L’Université a dû prendre de nouvelles mesures pour limiter la durée de location des logements étudiants. La faute à un manque d’offre et une hausse importante des demandes.
La problématique du logement au Luxembourg en général est prégnante dans les débats. Même le logement étudiant est touché par la raréfaction de l’offre et une augmentation rapide de la demande. Un cercle vicieux alimenté par de nombreux éléments. Et c’est cette situation que le député socialiste Yves Cruchten a pointée du doigt à travers une question parlementaire à destination des ministres du Logement, de l’Enseignement supérieur et des Travaux publics.
L’élu a repéré une nouvelle mesure annoncée sur le site internet de l’Université. Elle vise à limiter la durée de location des logements étudiants pour pallier au manque. Bien que l’Université «dispose d‘un parc de 1000 logements pour étudiants, elle n’est pas en mesure de satisfaire toutes les demandes d‘hébergement des étudiants» explique le site internet. Pour rappel, l’Université de Luxembourg compte 6 700 étudiants, un effectif en constante hausse. La durée de location maximale des étudiants a ainsi été limitée à la durée normale des études de 36 mois (bachelor) et de 24 mois (master). Quant aux doctorants, la durée maximale de séjour ne peut dépasser 24 mois, même que la durée normale d’un doctorat comprend 48 mois. Yves Cruchten poursuit en soulignant que, selon ces dispositions, aucun contrat de location ne sera proposé aux étudiants ayant changé le programme d’études ou ayant besoin de plus de temps pour boucler les études. Pour le député, la mesure s’oppose au principe de l’Aide financière de l’État (AideFi), qui prévoit l’accordement d’une bourse pour «un nombre d’années d’études dépassant de 2 semestres la durée officiellement prévue».
Des logements étudiants en moins
L’élu socialiste souligne dans sa question que par conséquent, les étudiants sont soumis à plusieurs contraintes. En raison du risque de perdre l’accès au logement, ils ne peuvent pas se permettre d’échouer ou de changer de discipline et les étudiants en provenance de pays tiers se voient dans une situation difficile, étant donné que leur titre de séjour est accompagné d’une adresse valide. Yves Cruchten salue le projet «Logements Porte de France» qui prévoit la construction de 120 nouveaux logements pour étudiants, mais souhaite savoir si d’autres projets sont prévus pour compenser le manque de logement et l’impact de ces nouvelles dispositions. Il souhaite aussi savoir combien d’étudiants sont concernés par la nouvelle mesure et sont donc amenés à quitter le logement de l’université.
Les ministres Claude Meisch (Enseignement supérieur) et Henri Kox (Logement) ont précisé dans leur réponse que l’Université du Luxembourg offrait des logements à des étudiants depuis l’année académique 2005/2006. Pour eux, le logement étudiant est un «instrument clé pour faciliter l’accès à l’enseignement supérieur». Ils précisent que selon la base de données «Eurostudent», en moyenne 18 % des étudiants universitaires en Europe vivent dans un logement étudiant et que ce type de logement est particulièrement utilisé par les étudiants étrangers, les étudiants âgés de moins de 22 ans et les étudiants qui dépendent de l’aide publique nationale. Le besoin en logements abordables est particulièrement fort au début des études, puis diminue souvent avec le temps lorsque les étudiants s’installent en colocation avec des pairs ou des partenaires.
Concernant les chiffres luxembourgeois, les ministres expliquent que le nombre d’unités dans le parc de logements pour étudiants géré par l’Université du Luxembourg est passé de 1091 durant l’année académique 2018/2019 à 985 en 2021/2022, avec un taux d’occupation qui varie entre 96,4% et 99,7%. Le nombre de chambres disponibles à l’Université par rapport au nombre total d’étudiants (Bachelor, Master et PhD) se situait entre 19,9% en 2018/2019 et 16,2 % en 2021/2022. «Ce pourcentage est donc très proche de la moyenne européenne», soulignent les deux membres du gouvernement. Cette baisse du nombre de logements est liée notamment la fermeture temporaire de la grande résidence «Les Dominicaines» à Luxembourg-ville pour des raisons sanitaires nécessitant des travaux de rénovation. D’autres résidences plus petites gérées par l’Université ont été fermées temporairement ou définitivement pour raison de sécurité ou parce que leurs propriétaires souhaitent les utiliser à d’autres fins poursuivent les ministres.
Le nombre d’étudiants
sur liste d’attente explose
Claude Meisch et Henri Kox confirment la mise en place des mesures de l’Université du Luxembourg limitant la durée de location des logements étudiants. Selon eux, il s’agit d’une «pratique courante dans de nombreuses universités, notamment pour permettre à davantage d’étudiants de bénéficier d’un logement adéquat et abordable au cours de leurs études». Cette mesure sera applicable à partir du mois de septembre. Les nouveaux étudiants en Bachelor et Master seront informés en amont de la signature que la durée totale du bail ne pourra dépasser la durée normale des études : 24 mois pour les étudiants en Master (4 semestres) ou 36 mois pour les étudiants en Bachelor (6 semestres). Les locataires actuels bénéficieront d’une «clause grand-père» jusqu’à la fin de leurs études. Quant aux doctorants, la nouvelle règle de 24 mois s’applique aux étudiants arrivés depuis le 1er mars dernier. Des exceptions à la nouvelle mesure seront possibles pour des raisons médicales ou en cas de force majeure.
En 2019, environ 350 personnes figuraient sur la liste d’attente pour obtenir une chambre dans le parc de logements universitaire. Suite à la pandémie, il n’y avait plus de liste d’attente en 2020. En 2021, une forte augmentation des demandes ainsi qu’un nombre très faible de logements libérés ont considérablement aggravé la pénurie de chambres, ce qui a mené à une liste d’attente de 650 personnes en automne 2021 ajoutent les ministres. Pour eux, la nouvelle mesure relative à la durée de séjour, doit permettre la libération d’un plus grand nombre de logements sera progressivement libéré. Le nombre d’étudiants concernés par cette mesure ne semble pas connu car les ministres ne l’évoquent pas.
Et pour la construction de nouveaux logements étudiants : en plus de la future résidence «Porte de France» planifiée à Esch-Belval, d’autres projets sont «en cours de planification» mais n’ont toutefois pas encore confirmé précisent les ministres. La pénurie de logements étudiants va durer…