Accueil | Sport national | [Handball] Le Luxembourg a sa légion étrangère

[Handball] Le Luxembourg a sa légion étrangère


Le pays compte actuellement douze joueurs hors de ses frontières. Pour Le Quotidien, quatre d’entre eux évoquent cette aventure destinée à les conduire vers le monde professionnel. En théorie.

«Avec du travail, c’est possible d’y arriver»

1. Jacques Tironzelli (20 ans/Lemgo) : «Le handball, j’y suis venu par l’intermédiaire de mon frère Yannick. Il jouait à Bascharage et, un jour, je l’ai suivi à l’entraînement. Plus tard, j’ai pratiqué le football, à Bascharage aussi puis à Mondercange. Gardien de but, j’ai gagné la Coupe de Luxembourg chez les poussins avec mon père comme entraîneur. À 12 ans, mes parents m’ont dit qu’il fallait que je fasse un choix. J’ai opté pour le hand et suis parti au HB Esch. À 17 ans, Riccardo Trillini (NDLR : ex-entraîneur de Käerjeng) est venu me voir à la maison en me disant : « Je veux faire de toi un bon joueur. » Au départ, il était question que je m’entraîne une fois par semaine avec l’équipe 1, mais, au bout d’un mois, je m’entraînais uniquement avec elle. Depuis quatre ans, j’étais au Sportlycée. Tout jeune sportif qui veut progresser, ou faire carrière, doit y aller! Sur le plan scolaire, en 4e, j’ai rejoint la filière technique. Comme le Sportlycée n’en dispose pas, je suis parti au lycée technique d’Esch avec, à l’esprit, une ambition : avoir mon bac et tenter ma chance à l’étranger…

Après mon bac sciences sociales en poche, c’est ce que j’ai fait. Je voulais partir en Allemagne où, par le passé, j’avais fait un essai à Grosswalstadt et à Kiel. Mais à chaque fois, il y a quelque chose qui coinçait. À Kiel, par exemple, il n’y avait pas d’internat… De mon projet, j’en ai parlé à Maik Handschke (NDLR : directeur technique national) qui connaît beaucoup de monde en Allemagne. C’est par son biais que, début juillet, j’ai rejoint Lemgo avec qui je me suis engagé pour deux ans. J’ai un contrat, je gagne un peu d’argent mais pas suffisamment pour être professionnel. Mes parents règlent le loyer (il rit)… À Lemgo, je joue en 3e Liga Nord-Ouest avec l’équipe réserve – ou de formation – où la moyenne d’âge doit être de 22 ans. C’est une équipe issue du rapprochement de l’entente entre Lemgo et Augustdorf, une petite ville située non loin.

Au début, je ne jouais pas beaucoup, mais mon temps de jeu évolue. Arrière droit depuis mes 13 ans, Matthias Struck, mon entraîneur, me fait aussi jouer demi-centre. Parfois, comme d’autres jeunes, je m’entraîne avec l’équipe 1. L’ambiance y est plutôt… familiale. Il n’y a pas de star. Un gars comme Tim Sutton, international allemand, va venir te voir, te dire bonjour et échanger quelques mots. Ces séances avec les pros m’ont permis de me rendre compte que le niveau n’est pas inaccessible. À la télé, tu as l’impression que les gars qui évoluent en Bundesliga sont des magiciens, mais ce n’est pas le cas (il rit). Avec du travail, c’est possible d’y arriver. Même pour un « petit » Luxembourgeois. Physiquement, c’est sûr, je dois prendre du muscle. À mon arrivée, je pesais 71 kg. Je fais 75 kg aujourd’hui, mais il m’en faudrait encore dix de plus pour être bien. Pour le reste, je n’ai pas de complexe à avoir. Et c’est pour cette raison que je souhaite me consacrer durant deux ans au hand. Avec, à l’issue de cette période, l’espoir d’évoluer à un échelon supérieur.»

«Les premiers mois ont été difficiles»

2. Joe Schuster (19 ans/Gummersbach) : «À l’âge de 4 ans, j’ai débuté le handball au club de Pétange. À 12, et après deux années de foot lors lesquelles je n’ai pris aucun plaisir, j’ai repris le hand. À Dudelange cette fois. En 2017, après la Youth Cup, un entraîneur suisse vient me voir et me dit : « Ça pourrait t’intéresser de partir à l’étranger ? » Intégrer une académie, ça a toujours été mon rêve! En novembre se tient le Handball Camp à Dudelange. Erwin Reinacher, l’organisateur, me dit qu’il a des contacts à Gummersbach… À cet instant, j’ai réellement envisagé de partir.
Je suis venu deux fois à Gummersbach. D’abord deux jours pour un test puis une semaine complète. Au programme, entraînement et école. Histoire d’avoir un aperçu de ce qui m’attendrait réellement. C’était magnifique, tout le monde pensait handball. Je suis donc parti à Gummersbach. Pour mes parents, ce n’était pas facile mais ils m’ont toujours soutenu et je les en remercie. Sans eux, je n’en serais pas là. Surtout que les premiers mois ont été difficiles. Après trois matches seulement, je me blesse à l’entraînement : rupture du ligament de la cheville droite.
Mais, une fois sur pied, la saison s’est bien passée. J’ai joué avec les U19 dans le championnat junior mais aussi avec l’équipe 2 en 3e Liga. On m’a toujours donné ma chance et je suis satisfait de mon temps de jeu.

Au début, l’autre difficulté était de s’habituer au rythme. Une journée type, c’est : réveil à 6 h 30, musculation de 7 h 30 à 8 h 45, école de 9 h 30 à 15 h 25 et, à partir de 16 h 30, entraînement avec l’équipe. Mais, aujourd’hui, je suis rodé. Je partage un appartement situé à 15 minutes en voiture de l’école, située à Marienheide, avec trois autres joueurs dont Loïc Kaysen. Cette saison, l’objectif est de permettre à l’équipe de bien se situer en championnat. Quant à moi, je souhaite poursuivre ma progression tout en pensant à mon bac que je passerai en fin d’année.»

«Je vis une expérience unique»

3. Eric Del Rosso (17 ans/Lemgo) : «De 4 ans et jusqu’à mon départ, je n’ai joué que pour un seul club, le Standard. Cette passion pour le hand, je l’ai héritée de ma mère qui y a joué toute sa vie et est toujours active au sein du club. À 12 ans, j’ai été sélectionné pour faire partie du cadre national des jeunes et je suis entré au Sportlycée. Trois ans plus tard, un ami m’a proposé de faire un entraînement d’essai à Lemgo. Après ça, tout est allé très vite. Retenu, j’y suis retourné une deuxième fois. Les conditions d’entraînement et l’école m’ont tellement plu que ma décision a été rapidement prise. Partir était l’opportunité de me mesurer au niveau international et de progresser. Je n’ai donc pas hésité.
Je profite de l’occasion pour remercier mes entraîneurs du club et de l’équipe nationale, qui m’ont préparé pour ce niveau, la fédération ainsi que le Sportlycée qui ont rendu tout ceci possible. Et je n’oublie pas mes copains et ma famille qui m’ont toujours soutenu !

Mon adaptation à cette nouvelle vie n’a pas été, au début, facile. Se retrouver seul à 15 ans, sans la présence de sa famille et proches, dans un autre pays, à 450 km de son pays natal, est un challenge à affronter. Je vis en colocation avec trois autres handballeurs de mon âge et j’ai dû devenir autonome du jour au lendemain, ça n’a pas été une tâche facile. Mais l’ouverture d’esprit et l’accueil chaleureux des autres joueurs, des entraîneurs, tuteurs et enseignants m’ont permis de m’intégrer rapidement et de faire plein de nouvelles amitiés, ce qui a facilité beaucoup mon séjour. Je me suis très vite senti comme à la maison et je n’ai jamais regretté ma décision, car je vis une expérience unique. Le fait d’avoir trouvé une copine à Lemgo est une raison de plus pour être heureux ici.

Blessé à cause d’une déchirure des ligaments du pied en début de saison, je reprends lentement les entraînements après de nombreuses visites chez le kiné, beaucoup d’assiduité, de patience et d’exercices. C’est ma première année en U19 Bundesliga où je fais partie du sept de base. J’ai hâte de réintégrer l’équipe et de clôturer cette saison avec un grand succès. Mes objectifs personnels dans un future plus au moins proche sont, en premier lieu, de passer mon bac l’année prochaine, ensuite voir quelles seront mes opportunités de carrière au niveau handball mais aussi études ou métier. Pour finir, je voudrais encourager tous les jeunes qui ont la possibilité d’entreprendre une carrière sportive à l’étranger. N’hésitez pas, c’est une expérience unique et même si elle n’est pas facile, elle en vaut la peine car c’est une expérience de vie.»

«Je ne veux pas être pro mais dentiste»

4. Dimitri Mitrea (19 ans/Rostock) : «Mes parents m’ont permis de toucher à différents sports tels que la natation ou le tennis, mais quand il a fallu se décider, je me suis consacré au handball que j’ai débuté à 4 ans. Au HB Esch. Je préfère les sports collectifs, le jour où tu as une mauvaise journée, tes équipiers peuvent toujours t’aider… Et puis, financièrement, c’était plus accessible que le tennis car, pour progresser, tu dois disputer des tournois à l’étranger et cela représente un coût.

À Esch, j’ai joué en équipe première jusque fin septembre. Début octobre, je suis parti en Allemagne. Pourquoi Rostock ? Pour mes études mais aussi continuer de jouer au handball. Holger Schneider (NDLR : ancien entraîneur d’Esch) m’a dit que c’était une très belle ville. J’y suis allé en vacances quelques jours et c’est vrai que c’est agréable. C’est joli, tranquille et la mer est à 20 minutes. Le club évolue en 3e Liga, ce qui est très bien car la 2e Bundesliga aurait été un cran trop élevé pour moi. (On lui fait remarquer qu’il était considéré comme le plus grand espoir du handball luxembourgeois) J’ai peut-être un niveau intéressant, mais dans mon esprit, les choses sont claires : Je ne veux pas être pro mais dentiste. Pourquoi dentiste? Déjà parce que j’aime travailler de mes propres mains et, ensuite, l’idée d’être mon propre patron est importante à mes yeux. Je n’ai pas envie de prendre le risque de tomber sur un mauvais chef qui m’empêcherait d’évoluer comme je le souhaite.

À l’université, mon adaptation s’est très bien déroulée. Au club, c’est légèrement différent. L’ambiance y est particulière. Par exemple, je suis arrivé un jour avec deux minutes de retard à l’entraînement, ça a plombé l’ambiance… Après, comme je suis arrivé début octobre et que me suis vite blessé (entorse de la cheville gauche), je n’ai pas passé beaucoup de temps avec mes partenaires et je ne les connais pas vraiment encore très bien… D’ailleurs, mon premier match avec Rostock, je devrais seulement le jouer la semaine prochaine…»

Charles Michel

Les huit autres

Messieurs : Tommy Wirtz (27 ans/Sarrelouis), Luca Tomassini (22 ans/Longericher), Loïc Kaysen (18 ans/Gummersbach), Luke Kaysen (14 ans/Gummersbach), Yann De Waha (15 ans/Grosswalstadt)

Dames : Tina Welter (26 ans/Göppingen), Lena Kirtz (19 ans/Bruxelles), Joy Wirtz (23 ans/Yutz)