Deux frères âgés de 20 ans comparaissaient jeudi pour viol et attentat à la pudeur de deux lycéennes qui avaient séché les cours pour s’inviter à leur domicile. L’une des deux était attirée par la promesse d’un joint.
Au printemps 2020, Laura et Giulia se seraient invitées chez Denilson et Pedro, deux frères d’origine capverdienne. Les deux lycéennes sont encore des gamines. Giulia dit avoir séché les cours à contrecœur pour suivre son amie. Avant de les accueillir chez eux, les deux frères s’assurent que la voie est libre et qu’il n’y a pas de parents dans le coin. Laura aurait dit à Denilson vouloir fumer un joint. Elle en aurait déjà fumé et aimerait recommencer. Il l’emmène dans un petit bois à proximité de son domicile. Le cannabis n’aurait pas eu l’effet escompté sur la lycéenne qui se serait roulée en boule au sol et se serait sentie mal. Le jeune homme aurait tenté de l’aider. Elle dit se souvenir qu’ils se seraient embrassés.
Pendant ce temps-là, son frère s’est retrouvé seul avec Giulia. Elle lui aurait raconté que son petit ami la trompait et qu’elle voulait faire de même. Les deux jeunes se seraient embrassés, caressés et Pedro l’aurait sodomisé après lui avoir demandé une fellation qu’elle aurait refusée. Les deux jeunes filles seraient ensuite rentrées chez elles. Laura et Giulia avaient 14 ans et les deux frères cinq de plus.
Les deux frères comparaissaient ce jeudi à la barre de la 13e chambre criminelle du tribunal de Luxembourg. Pedro pour acte de pénétration sur une mineure de moins de 16 ans et attentat à la pudeur. Denilson pour attentat à la pudeur et consommation de cannabis avec une mineure de moins de 16 ans. Dans un langage très fleuri, les frères expliquent qu’ils ne connaissaient pas l’âge des gamines au moment des faits. La présidente de la chambre criminelle estime qu’ils auraient pu le deviner au vu de leur apparence juvénile. Pedro a dit être un homme et n’avoir eu d’yeux que pour les hanches de Giulia. Son frère laisse entendre que de nos jours les filles jeunes seraient «beaucoup plus ouvertes» qu’avant. Laura ne «connaissait» Pedro que depuis quelques semaines avant les faits grâce à un réseau social sur lequel ils seraient devenus «amis». Ils n’auraient jamais parlé ensemble avant ce matin-là.
«J’avais envie!»
Alors pourquoi accepter d’accueillir des inconnues chez soi? La juge a sa petite idée, confirmée par Pedro. «J’ai eu une photographie de Giulia. Si elle ne m’avait pas plu, elles n’auraient pas eu besoin de venir», reconnaît le jeune homme à la barre. «Êtes-vous certain que vous n’aviez pas une autre idée en tête que de fumer un joint? Quand on fume un joint, on se fout de la binette des gens avec qui on le fait.» La juge est d’avis que le joint était un prétexte pour attirer les lycéennes et les séparer pour que Pedro puisse arriver à ses fins avec Giulia. «Vous n’aviez qu’une seule chose en tête», assure la juge.
C’est pour cette raison que le prévenu n’aurait pas respecté les signes envoyés par Giulia pour lui faire comprendre qu’elle se refusait à lui. Comme le fait que la jeune fille se soit montrée passive et ait attendu que cela se termine ou qu’elle lui ait dit qu’elle avait ses règles. Non seulement, il ne se serait pas inquiété de son consentement – même si la question du consentement ne se pose pas en droit dans cette affaire en raison de l’âge de la victime –, mais il l’aurait sodomisée. «Vous pensez à mettre de la musique parce que vous saviez que cette pratique pouvait être douloureuse, mais vous ne pensez pas à lui demander son consentement?», poursuit la juge. «J’avais envie!», reconnaît Pedro enfin. Son frère essaye de le défendre en indiquant que Giulia souriait quand elle a quitté la chambre.
Les deux frères auraient mis les deux lycéennes dans un bus direction Luxembourg une heure après leur arrivée en demandant à Giulia de leur donner des nouvelles de Laura qui n’était pas remise de l’effet du joint. La présidente de la chambre leur rappelle qu’ils ont eu de la chance qu’il ne soit rien arrivé de mal à cette dernière. «Vous pensez que vous êtes ici pour jouer, mais vous allez vite comprendre que ce n’est pas comme ça que les choses se passent ici», prévient la présidente agacée par le comportement des frères à la barre alors que dans le fond de la salle de tribunal, la maman de Giulia est en pleurs.
Pour rappel, d’après la loi luxembourgeoise, toute relation sexuelle entre un adulte et un mineur de 16 ans ou moins est considérée comme non consentie. Un viol sur mineur de 16 ans est puni de 10 à 15 ans de prison. Pedro a déjà été condamné à une peine 24 mois de prison dans une autre affaire, ce qui amoindrit ses chances de pouvoir bénéficier d’un sursis. Suite du procès demain matin avec les plaidoiries des avocats et le réquisitoire du parquet.
Sophie Kieffer