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[BD] Al Capone selon lui-même


Dans cette autobiographie «totalement subjective», Al Capone remonte le fil de son mythe, parti des bas-fonds de New-York, à l’époque où il était encore le petit Alfonso. (Image Sarbacane)

Du petit Alfonso à Scarface, le «roi de Chicago» et bandit le plus célèbre du XXe siècle raconte son ascension et sa légende, ou du moins, celle qui l’arrange!

Loin du cinéma et ses films devenus mythiques (Scarface, The Untouchables), la BD ne s’est que rarement penchée sur le cas Al Capone. Il y a eu certes une apparition remarquée du mafieux dans Tintin en Amérique (1932), avant d’avoir pour lui tout seul son histoire dans une revue, aujourd’hui oubliée, de l’éditeur Brandt (1968-69). Sans oublier encore, dans une pure veine franco-belge, la série Sammy imaginée par Raoul Cauvin, soit l’histoire de deux gardes du corps plongés en pleine prohibition. Swann Meralli (scénario) et Pierre-François Radice (dessin) corrigent aujourd’hui le tir (de pistolet), sans tomber dans la biographie ronflante ou didactique.

«Tout ce que tu as entendu sur  moi est faux»

Tout vient de l’idée de départ, plutôt bonne : montrer le gangster en 1938, fatigué et atteint de syphilis (dont il mourra neuf ans plus tard), enfermé dans les geôles d’Alcatraz. Paranoïaque, sujet aux tremblements et aux hallucinations, il s’imagine ici aux cotés de sa mamma, la confidente idéale pour raconter son histoire. Attention, pas celle «qu’écrivent les journaux», non! «Tout ce que tu as entendu sur  moi est faux», se lamente-t-il.

L’histoire

Al Capone, dit Scarface, le plus grand gangster de tous les temps, est enfin derrière les barreaux. Il est temps pour lui de faire les comptes, non plus de son magot mais de ses crimes passés. Il se souvient et raconte son histoire à sa mère venue lui rendre visite en prison. Mais le célèbre truand ne peut s’en empêcher : il triche et écorne la vérité…

Comme pour mieux consolider sa légende, ce sera sa version, à la première personne. Et d’ailleurs, «est-ce qu’un fils irait mentir à sa mère?», dit-il, et «quand tu m’auras écouté, là, seulement, tu pourras me juger». Un témoignage en guise d’ultime rachat, plus proche du confessionnal que du parloir.

Autobiographie «totalement subjective»

Dans cette autobiographie «totalement subjective», comme le précisent les deux auteurs, Al Capone remonte le fil de son mythe, parti des bas-fonds de New-York, à l’époque où il était encore le petit Alfonso. Celle de la misère, du racisme, de la délinquance, de la tricherie aux cartes et des guerres de territoire (déjà) entre Italiens et Irlandais.

Un terreau idéal pour se faire des amis (et des ennemis) quand on a du charisme et du culot comme lui. Exilé à Chicago, il va rapidement gravir les échelons du banditisme, d’abord auprès de son mentor, Johnny Torrio,  puis en solo, contribuant fortement à l’émergence du système de mafia et ses principes : contrebande, prostitution, corruption, intimidation, violence, assassinat. Avant la chute inexorable.

Personne sur cette Terre ne peut, d’un trait de plume, rayer tout ce qu’il a fait

Dans ses délires, Al Capone rappelle là qu’il est un homme plein de  paradoxes : un père de famille, un parvenu visionnaire cherchant à marquer l’histoire de son empreinte (comme lorsqu’il fait la Une du Times en 1930), un robin des bois qui a donné du travail à ses compatriotes et de la soupe aux plus nécessiteux. Mais il y a aussi l’autre face de la pièce, bien plus sombre celle-ci : cette figure du gangster colérique, sanguinaire et calculateur, aux ambitions sans limite. Mais ça, sa mère ne doit pas l’imaginer! Alors, pour la ménager et se rapprocher de la rédemption, il corrige les angles, enjolive les faits, mélange le réel et l’imaginaire.

Si Swann Meralli, fan du film de Brian de Palma (selon les éditions Sarbacane), s’amuse à faire mentir cet Al Calpone bluffeur, il reste toutefois au plus près de la véritable histoire. De toute façon, Pierre-François Radice, pour sa toute première BD, veille aux grains, et traduit dans un dessin léger les activités criminelles du «roi de Chicago» – rappelant au passage son passé d’illustrateur d’albums jeunesse. Le personnage n’est d’ailleurs pas dupe et l’affirme en conclusion : «Personne sur cette Terre ne peut, d’un trait de plume, rayer tout ce qu’il a fait».

Al Capone, de Swann Meralli  & Pierre-François Radice. Sarbacane.

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