen du Luxembourg. Avec la nomination de Nicolas Schmit comme tête de liste des socialistes européens (PSE) pour le scrutin à venir, les cartes pourraient être rebattues. Le commissaire européen sortant vise en premier lieu la présidence de la Commission, sous condition que sa famille politique perce aux élections de début juin. Mais même si le PSE sortait comme deuxième famille politique des urnes, Nicolas Schmit pourrait postuler pour un second mandat de commissaire, peut-être en tant que vice-président.
Ursula von der Leyen, la présidente sortante de la Commission, issue des rangs du Parti populaire européen (PPE), est d’ores et déjà pressentie pour rempiler à la tête de l’exécutif bruxellois. Aura-t-elle besoin de Nicolas Schmit pour s’appuyer sur une majorité stable au Parlement européen? Ou est-ce que le poste de commissaire luxembourgeois sera occupé, comme prévu, par Christophe Hansen? Un casse-tête s’annonce pour le Premier ministre, Luc Frieden (CSV).