La ministre de la Santé, Lydia Mutsch, lancera un «dispositif pilote» d’une durée de deux ans, visant à autoriser, de manière exceptionnelle et limitée, l’usage de cannabis à des fins médicales.
Cette phase test, qui pourra débuter dès l’approbation d’un cadre juridique par le Conseil de gouvernement, présentera un coût total estimé à environ 750 000 euros, en supposant que 80 à 100 patients profiteront d’un tel traitement thérapeutique au Grand-Duché et dans l’hypothèse d’un taux de remboursement de 100 %. Ce qui est loin d’être acté…
Effet de mimétisme à l’égard de plus en plus de pays européens et hors UE ou reconnaissance progressive des bienfaits du cannabis médical pour soulager certaines maladies graves ou rares?
Le pas franchi par le gouvernement en vue d’autoriser le cannabis médical sous des conditions strictes est certainement dû à des causes imbriquées les unes dans les autres. La ministre de la Santé, Lydia Mutsch, a d’emblée tenu à expliciter la vision gouvernementale en la matière, qui s’articule autour de quatre piliers. Il s’agira, en premier lieu, de s’attacher à respecter certaines conditions portant sur les prescriptions : «Seule une population de patients méticuleusement ciblée, car atteints d’un cancer ou d’une sclérose en plaques, par exemple, pourra se voir délivrer une ordonnance médicale. Dans ce sens, le caractère exceptionnel et l’usage limité seront la règle. Il s’agira, parallèlement, de contrer toute tentative d’abus.»
Du cannabis de qualité remboursé par la CNS?
Et la ministre de la Santé s’est voulue catégorique sur ce point : «Le cannabis médical pourra être prescrit dans des cas où le patient se trouve en phase terminale et que les médicaments classiques ne font plus d’effet. Ceci dit, le cannabis n’est certainement pas un remède miracle. Il ne servira qu’à soulager les douleurs chroniques et ne constituera qu’une option complémentaire.» Les maladies et symptômes de type dépression, manque d’appétit ou vomissements, ne seront donc, a priori, pas concernés.
Le deuxième pilier, lui, a pour vocation de définir à qui incombera la prescription du cannabis médical. «Seuls certains médecins spécialistes seront habilités, tels que les oncologues ou les neurologues, par exemple», a indiqué la ministre. Les généralistes seront donc exclus du processus.
Si le troisième pilier s’articulera sur les exigences formelles relatives aux prescriptions médicales, un quatrième et dernier pilier devra faire toute la lumière sur le remboursement, ou pas, du cannabis médical par la Caisse nationale de santé (CNS), en sachant que le gouvernement entend privilégier «du cannabis de qualité», qui a forcément «un coût élevé.» «Je consulterai prochainement le ministre de la Sécurité sociale, Romain Schneider, pour en discuter», a fait savoir Lydia Mutsch. En attendant, une phase pilote de deux ans sera lancée et elle a été estimée à 750 000 euros, intégralement à la charge de l’État.
Claude Damiani
La question de l’approvisionnement est sur toutes les lèvres.
Les circuits d’approvisionnement du cannabis médical vers, selon les termes de la ministre de la Santé, «des milieux sécurisés», c’est-à-dire «les hôpitaux et pharmacies hospitalières du pays», n’induira pas de culture de cannabis médical au Grand-Duché.
Importations depuis les Pays-Bas et le Canada
«Dans l’intérêt du patient, nous estimons qu’il faut pouvoir prescrire un produit fabriqué selon des règles très strictes et rigoureusement contrôlé avant d’être certifié en laboratoire. En effet, il faudra que le produit soit standardisé et reproductible au niveau de sa qualité et de son dosage, afin d’éviter tout effet secondaire hypothétique», a informé Lydia Mutsch, en invoquant un enjeu de santé publique face à du cannabis qui contiendrait des solvants, microbes, voire pesticides.
Ainsi, s’il est d’ores et déjà exclu de cultiver le cannabis dans des fermes ou serres d’État, «parce que le Luxembourg ne dispose pas d’agence nationale pour superviser d’éventuelles plantations étatiques», explique la ministre, «il sera certainement question d’importer des produits depuis les Pays-Bas ou le Canada», a-t-elle encore déclaré. Quant à sa forme d’administration aux patients, elle reste encore à déterminer.