Le prévenu et son cousin n’ont pas accordé leurs violons. Le témoin apporte de la confusion à la confusion entretenue depuis des coups de feu tirés devant la discothèque Lenox Club.
Un vigile avait réclamé 10 millions d’euros de dommages et intérêt à la défense – «la vie n’a pas de valeur» – qui l’avait accusé de faux témoignage en juin dernier. «Il n’avait bu ni alcool ni pris de MDMA ce soir-là», a souligné son avocat.
Contrairement au prévenu. La reconstitution des faits tels qu’ils se sont déroulés le 22 août 2021 paraît de l’ordre de l’impossible, les différents protagonistes ne semblant pas réellement prêts à se mouiller.
«Quand les témoignages dans ce dossier ne sont pas des mensonges, ils sont incomplets», avait commenté la présidente de la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg.
Ramiro est accusé de triple tentative de meurtre contre le vigile, un inconnu et un jeune homme blessé par balle à la cuisse. Le témoignage du cousin du prévenu entendu hier matin a rajouté à la confusion semée par d’autres avant lui.
En juin dernier, Ramiro, 29 ans, avait assuré avoir tiré au sol devant le Lenox Club à Luxembourg à 3 h 30 avec un pistolet de calibre 32 remis par un inconnu, pour se défendre. L’enquête de police et certains témoignages plus ou moins crédibles et concordants démontrent le contraire et appuient la thèse du règlement de comptes.
Le prévenu a eu maille à partir avec un jeune homme décrit comme étant parisien qui l’attendait avec un couteau. Le vigile a affirmé s’être trouvé entre le tireur et sa cible. Ramiro l’aurait mis en joue après avoir tiré en direction d’un groupe auquel appartenait la victime présumée. L’arme se serait enrayée et le vigile a prétendu avoir échappé de justesse à la mort.
Expulsé de l’établissement par les videurs plus tôt dans la soirée, Ramiro avait décidé d’y retourner vers 3 h. Son cousin a affirmé qu’ils étaient allés récupérer la veste qu’il avait oubliée à l’intérieur. Les détails de la soirée, il les aurait oubliés. «Votre témoignage ne colle pas du tout», a relevé la présidente.
Le jeune homme semble adapter ses réponses pour se tirer d’affaire, lui et le prévenu. «Votre cousin paraît essentiel dans votre vie, mais vous prenez la fuite après le coup de feu sans vous soucier de lui. Cela a un sens quand on sait que c’est son cousin qui a tiré les coups de feu», a résumé la juge incrédule. «Je vous informe que vous risquez jusqu’à cinq ans de réclusion pour faux témoignage en chambre criminelle.»
Refroidi, le témoin n’ose plus rien dire. Après les faits, il est rentré à Londres, où il vivait à l’époque, et n’aurait plus reparlé des faits à personne. Son cousin lui aurait juste dit qu’il allait bien. C’est tout. Et lui n’aurait pas cherché à en savoir davantage.
«J’ai su que mon cousin a été arrêté six à neuf mois plus tard.» «Cela ne vous a pas intéressé, vous n’avez pas voulu savoir si c’était en relation avec les coups de feu?», a demandé la juge. «Si. Mais je n’ai pas posé de questions, j’ai fait ma vie. Je savais qu’il allait bien», lui a répondu le jeune homme.
«C’est de sa faute si j’ai tiré»
Interrogé à son tour hier, Ramiro s’est accroché à l’histoire du blouson oublié. Il n’aurait, dit-il, pas voulu accompagner son cousin jusqu’à la boîte de nuit pour le récupérer, parce qu’il aurait été menacé de mort par quatre hommes plus tôt dans la soirée. Il reconnaît avoir tiré.
Le coup serait parti tout seul en réarmant l’arme après qu’elle s’est enrayée. «La victime m’a dit que ce n’était pas grave», ajoute le prévenu. «Nous venons, du moins en partie, d’entendre encore une autre version des faits», commente la présidente, qui commence à perdre le nord entre les allers-retours autour de la rue du Fort-Neipperg, les témoignages divergents et les zones d’ombre.
Son cousin raconte «des salades», selon le prévenu, qui ne lui aurait jamais demandé de témoigner en sa faveur. «Il était bourré et avait consommé de la drogue.»
«Pourquoi y être retourné quand même et avoir accepté une arme dont vous ne saviez rien de la part d’un inconnu?», l’a questionné la juge, qui a du mal à croire à son «histoire» et continue de privilégier la thèse du règlement de comptes qui a mal tourné. «Une de vos nombreuses conquêtes a déclaré à la police que vous possédiez une arme.»
L’étau se resserre autour de Ramiro, qui continue de prétendre que si son cousin n’avait pas insisté pour récupérer son blouson, rien ne se serait produit. «C’est de sa faute si j’ai tiré.» Il a du mal à se dépêtrer des incohérences de son propre récit et en rajoute.
La présidente dégaine la déclaration de la jeune femme à la police selon laquelle Ramiro lui aurait confié quelques jours après les faits «être retourné au Lenox Club pour se venger de ce qui s’y était passé plus tôt» et qu’il savait qu’il était recherché par la police. «Elle était jalouse parce que j’étais avec une autre femme», a répondu Ramiro. Le fin mot de l’histoire ne viendra pas de lui.