Locataires d’un bel appartement place de Paris, Olivier et son épouse ont fait leurs cartons au début du mois, démunis face à l’insécurité qui gagne du terrain.
La place de Paris a perdu de sa superbe ces dernières années, gagnée par un climat anxiogène difficilement compatible avec une vie de famille paisible. Alors que jusque-là, les problèmes liés au trafic et à la consommation de drogue étaient contenus dans le périmètre de la gare, ils s’étendent désormais en direction de la Ville-Haute.
«Ce sont des mecs qui hurlent dans la rue en pleine nuit, qui sonnent à notre porte, des toxicomanes qu’on retrouve au petit matin dans le hall d’entrée, des seringues qui traînent, des taches de sang sur notre chemin», décrit Olivier, en soupirant. Il y a quelques semaines à peine, avec son épouse et son fils, ils ont déménagé pour une zone résidentielle à Cessange.
Après trois ans passés dans un bel appartement de 70 m2 avec vue imprenable sur la place, ils ont baissé les bras, inquiets de la tournure que prennent les choses : «Depuis un an, c’est de pire en pire. Alors qu’on est plutôt tolérants et qu’on s’est installés là en connaissance de cause, pour cette vie de quartier animée qu’on n’avait pas au Kirchberg où on vivait auparavant», raconte cet urbain dans l’âme, qui a vécu à Paris, Londres et New York.
«On s’attendait à des problèmes, mais pas à ce point. On se disait que c’était du côté de la rue de Strasbourg que c’était inquiétant. Et en vérité, pendant deux ans, la vie était très sympa et agréable», se rappelle ce jeune papa. C’est en 2023 que les choses auraient basculé selon lui. «On voyait de plus en plus de drogués et de marginaux, des gens qui se piquent là, assis par terre. J’aurais été seul, je serais sans doute resté. Mais avec un enfant, c’est dérangeant, clairement.»
Avec la création d’un groupe WhatsApp par des riverains de la Gare l’été dernier, où les photos et vidéos d’incidents sont quotidiennes, Olivier réalise qu’ils sont encore assez épargnés place de Paris, mais pour combien de temps ? «Je ne peux pas me permettre d’attendre que mon fils se blesse en ramassant une seringue», explique celui qui a failli en venir aux mains avec un homme qui criait sous ses fenêtres.
Pour autant, ce ne sont pas ces personnes qui traînent dehors qu’il blâme, mais les autorités. «On est parfaitement conscients que cette situation est due à la misère. Cependant, on pensait le Grand-Duché préservé, avec une politique sociale forte», souligne Olivier, qui n’a jamais pris la peine d’assister à l’une des réunions publiques organisées par les élus de la Ville de Luxembourg. Il ne croit pas aux initiatives de la bourgmestre, dit-il. «Je trouve le Luxembourg très laxiste, j’ai l’impression qu’ils ne font rien.»
Le commerce toujours en souffrance
Si de nombreux habitants ont fait le même choix qu’Olivier et sa famille, des commerçants ont également été contraints de baisser définitivement le rideau, en partie à cause du climat dégradé. À l’image de la Brasserie Joslet, rue du Fort-Neipperg, qui a fermé ses portes en décembre après quelques mois d’activité seulement, la boutique Bagatelle, rue Dicks, en avril dernier, ou le magasin Emo-Gare la semaine dernière, qui «n’était plus rentable» d’après le gérant.
Ce sont au total près d’une vingtaine de cellules commerciales situées avenue de la Gare, de la Liberté ou place de Paris, qui peinent à trouver preneur actuellement. Une situation tendue que le collège échevinal espère apaiser grâce à une nouvelle stratégie de redynamisation pour cette zone en souffrance.
En soutenant par exemple des entreprises déjà testées sous la forme de pop-up store. Ainsi, la semaine prochaine, une nouvelle boutique de vêtements et accessoires, Look Tic Chic, sera inaugurée au 9, avenue de la Gare. La preuve que certains y croient encore, et que tout n’est pas perdu pour ce quartier emblématique de la capitale.
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