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«C’est l’enfer» : les mots d’un militaire ukrainien face aux acteurs luxembourgeois


Vitalii Barabash (à d. de l’écran), a livré un témoignage glaçant depuis le front ukrainien. (Photo : sophie wiessler)

L’association LUkraine organisait ce jeudi après-midi au Cercle Cité une table ronde pour faire le point sur l’invasion russe en territoire ukrainien. Vitalii Barabash, militaire dans le Donbass, a livré son témoignage.

C’est un homme fatigué, aux cernes apparentes et à la barbe prononcée, qui s’est exprimé ce jeudi après-midi par visioconférence au Cercle Cité à Luxembourg, lors d’une table ronde organisée par l’association locale LUkraine.

Vitalii Barabash est chef de l’administration militaire de la ville d’Avdiivka, dans l’est de l’Ukraine, au nord de Donetsk. Il «observe la guerre» depuis huit ans maintenant et tente du mieux qu’il peut de «protéger son pays» face à l’invasion de la Russie. Mais ces 36 jours d’invasion ont été particulièrement éprouvants.

«Je n’ai pas les mots pour vous expliquer, mais là, c’est l’enfer», glisse-t-il face caméra, devant une salle quelque peu émue par son discours. Il faut dire que dans sa commune de plus de 32 000 habitants, les jours se suivent et se ressemblent, malheureusement : pas d’eau depuis 45 jours, pas d’électricité depuis un mois, la situation est tendue, avec des bombardements russes quasi quotidiens. «Nous subissons des heures entières de bombardements, de 8 h du matin à 14 h, sans interruption. Plus de 500 maisons ont été détruites dans ma ville, des supermarchés aussi», relate le militaire, qui s’exprime en ukrainien, traduit à distance au Luxembourg.

Aucune pharmacie ou commerce n’est désormais accessible. Vitalii tente, avec les militaires ukrainiens présents à Adviivka, d’apporter de l’eau potable aux habitants, de les aider autant que possible, mais sans accès à internet ou à un simple réseau mobile, difficile de maintenir la communication.

«Nous avons encore besoin de vous»

«C’est l’un de nos plus gros problèmes actuellement : les civils ne peuvent pas communiquer avec la police ou les secours. Nos réseaux électriques sont bombardés tous les trois jours, nous n’avons même pas le temps de les réparer qu’ils sont à nouveau pris pour cible», se désole le chef militaire, qui mentionne également l’usage de bombes au phosphore sur des bâtiments civils. Des explosifs qui ont la particularité de créer des incendies difficiles à éteindre, et qui peuvent perdurer quelque temps. «Nos pompiers s’affairent depuis plusieurs jours pour tenter de contenir ces flammes, mais c’est compliqué.»

S’il «remercie sincèrement» le Luxembourg pour son aide de ces dernières semaines, Vitalii explique toutefois qu’il faut poursuivre cette mobilisation : «Nous avons encore besoin d’aide humanitaire, de nourriture à longue conservation, d’aide militaire aussi, notamment des moyens de communication fiables», liste-t-il devant l’assemblée luxembourgeoise.

Un point que n’a cessé d’appuyer l’association LUkraine au cours de cette table ronde qui aura duré plus de deux heures trente. «Nous avons besoin de vous plus que jamais. Nous survivons grâce à l’aide internationale, il ne faut pas nous laisser maintenant», souligne à plusieurs reprises le président de l’association, Nicolas Zharov, appuyé par les nombreux interlocuteurs présents, membres de l’International Assistance Headquarters for Ukrainians (IAHU) qui œuvre pour le soutien logistique du peuple ukrainien.

Médicaments, kits de premiers secours, insuline, nourriture… L’association a ainsi listé les besoins les plus urgents, notamment pour les régions les plus touchées actuellement en Ukraine, qui sont prioritaires. Depuis le début de l’invasion russe, le 24 février dernier, plus de 4 000 cargos ont été acheminés en Ukraine pour aider la population locale.

Claude Radoux : «Je suis impressionné par cette mobilisation»

Le consul honoraire d’Ukraine, Claude Radoux, était présent à cette table ronde et a listé les défis à venir pour le Luxembourg face à l’afflux de réfugiés ukrainiens. Actuellement, plus de 4 000 d’entre eux se trouveraient sur le sol luxembourgeois.

«Je suis impressionné par l’énorme mobilisation que l’on rencontre au Luxembourg. J’ai eu un nombre incroyable d’appels de personnes qui veulent faire des dons, partager leurs maisons. Il faut continuer à intégrer l’offre des privés avec celles des communes et de l’État, les favoriser, leur donner un cadre légal. Nous n’y arriverons pas tout seul.»

Pour lui, aucun doute qu’il faut envoyer davantage d’aide militaire à l’Ukraine, pour faire face à l’ogre russe. «Je pense aussi qu’il faut encore renforcer les sanctions économiques et penser à la suite, à l’après-guerre : envisager déjà la reconstruction et l’intégration économique de l’Ukraine au sein de l’Union européenne.»

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