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Procès de la rixe au couteau à Esch : le témoin s’évanouit à la barre


À l'arrivée de la police, l'agresseur avait disparu. L'homme qui se trouve aujourd'hui sur le banc des prévenus conteste avoir planté le couteau dans le dos de la victime. (Photo : archives lq/Isabella Finzi)

Scène inhabituelle mercredi après-midi au tribunal. Alors que la chambre criminelle interrogeait le témoin clé sur la rixe sanglante du 15 juillet 2018 à Esch, il s’est effondré. Les secours ont dû intervenir.

Qui a planté le couteau dans le dos du jeune homme âgé de 25 ans le 15 juillet 2018 en fin d’après-midi? Était-ce Gilson V. (27 ans) qui se trouve aujourd’hui sur le banc des prévenus? C’est la question sur laquelle la 13e chambre criminelle planche depuis mardi. À l’arrivée de la police, la lame de 11 cm du couteau était toujours plantée dans le dos de la victime. Les traces de sang menaient sur une cinquantaine de mètres jusque devant un café avenue de la Gare, là où la rixe avait éclaté. Mais l’agresseur avait disparu.

Le couteau extrait de la victime à l’hôpital a fait l’objet d’une expertise. Sur le manche noir, seul le profil génétique de la victime a pu être mis en évidence. On voit certes qu’il y a potentiellement un autre contributeur. Mais ces traces sont en trop faible quantité pour permettre une identification. En revanche, l’expert en identification génétique a pu mettre en évidence les traces ADN du prévenu Gilson V. sur la chemisette et la pointe de la chaussure gauche de la victime.

Ce dont on est donc certain, c’est que la victime a bien été touchée par Gilson V. Mais était-ce dans le cadre de l’attaque au couteau ou juste lors de leur rixe, comme le prétend le prévenu? Le reste du dossier repose essentiellement sur des dépositions. Et c’est là que cela se complique. Car entre les problèmes de mémoire et les versions qui divergent au fil de l’instruction, pas facile d’y voir clair.

Le couteau tiré du bac à fleurs…

À entendre la victime mercredi après-midi, on a l’impression que les couteaux poussent dans la Métropole du fer. Et dès que le jeune homme en trouve un, il s’en empare. Dans la nuit du 14 au 15 juillet, lors de sa première altercation avec Gilson V. il aurait ainsi ramassé un cutter au sol. Parce qu’il se sentait en danger. C’est également là qu’il a cassé les lunettes de son adversaire. Ce n’est finalement pas ce cutter qui le mènera sur le lit d’hôpital… mais le couteau qu’il a tiré le lendemain d’un bac à fleurs avenue de la Gare. Il s’en serait emparé juste pour se défendre contre celui qui brandissait un panneau de signalisation… Il l’aurait ensuite rangé dans sa manche. Comment il s’est retrouvé entre les mains de son agresseur une petite heure plus tard lors d’une nouvelle rixe, il ne le sait pas. La victime se souvient surtout d’être tombée au sol. Et puis, «quelqu’un m’a crié « Tu as un couteau dans le dos ».» «Je n’ai pas vu qui m’a mis le coup de couteau», précisera-t-il aux juges. Si sur son lit d’hôpital il avait donné le nom de Gilson V. à la police, c’est parce qu’on lui avait rapporté cette information à l’époque.

Le témoin suivant ne livrera pas plus de détails à la chambre criminelle. Le jeune homme n’avait d’ailleurs trouvé le chemin du tribunal qu’au deuxième jour du procès. Quand la présidente l’a informé qu’il avait été condamné la veille à une amende de 500 euros pour « témoin défaillant», il a lâché surpris : «Ah bon!» Il sera finalement déchargé de cette amende. Il semble qu’il n’a pas seulement oublié de venir au procès. C’est un peu toute l’affaire : «Je ne me souviens pas très bien du moment. Cela fait déjà deux ans.»

– «Vous assistez souvent à une bagarre avec un couteau planté dans le dos? Ce n’est pas si anodin, normalement on s’en souvient…» La présidente tentera de rafraîchir sa mémoire en lisant ses dépositions à la police. Il y avait en effet affirmé que c’est lui qui était intervenu pour désarmer la future victime. Il lui aurait donné un coup de pied. Et elle serait tombée au sol. «Je suis parti. Il y avait trop de monde.» C’est tout ce que la chambre criminelle réussira à tirer de lui. Du coup de couteau dans le dos, il dit ne pas avoir été témoin.

Au final, il n’y a qu’un homme qui déclare avoir observé toute la scène de ses propres yeux. C’est le témoin clé dans cette affaire. Cet après-midi-là, il rendait visite à sa mère quand il a vu le coup de couteau. Et il est à «80 % certain» que c’est l’homme sur le banc des prévenus qui l’a planté dans le dos de la victime. À la police, il avait précisé que l’agresseur était torse nu et saignait de la main. Un détail signifiant quand on sait que le prévenu se plaint d’une blessure à la main à l’époque…

Deux hommes torse nu au lieu d’un?

C’est donc sur ce point que son audition à la barre était lancée hier. Quand d’un seul coup il a lâché : «Il y en avait deux qui étaient torse nu.» «Qui avait la blessure à la main?», l’a donc interrogé la présidente. La réponse, la chambre criminelle ne l’a pas obtenue. Car un gros boum a retenti. C’est le témoin qui s’était effondré au sol. L’audience a été suspendue sur-le-champ, le temps qu’interviennent les secours. Il quittera finalement la salle sur un brancard avec une minerve autour du cou.

Le témoin sera-t-il de retour pour la suite du procès ce jeudi après-midi? Renoncera-t-on à son audition? Ou le procès sera-t-il reporté au mois de septembre après les vacances judiciaires? On en saura plus à 15 h. Les nouvelles déclarations du témoin ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd. «C’était trois secondes avant de s’évanouir. Ce n’est pas comme s’il avait dit cela au tout début de son audition», a constaté la présidente après la suspension. Et avant, le témoin avait également dit qu’il maintenait ce qu’il avait déclaré à la police….

Fabienne Armborst

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