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Assassinat dans un centre de primo-accueil : «C’était un accident !»


Reda prétend ne pas avoir eu l’intention de tuer un homme. L’enquête prouverait le contraire, selon le président de la 12e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. (photo : archives lq/julien garroy)

Le 11 décembre 2020, un demandeur d’asile âgé de 35 ans poignardait à mort un autre réfugié au centre de primo-accueil à Strassen. Son procès pour assassinat a débuté mardi.

Une mésentente semble être à l’origine de ce geste qui a ôté la vie à un demandeur d’asile de 38 ans. Face à la 12e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg hier après-midi, le prévenu a reconnu les faits, mais pas la préméditation. L’Algérien est accusé d’homicide volontaire avec l’intention de donner la mort «avec la circonstance aggravante de la préméditation», l’informe le président qui s’étonne qu’il se soit introduit «avec un grand couteau dans la chambre de la victime à 2 h du matin».

L’explication donnée à la barre par Reda «ne fait aucun sens» pour le président. Le prévenu explique avoir été invité par sa victime à la rejoindre dans sa chambre pour discuter d’un incident survenu plus tôt dans la soirée. Elle l’aurait accueilli armée d’un couteau. «J’ai cru qu’il allait m’attaquer. J’ai vu un couteau au sol, je l’ai pris et je l’ai blessé aux jambes pour qu’il ne puisse pas me suivre. J’ai eu peur», raconte le prévenu. «Vous l’avez massacré, vous ne vous êtes pas contenté de le blesser. À elle seule, la blessure à la tête suffisait à le tuer», réplique le président de la chambre criminelle. «Dans ce dossier, il n’y a rien d’accidentel. À part dans l’intention de tuer, on ne blesse personne au visage de la sorte.»

Un témoin qui partageait la chambre de la victime, a rapporté avoir entendu Reda dire «je vais te tuer» en y entrant. Les blessures de la victime laissent penser qu’elle était couchée quand elle a été attaquée et des blessures de défense aux mains tendent à prouver qu’elle n’était pas armée. De plus, la police n’a pas relevé des traces de lutte sur les lieux du crime. Des éléments plus convaincants que les réponses du prévenu au président qui l’a cuisiné patiemment pendant une heure pour essayer de comprendre sa version des faits. Les yeux baissés, Reda ne se laisse pas embrouiller. Il répond encore et encore aux mêmes questions précises dont seules les personnes ayant accès au dossier ont les réponses.

Une coupure de 23 centimètres

«Il y avait du sang partout», se souvient le commissaire de police arrivé en premier sur les lieux qui a témoigné de la férocité de l’attaque. La victime présentait cinq profondes entailles aux tibias et aux mollets ainsi qu’une coupure profonde de 23 centimètres de long lui traversant tout le visage de la tempe à la lèvre supérieure. L’arme du crime est retrouvée cachée derrière un radiateur. À ce moment-là, Reda est en fuite. La victime est opérée d’urgence, mais ne survivra pas à l’intervention. Elle décède d’un choc hémorragique.

Après un détour par Sarrebruck, Reda s’est rendu à la police, craignant des représailles des amis de la victime, dont il n’a pas encore appris le décès. «Il a expliqué avoir voulu s’assurer que la victime ne lui ferait pas de mal après l’incident de la soirée pour justifier sa présence dans la chambre 12», témoigne le commissaire en chef du service homicides de la police judiciaire qui a mené l’enquête. La victime l’aurait légèrement coupé avec un couteau et se serait blessée au doigt. Selon le récit du prévenu aux policiers, la victime semble avoir voulu imposer sa loi au foyer et n’aurait pas supporté qu’il se soit interposé entre elle et un autre Algérien. Les rancœurs se seraient accumulées entre les différents protagonistes, renforcées par des rivalités raciales.

«Reda nous a dit ne jamais avoir eu l’intention de tuer, mais d’aplanir les tensions. S’il l’avait voulu, il l’aurait frappé au torse, nous a-t-il indiqué pour prouver sa bonne foi», poursuit l’enquêteur. «Il avait peur de lui parce qu’il aurait déjà été condamné pour avoir poignardé quelqu’un.»

Au foyer, les langues se délient. Reda et sa victime se cherchaient tout le temps, rapportent les camarades de chambrée des deux hommes. Tous accusent le prévenu, mais reconnaissent ne pas l’avoir vu en action. Les agents de sécurité du foyer, au contraire, décrivent Reda et sa victime comme des personnes ne posant pas de problèmes. «Ils étaient toujours fourrés ensemble», précise l’un d’eux, ajoutant que «ce soir-là, les résidents étaient un peu agités».

«La victime est arrivée avec une coupure à la main. Il l’avait enroulée dans son drap de lit. Reda s’est précipité vers nous pour nous dire que ce n’était pas lui qui l’avait blessé alors que la victime nous avait dit qu’il s’était coincé la main dans la porte. On a trouvé cela bizarre», témoigne l’agent. Reda aurait, selon lui, profité d’une relève de garde pour agir. «Il nous a fait signe quand on est passés. Je pense qu’il attendait ce moment.» Selon le commissaire en chef, l’expertise neuropsychiatrique révélerait que Reda a agi avec calme et détermination. «Il savait ce qu’il faisait.»

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