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En pleine expansion, le vignoble de Moselle séduit les viticulteurs


Émilie Boutrou et Florian Kreitwill sont les nouveaux viticulteurs du Domaine Florescence.

Et un domaine de plus ! Depuis qu’il a décroché l’AOC en 2011, le terroir mosellan a accueilli six nouveaux viticulteurs. Émilie Boutrou et Florian Kreitwill sont les derniers. Ils viennent de créer le Domaine Florescence. Son histoire résume bien l’attrait pour le vignoble lorrain et les difficultés pour s’y installer.

Fermée en 2012, l’école maternelle de Lorry-Mardigny, petit village au sud de Metz, va reprendre vie. Dans un tout autre domaine. «La cuverie sera installée dans la salle de classe, le pressoir sous le préau et l’espace de vente dans le hall d’entrée», décrivent Émilie Boutrou et Florian Kreitwill.

Ce duo, qui se connaît depuis un peu moins de trois mois, y a créé le Domaine Florescence. Il s’agira de la 21e exploitation viticole de ce terroir en pleine expansion depuis qu’il a décroché en 2011 l’AOC (Appellation d’origine contrôlée). «C’est un très beau vignoble, l’un des plus importants à l’époque avant que le phylloxéra n’en vienne à bout. Il y a donc un gros potentiel. Même s’il est méconnu et vend 80 % de sa production en Lorraine, il y a un vrai marché à développer», précisent les néo-viticulteurs.

D’où ce premier investissement, de 550 000 euros. Un financement participatif sur Miimosa qui s’achève dimanche leur a déjà permis de récolter près de 19 000 €.

Du parfum au vignoble

Âgée d’à peine 23 ans, Émilie Boutrou est fraîchement diplômée d’un BTS viticulture-œnologie décroché à Avize (Marne). Elle avait auparavant effectué trois années d’études à Paris pour être «nez» dans la parfumerie. Fille d’agriculteurs de Darmont, dans le nord de la Meuse, près d’Étain, elle connaît bien le travail de la terre : «J’ai été formée au vin dans les Côtes de Meuse, au Domaine de Muzy. Mais là-bas, il y a très peu d’opportunités pour obtenir des vignes. C’était plus simple en Moselle.»

Elle fait équipe avec Florian Kreitwill, 44 ans. Il a grandi dans la Marne, à Damery, près d’Épernay, et d’un cousin viticulteur qui lui a donné le goût de la vigne. Après des études en agronomie, il a vendu en 2018 sa société d’aménagement de terrains de sport, dont il est depuis salarié. Lorrain d’adoption depuis 2005, c’est là qu’il voulait, lui aussi, s’installer.

Sept cépages différents

Voulant travailler en bio, ils espèrent des premières vendanges en septembre 2025 et une première production de 10 000 bouteilles en avril 2026. Via la Safer (Société d’aménagement foncier et d’établissement rural), il leur aura fallu plus d’un an pour acheter deux hectares de vignes appartenant avant à des Luxembourgeois et louer un hectare supplémentaire sur trois communes viticoles du nord du département : Sierck-les-Bains, Contz-les-Bains et Haute-Kontz.

«Ce sont de vieilles vignes qui ont entre vingt et cinquante ans d’âge. Il y a beaucoup de travail pour les rendre vraiment opérationnelles. Elles comptent sept cépages différents, ce qui permettra de multiplier les cuvées. On aura du pinot noir pour le rouge, de l’auxerrois et du muller-thurgau, deux cépages typiques du terroir. Et des pinots gris et blanc, du riesling ou du gewurztraminer.»

Transhumance des raisins

En revanche, impossible de trouver à proximité un lieu pour installer le chai : «L’AOC impose qu’il se trouve sur une des communes référencées et la pression immobilière est trop élevée et onéreuse dans ce secteur proche du Luxembourg.» Un exemple significatif des difficultés rencontrées par ceux qui veulent se lancer dans la viticulture dans ce terroir disséminé sur trois secteurs différents (Moselle-Nord, pays messin et autour de Vic-sur-Seille).

D’où l’achat de cette ancienne école à plus de 60 kilomètres de leurs vignes : «On aura un camion dans lequel on pourra mettre un chenillard pour travailler les vignes. Et lors des vendanges, on descendra les raisins récoltés via l’A 31 dans un véhicule climatisé.» Ou l’art d’inventer la transhumance des raisins…

Philippe Marque
(Le Républicain lorrain)