Religion, terrorisme, dépression… et même suicide : il rit de tout ou presque. Jérémy Ferrari, tenant d’un humour «noir mais profondément social», s’est hissé en 15 ans au sommet de la scène humoristique française.
Il y a quelques jours, Jérémy Ferrari a donné la 200e représentation de son spectacle Anesthésie générale, qui a tourné dans toute la France pendant quatre ans. Pour l’épilogue de cette longue tournée, il a rempli deux fois l’Accor Arena de Paris Bercy, soit 20 000 places au total. Et pour ceux qui n’ont pu obtenir de billets, l’humoriste de 38 ans, né Jérémy Larzillière, a tout prévu : le spectacle d’environ trois heures sera retransmis en direct au cinéma ce dimanche à 17 h. Au Luxembourg, il sera à l’affiche des cinémas Kinepolis Kirchberg et Belval.
Plus de 300 000 spectateurs auront vu ce one man show – son record –, qui est passé par le Casino 2000 de Mondorf-les-Bains en 2021 et la Rockhal en 2023, pour deux dates qui affichaient complet. «Je vais être triste de quitter ce spectacle, mais c’est sans regret», confie-t-il, disant «avoir l’impression d’être allé au bout du bout». «Il y a de la tristesse, car c’est mon spectacle le plus personnel, mais je tourne aussi une page de ma vie», assure-t-il.
Après les succès de Hallelujah bordel!, sur les religions, et Vends 2 pièces à Beyrouth, sur la guerre et le terrorisme, l’humoriste s’est emparé de la santé. Dans une mise à nu, il narre ses troubles psychiques, ses addictions passées (l’alcool notamment) et sa tentative de suicide, sans oublier le Covid-19. Le tout, sur un ton badin. Les tentatives de suicide? «C’est courant dans ma famille», lance-t-il au public qui retient son souffle pendant une fraction de seconde, avant d’éclater de rire. «Quand je dois traiter du Bataclan (NDLR : les attentats du 13 novembre 2015), deux mois après les faits, et que je décide d’y aller à 100 %, à ce moment précis, je suis terrorisé parce que si ça ne passe pas, ma carrière est foutue. C’est un challenge personnel», observe-t-il.
Je fais partie des humoristes qui viennent du peuple et qui parlent au peuple
Il rapproche son art de celui des cascadeurs de cinéma, et d’autres humoristes qui n’avaient pas peur de diviser. «Je ne me compare pas à Coluche, mais les personnes qui me disent que mon humour n’est pas fédérateur, qu’il est trop clivant, je me demande si elles ont vu les sketchs de Coluche», interroge-t-il. Son genre? «Noir et social», répond-il, lui qui est issu d’un milieu modeste et a grandi dans les Ardennes. «Je fais partie des humoristes qui viennent du peuple et qui parlent au peuple. Je crois que je ne suis pas du tout élitiste.»
Lorsqu’on lui demande si les multiples provocations dans ses spectacles lui ont posé des difficultés, Jérémy Ferrari n’élude pas. «Oui, y a eu des gens frileux», reconnaît-il, assurant n’avoir jamais réécrit le moindre sketch sous la pression. «J’ai tout fait à l’instinct, c’est comme ça que je fonctionne.»
Reste que pour se garantir sa liberté, l’humoriste s’autoproduit. «Je suis très dans le contrôle», admet-il, disant aimer avoir la main sur tout. Il est aussi devenu le producteur de jeunes pousses comme Laura Laune ou Arnaud Tsamere, révélé comme lui dans l’émission humoristique de Laurent Ruquier On ne demande qu’à en rire. Boulimique de travail, il se produit avec ce dernier, et avec Baptiste Lecaplain, dans des tournées à guichets fermés.
D’après lui, «l’argent prime toujours sur la peur, donc si vous faites peur, mais que vous êtes très rentable, on finit par vous laisser parler. Moi j’ai toujours dit que c’était le public qui m’avait porté». C’est sur ce public qu’il compte pour ses projets à venir, dont un prochain spectacle sur l’écologie.
Avant cela, il sera à l’affiche, dans quelques mois, d’un thriller avec Golshifteh Farahani. Une première pour l’humoriste qui confie avoir été sollicité à de nombreuses reprises pour jouer dans des films et avait jusqu’ici toujours décliné parce que les scénarios ne l’«emballaient pas». Étant donné qu’on n’est jamais mieux servi que par soi-même, il a aussi écrit un film, actuellement «en cours de financement».