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[Nations League] Comment Curci est (re)devenu «bankable»


L’attaquant des Francs Borains est-il une alternative crédible en pointe ? Son renouveau, dû à un vrai changement d’attitude face au travail, semble le garantir.

«Mais pour qui tu te prends ? Guardiola ?» Cette petite phrase balancée par un attaquant de 22 ans à Sébastien Grandjean, son coach de 54, champion du Luxembourg avec le Fola en 2021, qui a dirigé entre autres Virton, La Louvière, la Jeunesse ou le F91, a été, à un moment de la courte carrière d’Alessio Curci, une goutte d’eau qui a fait déborder le vase.

On est au printemps. Piqué, Sébastien Grandjean expédie l’attaquant revêche à sa direction en pleine séance, quelques secondes après avoir refusé de lui siffler un penalty lors d’une banale opposition.

La manière douce, dure… et l’indifférence

Quelques jours plus tôt, avec les espoirs du club, Curci a raté «par excès de nonchalance» un but tout fait contre Mouscron sous les yeux de son entraîneur, venu en observateur et qui s’en était arraché les cheveux. Alors cette phrase, à l’entraînement, alors que le club lutte pour le maintien l’a fait dégoupiller…

«J’avoue, aux séances, je suis le pire arbitre de la terre, admet Grandjean. Je suis totalement subjectif et je prends des décisions pour piquer les joueurs et voir leur réaction.» Celle de Curci, qui a alors disparu des options de Luc Holtz, n’est visiblement pas la bonne quand, alors qu’il râle pour comprendre pourquoi il n’a pas obtenu ce penalty, Grandjean lui glisse, mâchoire serrée, que s’il «l’avait tiré avec la même envie que contre Mouscron, cela ne fait pas grande différence». D’où l’attaque «guardiolesque» et la petite sanction disciplinaire.

Ce n’est pourtant pas un point de non-retour. Grandjean travaille son Curci au corps depuis des semaines. Quand il arrive dans le club de D2, en novembre 2023, il connaît bien le Redangeois, admire ses qualités techniques, de finition et de prise de profondeur.

Se réjouit autant de travailler avec lui que Curci de pouvoir obtenir un peu plus que le temps de jeu famélique dont il dispose depuis son arrivée de la formation de Mayence. Mais à la vérité, tous les deux vont assez vite déchanter, comme le synthétise Grandjean : «J’ai vite constaté un manque d’investissement journalier. Je lui ai dit immédiatement que j’attendais plus de lui dans les performances, sinon, hors de question d’en faire un titulaire. Et comme ça ne venait pas, j’ai tout tenté. La manière gentille, la manière très, très dure et aussi l’indifférence complète. Je ne lui parlais même plus».

Dans la vitesse, dans la répétition des efforts, il est exceptionnel. Je n’ai jamais vu ça

Le technicien avoue même l’avoir déjà sorti de l’entraînement pour lui infliger un intense travail physique avec le préparateur, à base de répétition d’efforts, au risque même de le blesser. Il voulait toucher l’orgueil, mais n’est arrivé qu’à toucher les ischios.

«Quand il pivote, on dirait Gerd Müller!»

Après l’épisode Guardiola, Curci réintègre les séances et finit la saison plutôt bien. Arrive alors l’information de sa future paternité. Cet évènement dont on dit qu’il fixe et responsabilise les footballeurs professionnels un peu versatiles.

Le staff des Francs Borains décide d’activer ce dernier levier un peu avant la naissance de la petite fille de l’international, le 28 juin. Parce que Curci est jeune, Curci est encore sous contrat et surtout, Curci témoigne de qualités physiques exceptionnelles.

Dans une ultime réunion, qui regroupe le joueur, deux membres du staff et deux membres de la direction, le garçon, qui sort d’une saison à deux titularisations seulement, 371 minutes cumulées de temps de jeu et 1 petit but, se fait secouer. Puis Grandjean prend la parole. «Tes parents sont millionnaires, Alessio?»

Le joueur signifie que non, qu’ils ont «travaillé dur toute leur vie». «Alors je lui dis que c’est une bonne éducation qu’il a reçue, embraye l’entraîneur qui espère encore ramener son poulain dans ce qu’il estime être le droit chemin.

Mais que s’il poursuit, lui, sur cette voie-là, ce n’est pas le bon exemple qu’il donnera à son enfant. C’est là qu’enfin, la pièce est tombée du bon côté!» Grandjean lui annonce qu’il va le garder. Mais que Curci va devoir l’aider. Et s’aider lui-même.

À la reprise, Curci revient avec «des valeurs de travail énormes». Et très vite, ses valeurs physiques explosent : «Elles sont carrément dignes de ce qu’on peut trouver au niveau de la Jupiler Pro League!», claironne Grandjean. «Dans la vitesse, dans la répétition des efforts, il est tout bonnement exceptionnel. Je n’ai jamais vu ça. Et puis il a une vitesse d’exécution pied droit quand il doit se retourner et pivoter… On dirait Gerd Müller!».

Le garçon devient titulaire. Il a déjà fait presque autant de minutes à la mi-octobre que dans toute la saison passée et a multiplié son total de réalisations par trois. Le dernier match contre le Lierse a prouvé qu’il pouvait être repris par ses vieux démons mais globalement, ses performances en D2 sont d’un très bon niveau et son désormais ex-coach en est persuadé : «Là, il a compris. Il peut faire une très grande carrière. Et je suis sûr qu’il est actuellement l’attaquant le plus performant du Grand-Duché».

Assez pour postuler face à la Bulgarie, lui qui n’a qu’une entrée en jeu en Géorgie à son actif en un an de sélection nationale? Entre un Gerson à l’état de forme qui gagne à être précisé, un Muratovic à la peine en septembre et un Omosanya qui vient tout juste de revenir, il y a sans doute la place pour un gros bosseur.

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