Comme à Mersch, la pelouse du promu est indigne de la DN. Et ça grogne même chez les adversaires.
On était seulement à la mi-temps de Schifflange – Wiltz (1-1) quand le directeur sportif nordiste, Robert Janssen, à rencontré en tribunes son homologue, Sophie Lamorté, et lui a dit, tout à trac : «Votre plus grand adversaire, ce n’est pas nous, c’est votre terrain! Pourquoi est-ce que tu t’embêtes encore à pendre de bons joueurs de foot? Prends cinq bourrins, installe-les derrière et voilà!»
Sur le même match, le plutôt très fin techniquement Mickaël Garros se retrouvera seul face aux buts vides, à six mètres, et assurera le coup comme l’aurait fait un U9 encore pas sûr de sa technique, langue tirée sur le côté pour que l’application soit totale.
«Mais ce terrain, c’est une catastrophe. On s’enfonce de 15 centimètres dès qu’on y pose le pied. Cette opportunité, 99 fois sur 100, ça doit faire but mais là, mon pied d’appui s’est enfoncé, le ballon a tapé ma malléole à la place de mon plat du pied et le ballon a filé au-dessus.» En passant devant sa directrice sportive, il a eu un regard noir et a grommelé : «c’est à cause de votre terrain, là…». Deux points de perdus.
Et s’il pleut? On reporte, comme à Mersch?
«Votre» terrain. Ou plutôt, celui de la commune. Celui qui était au centre de toutes les attentions lors d’une réunion ce lundi entre les dirigeants et l’échevin au sport, à un moment charnière pour la BGL Ligue. Alors que le RFCU est entré en guerre larvée avec sa commune pour obtenir des conditions de travail dignes d’un club qui compte plus de 600 membres et dont les pelouses d’entraînement sont retoquées une à une par la commission des terrains de la fédération.
À un moment où la FLF a dû reporter le match Mersch – Fola tant la surface de jeu était lamentable et dangereuse. Lutter pour des conditions décentes semble être dans l’air du temps et à Wiltz, David Vandenbroeck a allumé son adversaire de façon péremptoire, au coup de sifflet final : «C’est le pire terrain de BGL Ligue». Quand même l’ancien demi-finaliste de Ligue des champions Nabil Dirar a du mal à assurer une simple passe, cela devient une évidence.
Lundi, le FC Schifflange est arrivé à la commune avec un plan précis : une société de Bissen lui proposait de retaper son terrain pour quelques petites dizaines de milliers d’euros, ce qui lui permettrait de finir la saison tranquille avant d’envisager une solution plus pérenne. La commune a poliment répondu qu’elle allait regarder le devis. C’est-à-dire qu’il ne faudra pas compter sur une pelouse requinquée pour la venue du RFCU, dans une semaine et demie.
Ce qui veut aussi dire qu’on n’est pas à l’abri, en cas de fortes pluies, de voir un nouveau match de BGL Ligue reporté à cause de l’incurie d’une municipalité. D’ailleurs, un ancien joueur du club et ancien directeur sportif du Racing, Ilies Haddadji, indiquait dimanche qu’il ne «comprenait pas qu’on ait donné le coup d’envoi sur un tel terrain». Si bien qu’hier, Sophie Lamorté, qui attend de voir pour se prononcer, se sent quand même «un peu abandonnée».
Bientôt 5 000 euros de perdus en plus?
Parce que les effets vont bien au-delà de la santé des joueurs («même faire un décrassage sur ce terrain est dangereux et épuisant», râle Garos) ou de la qualité de jeu. Quand il pleut et que la surface de jeu du stade de la rue Denis-Netgen est interdite à l’entraînement, Ismaël Bouzid et ses gars doivent se rapatrier sur le synthétique et… forcer les équipes de jeunes à annuler leurs séances.
«Priver des gamins d’entraînement, lance amèrement Sophie Lamorté, c’est horrible.» On lui a alors proposé, en haut lieu, de se replier sur le terrain d’athlétisme, qui… ne possède pas d’éclairage. «Donc, à la limite, il faudrait que nos joueurs s’entraînent à la lampe frontale», ironise-t-elle.
L’éclairage tiens, autre vaste sujet! Insuffisant, il ne permet pas à Schifflange d’accueillir les matches en fin d’après-midi (tout l’hiver, le promu a joué à 15 h). Il lui a déjà coûté l’organisation de son 16e de finale de Coupe contre Käerjeng, délocalisé sur les infrastructures de l’adversaire, au Um Dribbel.
C’est-à-dire un manque à gagner d’environ 5 000 euros. Et l’affaire pourrait se reproduire contre Mondorf, en 8es, puisque la rencontre est programmée un mercredi soir. La commune a commandé un nouvel éclairage de longue date et promis qu’il serait installé avant la date fatidique.
Aujourd’hui, Schifflange est barragiste et il lui reste six matches de championnat sur ses installations, avec des vestiaires d’une désespérante vétusté, mais c’est un détail. On lui rappelle fréquemment qu’un projet de nouveau stade est censé se concrétiser à quelques encablures de ce terrain vague qui lui tient lieu de triangle des Bermudes footballistique.
Déjà six ans de promesses et sûrement encore quelques-unes à attendre. Pour l’heure, Fabien Zuili et son club réclament juste une pelouse. Le sujet est crucial : Schifflange joue sa survie à cet étage… sur un champ de mines.