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Brésil : le carnaval de Rio brille de mille feux au sambodrome


L'Imperio Serrano avait ouvert le bal avec un immense char aux têtes de dragons saillantes. (photo AFP)

Un manège à l’ancienne suspendu qui fait des étincelles, des dragons terrifiants, un char couleur feu qui rappelle la sécheresse : tout le faste et la créativité irrévérencieuse du carnaval de Rio était au rendez-vous dimanche, dans un sambodrome vibrant au son des percussions endiablées.

De quoi en mettre plein la vue aux 70 000 spectateurs et millions de Brésiliens scotchés devant leur télé pour la première des deux nuits de défilés des écoles de samba. Celle de Grande Rio a replongé dimanche soir le public en enfance, avec un manège tournant et suspendu à trois mètres de haut. Sur les chevaux roses, pas d’enfants, mais des cavaliers intrépides en costumes dorés qui n’ont pas intérêt à avoir le vertige, sous un ciel illuminé par les étincelles envoyées dans les airs par les chars.

Quelques mètres plus loin, des danseurs arborent des costumes en barbe à papa plus vrais que nature, jusqu’à en donner l’eau à la bouche. Plus tôt dans la soirée, Imperio Serrano avait ouvert le bal avec un immense char aux têtes de dragons saillantes. Les gueules des dragons dorés et verts s’ouvraient et se refermaient alors, grâce à un ingénieux mécanisme, tandis que des danseurs en costumes dorés étaient postés sur des estrades.

L’espoir après les ténèbres 

Cette année marque le grand retour du carnaval de Rio dans toute sa splendeur. En 2021, il avait été annulé en raison de la pandémie de covid et l’an dernier, il avait été reporté à avril, les cortèges de rue n’ayant pas été autorisés. C’est également la première édition depuis le retour au pouvoir de l’icône de la gauche brésilienne, Luiz Inacio Lula da Silva, qui a battu en octobre le président d’extrême droite Jair Bolsonaro. Lula a d’ailleurs promis de redonner à la culture ses lettres de noblesse, après les nombreuses coupes budgétaires et les accusations de censure sous le gouvernement précédent.

« Ce carnaval a lieu après une élection historique. Après les ténèbres, nous retrouvons l’espoir d’un meilleur avenir », confie Débora Soares, une mannequin âgée de 25 ans, qui se prend en photo devant un immense char doré sur lequel elle s’apprête à défiler. « Avec ce changement de gouvernement, on ressent deux fois plus de bonheur », renchérit Amanda Olivia, costumière de 34 ans.

Les écoles de samba, basées pour la plupart dans des favelas, portent les couleurs de tout un quartier. Elles se préparent toute l’année pour leur grand show qui ne peut dépasser les 70 minutes, sous peine de se voir retirer des points par des jurés impitoyables.

Les 12 principales écoles (six défilent le dimanche, six autres le lundi) sont évaluées selon neuf critères très précis, parmi lesquels la qualité des chars, des costumes, le choix du thème ou la chorégraphie de la « comissao de frente », groupe de danseurs hors pair qui ouvre le défilé.

« Frissons » 

« Je suis nerveux, je n’aurais jamais pensé pouvoir défiler au sambodrome, c’est ma première fois. Quand on arrive ici et qu’on voit ces chars majestueux, on voit à quel point c’est impressionnant, ça donne des frissons », confie Gabriel Rodrigues, étudiant en économie, le visage peint en rouge et noir.

La nouvelle ministre de la Culture, Margareth Menezes, défilera avec la dernière école à s’élancer au sambodrome dans la nuit de dimanche à lundi, Mangueira. Ce défilé montrera la richesse du carnaval de Salvador de Bahia (nord-est), berceau de la culture afro-brésilienne.

Le nord-est du Brésil était aussi à l’honneur dans les défilés d’Unidos da Tijuca et Mocidade, qui a ouvert le sien avec un char somptueux aux couleurs flamboyantes, rappelant l’aridité de l’arrière-pays de cette région pauvre devenue le fief électoral de Lula.

Si la nuit de Rio est marquée par la féérie des défilés au sambodrome, les premières heures de la matinée sont elles rythmées par les cortèges musicaux des « blocos » qui animent les rues de la ville, certains attirant des centaines de milliers de personnes, pour une fête débridée où l’alcool coule à flots.

Mais le carnaval a été endeuillé par la tempête qui a fait au moins 36 morts après des glissements de terrain et des inondations dans l’État voisin de São Paulo (sud-est).