Le FC Wiltz a le titre honorifique de leader après trois journées. Bien pour un promu situé loin de tout et pas franchement riche. Quel est le secret? Michael Schenk, son président, nous éclaire un peu.
Peu d’agents, pas de logement. Et si la réussite ces dernières années du FC Wiltz 71, unique leader de DN, s’expliquait aussi par un modèle contraint par de faibles moyens financiers?
Votre coach, Dan Huet, a dit dimanche soir qu’il s’en « fiche » de cette première place. Et vous ?
Michael Schenk : C’est toujours beau à voir, mais ça ne rapporte rien. Personne ne s’est jamais sauvé avec neuf points, personne n’est jamais devenu champion avec 9 points. Jusque-là, on a eu de la réussite, j’espère juste qu’elle ne se retournera pas contre nous.
Donc il n’y a absolument aucun bénéfice à être leader après trois journées quand on reste, finalement, un promu ?
Bon, c’est vrai que ça crée une ambiance bien positive et que, du coup, samedi soir, le Titus viendra en étant bien sous pression. Et puis, un bon début de saison à 9 sur 9, c’est primordial.
Pas d’impact « public » ?
On espère faire aux alentours de 600 contre Pétange. L’idée d’installer des sièges fixes reste dans notre tête et on a déjà eu de bonnes discussions sur le sujet. Et on essaye de jouer un maximum les samedis soirs, car le Nord est derrière notre équipe – et ils nous suivent puisque la moitié des gens présents à Hostert, dimanche, étaient pour nous – mais il ne faut pas jouer au même moment que les autres clubs de la région. On serait heureux de finir la saison avec une moyenne de 500 spectateurs, mais cela dépendra énormément des résultats. Les gens veulent voir des victoires.
Ça va faire cher, mais tant qu’on gagne, c’est supportable
Et un leader. Vous vous rappelez si c’est arrivé durant votre vie ?
Peut-être il y a quelques années, après seulement une journée… Mais en fait non, je ne me souviens pas de ça. Je ne suis pas assez vieux pour ça (il rit).
Elle vous coûte cher en primes de victoires, cette réussite du moment ?
Ça va faire cher, mais tant qu’on gagne, c’est supportable. De toute façon, les primes de victoire sont sûrement moins élevées chez nous que dans beaucoup de clubs. À moins qu’en fait ce ne soit trop élevé chez les autres… Mais je ne vous dirai pas combien on donne.
Et si vous nous donniez votre budget ?
550 000 euros, tout inclus. C’est-à-dire les jeunes, les frais salariaux des secrétaires… Beaucoup moins que bien des clubs.
Il faut en conclure que votre modèle est vertueux ET efficace ?
Il faut travailler avec ses moyens et en sachant qu’on n’a pas le droit de se tromper. On a un très bon directeur sportif (NDLR : le Belge Robert Jansen), qui fait ce qu’il faut : il sait où on peut et on doit aller chercher et on ne dépense rien. Vous savez, il a déjà été contacté par d’autres clubs qui veulent le débaucher. Le Swift notamment. Mais il leur a répondu qu’il n’ira dans aucun autre club au Luxembourg. Vous savez, pour faire venir des Ralph Schon, des David Vandenbroeck, des Dachelet, des Ibrahimovic, des Vaccaro – tiens celui-là, je pense que peu de clubs avaient coché son nom et étaient en capacité de l’attirer –, il faut être très convaincant.
En choisissant de proposer des carrières professionnelles plutôt que des salaires.
Beaucoup de joueurs viennent chez nous parce qu’ils cherchent un projet qui leur permette de s’identifier avec le club, avec la région.
C’est une plus jolie façon de le dire, on vous l’accorde.
C’est un atout. On doit bien cibler les joueurs et surtout trouver le bon moment. On évite aussi les agents parce que sinon, les frais augmentent encore beaucoup. Bon enfin, dire que c’est un bon modèle, c’est facile maintenant qu’on a fait neuf sur neuf, mais si on avait zéro point, on nous dirait qu’on a fait n’importe quoi.
Mais donc, pas d’agents ?
Je ne dis pas qu’il faut les éviter hein ! Attention ! Mais disons que certains ne nous prennent pas au sérieux, nous proposent des joueurs « troisième choix » (sic). Alors on fait tout nous-mêmes.
Une autre règle pour un recrutement réussi ?
On ne loge pas de joueurs. C’est primordial pour qu’ils soient bien dans leurs têtes qu’on ait l’assurance qu’ils voient leurs familles tous les jours et qu’ils ne s’amusent pas à traîner à Wiltz toute la journée. Ça servirait à quoi de leur donner un appartement sur place pour quatre entraînements semaine? Et puis de toute façon, ils feraient quoi à Wiltz? En été, ça va, c’est sympa. Mais en hiver, quand il fait moins 10… Non, chez nous, tous les joueurs travaillent.
Quelles sont les prochaines étapes de votre construction ?
Se stabiliser en DN et mieux former les jeunes.
Contre le Titus, un Européen, samedi, que visera le promu wiltzois, juste histoire de savoir où vous placez le curseur de votre non-ambition ?
Ne m’écrivez pas en première page qu’on va gagner hein! Mais notre coach l’a dit : on ira sur le terrain pour gagner tous les matches. Même si Pétange sera logiquement favori. Par contre, s’ils ne gagnent pas, eux, ils seront dans la m… Alors que nous, on peut se le permettre.
Entretien avec Julien Mollereau