Accueil | Economie | Les « Luxleaks » et la notion de « lanceur d’alerte » de nouveau devant la CEDH

Les « Luxleaks » et la notion de « lanceur d’alerte » de nouveau devant la CEDH


Raphaël Halet au tribunal d'arrondissement de Luxembourg, en 2016. (photo Hervé Montaigu)

Raphaël Halet est-il un « lanceur d’alerte » ? La question a été au cœur mercredi d’une nouvelle audience devant la Cour européenne des droits de l’homme qui avait débouté en première instance ce Français condamné au Luxembourg pour avoir fait fuiter des documents dans le cadre du scandale d’évasion fiscale « Luxleaks ».

La Grande Chambre de la CEDH, formation suprême de la Cour, rendra sa décision d’ici à plusieurs mois. « Nous sommes ici pour entendre la cause d’un lanceur d’alerte », a lancé d’emblée Me Christophe Meyer, l’avocat de M. Halet, qui s’était vu refuser ce statut par la justice du Grand-Duché.

Ce Français, qui était employé par le cabinet de conseil luxembourgeois PricewaterhouseCoopers (PwC), avait communiqué fin 2012 à un journaliste 16 documents utilisés dans un reportage de l’émission française « Cash Investigation » diffusée en 2013 sur France 2.

Il entendait dénoncer les « rescrits fiscaux », pratique qui permettait à de nombreuses multinationales de bénéficier de conditions très avantageuses accordées par le fisc luxembourgeois, a rappelé le conseil.

Avant lui, un autre informateur, également employé de PwC, avait copié 45.000 pages de documents confidentiels en 2010, remis au journaliste.

À la suite d’une plainte de PwC, le premier informateur et le journaliste avaient été jugés, puis acquittés par la justice luxembourgeoise. Raphaël Halet, lui, avait été condamné à 1.000 euros d’amende.

En mai dernier, la CEDH, saisie par M. Halet, avait donné raison aux juges du Grand-Duché, estimant qu’ils avaient ménagé « un juste équilibre » entre les droits de PwC et la liberté d’expression du requérant. Celui-ci avait demandé à plaider une nouvelle fois sa cause devant la juridiction européenne.

Il y a dans ce dossier une « énorme survalorisation » d’un intérêt privé, celui du cabinet, au détriment de « l’intérêt du public », a estimé son avocat Me Meyer, selon lequel le scandale « Luxleaks » aurait été « impossible sans l’accès aux informations du requérant ».

Il a insisté sur le rôle « devenu essentiel » des lanceurs d’alerte face aux « intérêts privés lorsqu’ils deviennent égoïstes ou rapaces », a-t-il encore souligné.