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La Pologne est dans le collimateur de la Commission


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Le bras de fer se poursuit entre Bruxelles et Varsovie après que la Commission européenne a lancé samedi une procédure d’infraction contre une des réformes controversées de la justice mises en place par le pouvoir conservateur polonais.

« La Commission européenne a lancé une procédure d’infraction contre la Pologne, par une lettre de notification formelle, à la suite de la publication dans le Journal officiel polonais de la Loi sur l’organisation des juridictions de droit commun le vendredi 28 juillet », a-t-elle indiqué dans un communiqué.

L’exécutif européen a donné un mois à la Pologne pour répondre à sa lettre de mise en demeure.

Si la réponse ne satisfait pas la Commission, elle peut alors adresser un « avis motivé » à Varsovie, deuxième étape de la procédure, avant l’éventuelle saisine de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).

Varsovie, qui crie au « chantage » de l’UE, n’a pas été pris de court.

La Commission avait en effet averti mercredi qu’elle allait déclencher cette procédure d’infraction — engagée contre un État membre qui ne met pas en œuvre le droit de l’Union et pouvant conduire à des sanctions financières — dès publication officielle de la loi sur les tribunaux ordinaires.

Dans une première réaction, le vice-ministre polonais des Affaires étrangères chargé des affaires européennes, Konrad Szymanski, a déclaré à l’agence PAP que la décision de la Commission européenne était « infondée ».

« Dans la nouvelle loi sur les tribunaux ordinaires, toutes les garanties de procédure et les moyens de recours seront appliquées », a-t-il assuré.

Au delà, l’exécutif européen a réclamé « instamment » la suspension de la refonte globale du système judiciaire entreprise par les conservateurs au pouvoir, dénoncée par l’opposition comme un « coup d’Etat rampant » et contestée par des manifestations massives.

Lundi dernier, le président polonais Andrzej Duda, pourtant issu du parti Droit et Justice (PiS) au pouvoir, avait certes opposé son veto à deux autres lois controversées – l’une portant sur la Cour suprême et l’autre sur le Conseil national de la magistrature-, accusées de mettre en péril l’indépendance de la justice.

Mais ce veto ne concernait pas la réforme sur l’organisation des juridictions de droit commun, officialisée vendredi.

Selon Bruxelles, cette nouvelle loi contient des mesures discriminatoires, avec des âges différents de départ à la retraite pour les hommes et les femmes.

La Commission déplore également une mesure accordant au ministre de la Justice le pouvoir de prolonger le mandat des juges ayant atteint l’âge de la retraite.

Fin de non recevoir

Mercredi, Bruxelles avait déjà durci le ton, en se disant « prêt à déclencher immédiatement » la plus lourde procédure de sanction contre la Pologne, si le gouvernement ne suspendait pas la réforme de la Cour suprême, qui permet aux autorités de révoquer ou mettre à la retraite forcée ses juges.

Ce recours à l’article 7 du Traité de l’UE, encore jamais utilisé, est souvent décrit comme « l’arme nucléaire » dans la panoplie de mesures que peut prendre l’Union contre l’un de ses membres.

Au terme d’une procédure complexe, il peut déboucher sur une suspension des droits de vote d’un pays au sein du Conseil de l’Union, l’instance regroupant les 28 Etats membres.

La procédure d’infraction lancée samedi est une démarche plus habituelle.

Mais l’homme fort de la Pologne, Jaroslaw Kaczynski, chef du PiS, a promis cette semaine que les réformes du système judiciaire seraient poursuivies en dépit des vétos présidentiels et des protestations en Pologne comme à l’étranger.

« La réforme de la justice doit être radicale, une (réforme) partielle ne changera rien », a-t-il plaidé jeudi à la télévision catholique Trwam.

Arrivé au pouvoir fin 2015, son parti conservateur voit dans la magistrature une « caste » corrompue faisant partie d’un réseau informel de privilégiés issus d’anciens milieux communistes.

Le vice-président de la Commission, Frans Timmermans, a envoyé vendredi une lettre réitérant l’invitation faite au ministre polonais des Affaires étrangères, Witold Waszczykowski et à son collègue de la Justice Zbigniew Ziobro de venir à Bruxelles afin de relancer « un dialogue constructif ». Une invitation restée à ce jour sans réponse.

La Pologne était déjà dans le viseur de la Commission pour sa réforme, également contestée, de la justice constitutionnelle, qui avait justifié l’ouverture par Bruxelles en 2016 d’une procédure appelée « cadre pour l’Etat de droit », toujours en cours.

AFP

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