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[Cyclisme] Bob Jungels sur le Tour de France : «J’ai envie de regagner des courses»


«Si on arrive à faire un top 5 ou un podium, ce serait bien», explique Bob Jungels. (Photos : anouk flech)

Le Luxembourgeois de l’équipe Bora-Hansgrohe dresse un point complet sur le Tour de France, où il poursuit son rôle d’équipier pour Jai Hindley. Il aimerait viser une étape si une occasion se présente, mais n’en fait pas une obsession. Il évoque le niveau exceptionnellement élevé de cette édition et parle de la suite de saison.

Le chalet Hôtel Alpen Valley de Combloux, où l’équipe Bora-Hansgrohe est logée ces derniers jours, offre une vue imprenable sur le mont Blanc. Le lieu idéal pour passer une journée de repos dans un Tour de France surchauffé. Hier, Bob Jungels s’est contenté d’une bonne séance sur rouleaux. Le chrono du jour ne le concernant pas directement, il en profitera pour continuer à récupérer d’une lourde fatigue. Hier en début d’après-midi, il a fait le point pendant une vingtaine de minutes. Il nous fait part de ses sensations sur ce Tour difficile, de ses aspirations pour la dernière semaine comme la fin de saison où il zappera les Mondiaux pour préparer les courses d’un jour et le Tour de Luxembourg.

Comment vous sentez-vous avant d’attaquer la troisième semaine du Tour ?

Bob Jungels : Je suis très fatigué. Les deux premières semaines étaient très dures et les deux derniers jours, c’était un peu la folie. Les jambes sont de mieux en mieux mais aujourd’hui, je me sens bien cramé quand même.

Que retenez-vous de vos deux premières semaines et notamment votre travail auprès de l’Australien Jai Hindley ?

En gros, c’est depuis le début de la saison que c’est spécial pour moi, avec beaucoup de maladie. Beaucoup de changements de programme. Ce n’était pas planifié que je m’aligne sur le Giro, puis d’enchaîner Giro et Tour. Ce qui est toujours dur. Pour le moment ça va, mais en début de Tour, c’était difficile. Surtout les deux premières étapes au Pays basque. Il m’a manqué un peu. Ces derniers jours, je me sens mieux et j’ai pu aider Jai (Hindley) le mieux possible. Mais honnêtement, il s’agit d’une édition très dure. Et même pour gagner une étape, c’est délicat. Pour le moment, on a vu que seulement trois ou quatre échappées sont allées au bout. Pour le reste, on va voir comment la dernière semaine va se passer.

Votre fatigue vient-elle de l’enchaînement Giro-Tour ?

Oui, bien sûr, deux grands Tours, c’est toujours difficile, même si j’ai bien récupéré du Giro. Dans la course, je me suis senti vraiment bien. C’est le deuxième jour de repos, les nerfs sont quand même un peu à plat.

Avant de prendre le départ du Giro, il vous a fallu récupérer de la maladie, une infection pulmonnaire…

Oui, je suis tombé malade après Paris-Nice et pendant le Giro, je suis tombé bien malade également (il a souffert de troubles gastriques). Au niveau santé, c’était difficile pour moi. Je n’avais pas connu ça avant. Je n’avais toujours pas de chance avec mon système immunitaire, mais depuis le covid, c’est devenu un peu plus compliqué.

Vous disiez vous sentir mieux en cette fin de Tour. Voyez-vous une éclaircie possible pour cette dernière semaine ?

Je pense que c’est assez clair qu’on a toujours avec Jai de faire le meilleur classement général possible. Après sa chute voici deux jours, il a un problème avec le sacrum. C’est ça qui est embêtant pour nous, car il était vraiment bien. Ces deux dernières étapes, il a beaucoup souffert. Là, on espère que ça va revenir. Dimanche, on a vu que mon rôle était de rester avec lui. C’était sans doute l’étape la plus intéressante pour moi. C’est comme ça. Si on arrive à faire un top 5 ou un podium, ce serait bien.

«ll faut progresser et voir comment on peut progresser.»

Sur ce nouveau rôle, vous découvrez un nouveau pan de votre métier ?

Oui, c’est nouveau et c’est la seule chose raisonnable à faire pour cette année car je ne suis préparé à 100 %. C’est la seule chose qui a un peu de sens pour aider l’équipe et même pour moi, c’est important de montrer ce qu’on peut offrir. Mais je dois dire que je ne suis pas encore prêt pour prendre ce rôle pour le reste de ma carrière (il rit).

Ce Tour de France est écrasé par un duel de deux super coureurs. Comment vivez-vous les choses à l’intérieur du peloton ?

Je vis ça comme si nous étions des passagers dans une course de deux équipes qui sont en guerre, une guerre de force. Un jour, c’est UAE, un autre jour, c’est Jumbo qui fait la course, à mon avis, presque n’importe quoi par moments. Pour les autres, c’est très, très dur. On est là, sans pouvoir faire grand-chose. On souffre vraiment beaucoup. C’est assez spécial. Et là, je pense encore que nous sommes dans une situation privilégiée, car Jai est encore un des meilleurs du reste. On est quand même bien. Pour seulement suivre, il faut un sacré niveau ici.

Moi, je bats des records de mes valeurs pour finir vingtième et exploser dans l’avant-dernier col

Un niveau qui n’a jamais été vu dans l’histoire récente du Tour de France…

Ça augmente chaque année. Si on regarde les records du Tourmalet, de Joux Plane, on le voit. Bien sûr, il y a le matériel, les technologies d’entraînement. Le niveau est incroyable. Le jour de Joux Plane, les Jumbo ont contrôlé tout, l’échappée, toute l’étape. Moi, je bats des records de mes valeurs pour finir vingtième et exploser dans l’avant-dernier col.

C’est une tendance qui va durer ?

Il y a un grand changement dans le cyclisme par rapport à la mentalité. La préparation pour les grands Tours change beaucoup. On passe plus de temps en altitude, on fait attention aux derniers pourcentages. C’est la seule chose où je vois comment c’est vraiment possible de s’améliorer. Mais voilà, des fois, c’est difficile de juger si on n’est pas à 100 %, on a un regard différent. L’année passée, lorsque je remporte mon étape (la 9e étape à Châtel), tout le monde disait que c’était incroyable. Mais c’est vrai que les deux équipes sont très, très fortes.

Cela donne des pistes pour les autres équipes pour voir comment progresser ?

C’est sûr qu’on doit faire quelque chose. Mais comme j’ai dit, on a porté le maillot jaune, Jai a remporté une étape. Il a gagné le Giro l’an passé. On est là, on n’est pas très loin. Mais il faut progresser et voir comment on peut progresser. Pour les équipes, c’est aussi une question de budget de pouvoir améliorer l’aide individuelle en termes d’entraînement et de programme.

On évoque également beaucoup l’alimentation qui serait pesée au gramme près en fonction de chacun. Vous êtes déjà un coureur pointu dans ce domaine ?

Personnellement, à la maison, je ne le fais pas car je sais ce que je dois manger. Mais si on a besoin de perdre du poids, c’est important. Ici sur le Tour, nous avons tous des plats individualisés, mesurés.

Pour être bien dans un classement général d’un grand Tour, il faudrait que je commence maintenant à perdre cinq kilos, ce qui est impossible

C’est pénible à vivre ?

Pour les quatre semaines ici sur le Tour, ça va. Après, pour moi, ce serait impossible de faire ça toute l’année. Des coureurs y arrivent. Moi, à l’âge de 30 ans, c’est un peu trop difficile.

Cela n’empêche pas certains coureurs de performer encore sans adopter ces nouveaux modes d’alimentation…

C’est sûr, il y a une grande différence entre faire un classement général et être bien sur une ou deux étapes pour jouer la gagne. Par exemple, pour être bien dans un classement général d’un grand Tour, il faudrait que je commence maintenant à perdre cinq kilos, ce qui est impossible.

Vous avez un pronostic pour la victoire finale ?

C’est difficile à dire, il y a quelques jours de ça, j’aurais dit (Tadej) Pogacar. Là, on a vu que (Jonas) Vinegegaard est revenu un peu. Je pense que ça va être une belle bataille. Après le chrono, on en saura plus. Et il reste deux étapes, mercredi, à Courchevel et samedi au Markstein, ce sera encore beaucoup de spectacle pour vous (il rit). Pour nous, ça va être dur. Bon, je dirais Vingegaard.

Le chrono de ce mardi, vous l’aborderez comment ?

Je le vois un peu comme une deuxième journée de repos, j’essaierai de faire un bon entraînement, un bon chrono mais sans me donner à 100 %. Je pense que mercredi, ce sera assez dur.

Vous êtes dans votre équipe Bora depuis six mois. Il existe une phrase dans l’équipe sur ce Tour, « Be like Bob » (« Sois comme Bob« ), vous pouvez expliquer…

(Gêné) Honnêtement, je ne suis pas la bonne personne pour répondre à cette question, mais c’est vrai, c’est une phase dans l’équipe, mais il faut demander aux autres. C’est une histoire de caractère.

Cela veut dire que vous donnez l’exemple ?

Je l’espère (il sourit).

Pour ces prochains jours, pensez-vous avoir les jambes pour remporter une étape ?

Cela dépend de la situation. Comme dimanche, je pense qu’il y avait une possibilité.

Vous pensez que vous disposerez de libertés pendant la dernière semaine ?

On va voir, tout dépend de la situation de Jai. Pour lui, c’est important d’avoir quelqu’un à ses côtés et pas seulement Emanuel Buchmann qui est aussi tombé dimanche. Le jeu de l’équipe reste plus important que la carte individuelle. On va voir comment ça va se passer.

Après le Tour, j’espère vraiment un résultat, que ce soit au Canada, au Luxembourg ou sur les classiques italiennes

L’objectif pour Jai Hindley reste la troisième place à Paris ?

C’est ce qui est réaliste. On espère qu’il aille mieux après ce jour de repos.

Ralph Denk, le manager de votre équipe, avait expliqué qu’il s’agissait d’un Tour de France réussi avec le maillot jaune, et la victoire d’étape. Vous pensez la même chose ?

Oui, bien sûr, le but était de gagner une étape. Mais le grand but de l’équipe était de finir sur le podium. On verra ça dimanche comment ça va se passer. Jusqu’à Paris, mon travail n’est pas fini. On verra si c’est réussi ou pas.

«Pour seulement suivre, il faut un sacré niveau ici.»

Pour finir, quel sera votre programme de course en fin de saison ?

Normalement, je vais enchaîner avec la Clásica San Sebastian (le samedi 29 juillet) et le Circuit de Getxo (le dimanche 30 juillet). Après, je n’ai rien pendant le mois d’août.

Pas de championnat du monde ?

Non, je ne vais pas le courir.

Et la suite ?

Ce sera Plouay avec le Bretagne Classic (3 septembre), le Grand Prix de Québec (8 septembre), le Grand Prix de Montréal (10 septembre) et le Tour de Luxembourg (20-24 septembre), et les classiques de fin de saison dont le Tour de Lombardie (7 octobre). Il me reste théoriquement onze jours de course. Après une petite coupure, ça va aller. J’espère faire un résultat. En fin de saison, c’est le mental qui est important et honnêtement, j’ai envie de regagner des courses. Ce n’était pas très chouette cette année d’être là pour être là. Donc après le Tour, j’espère vraiment un résultat, que ce soit au Canada, au Luxembourg ou sur les classiques italiennes.

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