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[BGL Ligue] Lybohy : «Je ne suis pas fou, c’étaient bien des cris de singe»


Lybohy (à g.), à la poursuite de Monteiro contre le FCD03. (Photo : gerry schmit/editpress)

Expulsé à Wiltz, insulté par la tribune, Chris Lybohy est un joueur abasourdi par ce qu’il vit depuis trois jours.

Thomas Gilgemann, votre président, a dit que beaucoup de ses joueurs ont mal dormi après ce match très particulier disputé à Wiltz. Et vous?

Chris Lybohy : Franchement? Super mal. Je suis à la limite de la haine envers les personnes qui ont pu faire ça. Je suis écœuré. J’en tremble rien qu’en vous parlant. J’ai envie de tout casser. Comment des choses comme ça peuvent-elles encore exister?

À Wiltz, on défend la thèse de « bouh«  qui ont pu être mal interprétés. Et qui, puisque prononcés par des joueurs de couleur du club, excluent toute idée de racisme.

Non non, c’étaient bien des cris de singe. Et je ne suis pas le seul à les avoir entendus. Comment c’est possible? Et en plus qui viennent de gars de couleur! Et à plusieurs en plus. Non, je ne suis pas fou : c’étaient des cris de singe. Heureusement, j’ai su rester calme et faire abstraction. Mais c’est honteux.

L’un des adolescents incriminés est venu vous parler.

Mais je ne l’ai même pas écouté. C’est vraiment qu’il devait se sentir coupable d’avoir fait quelque chose de mal pour faire cette démarche et essaye d’apaiser les choses. Ils savent ce qu’ils ont fait. J’ai juste dit « OK », mais je ne sais même pas ce qu’il m’a dit.

Vos dirigeants assurent que M. Morais, l’arbitre du match, a pris ses responsabilités en décrivant les faits dans son rapport.

Moi, je n’ai rien contre le corps arbitral, mais c’est à eux de nous protéger. C’est à eux de faire les policiers sur le terrain. Samedi, la tension s’est lentement accumulée parce qu’à aucun moment, qui que ce soit n’a rien fait ni rien contre les insultes qu’on a dû supporter dès le début du match. Vous me parlez des cris de singe? Vous voulez savoir combien de « rentre chez toi, l’Africain«  j’ai entendu à Wiltz? Les arbitres doivent gérer ça tout de suite. Immédiatement. Vous vous posez la question des échauffourées de fin de match? C’est exactement ce qu’on est venu dire à Sanali. C’est pour ça qu’il a répliqué.

Non, non, c’étaient bien des cris de singe

Le racisme, vous y avez été souvent confronté?

Sur le terrain en France (NDLR : il a joué dix ans à Beauvais, Amiens, au Paris FC…) ? Jamais. Mais au Luxembourg, c’est déjà arrivé pas mal de fois, de-ci de-là. Mais c’est la première fois que c’est plusieurs personnes ensemble qui me font ça. Je me sens seul. J’ai l’impression qu’ils ont décidé de m’achever.

En avez-vous parlé avec vos autres coéquipiers de couleur?

Oui. On ne comprend pas. On se dit que c’est aberrant. Mais vous voulez qu’on fasse quoi? Qu’on sorte et qu’on tape sur tous ceux qui nous insultent? Même si c’est intentionnellement, pour nous faire sortir de notre match, c’est inadmissible. Ces gens n’ont donc pas de conscience?

Vous accumulez les déceptions en ce moment : vous aviez déjà été au coeur des problèmes lors du derby contre Differdange.

J’ai perdu ma mère quand j’avais 15 ans et là, on se permet de me dire « nique ta mère« . Ça, ça fait dégoupiller. En vrai, on est des gentils, on a le cœur sur la main mais il faut arrêter de nous chercher, sinon forcément, on récolte ce que l’on sème. C’est horrible de faire ça. À force d’entendre des choses comme ça, forcément, on craque! Et je suis bien content que dans ces conditions, on ait réussi à battre Wiltz à neuf contre onze.

Votre président veut prendre le taureau par les cornes en vous faisant tous aider par un coach mental. Cela pourrait aider?

Mais à la base, on essaye de se gérer comme des grands garçons. On sait reconnaître quand on a merdé. Mais là, en vérité, on ne peut pas dire ça : à Wiltz, ils peuvent dire ce qu’ils veulent, ils savent qu’ils ont cherché ce qui est arrivé. Une échauffourée comme ça, ce n’est pas pour le plaisir. On ne se dit pas « tiens, on va se battre comme ça, gratuitement!« . Alors le coach mental, on va essayer, on va faire cette expérience. Mais contre des paroles comme ça…

«Il a frappé Mmaee, alors ses justifications…»

Jack Mmaee veut porter plainte et Wiltz, surtout, veut enfin gagner pour éviter un record négatif vieux de 20 ans.

Jusqu’à la séance du tribunal fédéral qui examinera éventuellement les violences ayant émaillé le match Wiltz – Progrès (1-2) de samedi, entre les deux clubs, cela risque d’être vidéo contre vidéo. Les Nordistes ont dégainé la leur et expédié des courriers incriminant les joueurs niederkornois qui auraient, selon eux, lancé les échauffourées. Niederkorn s’appuierait plutôt sur un autre renversant le principe de cause et de conséquence. Mais après avoir tendu la main, lundi, le Progrès commence à se demander s’il n’est pas seul à vouloir endosser à deux les responsabilités des débordements et à voir la réalité en face.

À la lecture de l’interview ci-dessus donnée par Chris Lybohy, Michaël Schenk, président nordiste, a contre-attaqué : «Est-il sérieux? La question la plus importante ne lui a pas été posée : est-ce qu’il a mis un coup au visage de Jack Mmaee (NDLR : qui avait encore le visage gonflé hier soir et ne savait pas s’il pourrait jouer). Car nous, nous l’avons identifié formellement et de ce que je sais, Jack va porter plainte. Moi aussi, je le ferai. On me dit que dans le derby contre Differdange, Lybohy était aussi fautif. Le racisme n’a rien à faire sur un terrain, mais la violence non plus et je trouve très limite qu’il justifie ses réactions de la sorte. Moi aussi, plus jeune, j’ai été chambré parce que j’étais roux. J’en rigolais et j’allais boire un coup après le match avec ceux qui se moquaient de moi, et les insultes cessaient».

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