Accueil | Monde | Brexit : Theresa May sort les griffes

Brexit : Theresa May sort les griffes


"Je n'ai jamais perdu de vue mon devoir, à savoir mettre en œuvre le résultat du référendum", plaide la Première ministre. (photo AFP)

Theresa May s’apprête à condamner durement lundi les appels qui se multiplient au Royaume-Uni pour un second référendum sur le Brexit, perçu comme une possible solution à l’impasse politique découlant de l’hostilité envers l’accord de divorce conclu avec Bruxelles.

« Ne rompons pas la confiance du peuple britannique en essayant d’organiser un nouveau référendum », doit dire la Première ministre britannique dans une déclaration aux députés à la chambre des Communes lundi après-midi. Un nouveau scrutin « entraînerait des dégâts irréparables pour l’intégrité de notre vie politique », estime-t-elle dans un extrait diffusé à l’avance par ses services.

Ce deuxième référendum « ne nous avancerait probablement pas plus » et « diviserait encore notre pays au moment même où nous travaillons pour l’unir ». Le Royaume-Uni s’est prononcé à 52% en faveur d’une sortie de l’UE lors d’un référendum en juin 2016. Le Brexit doit se concrétiser le 29 mars prochain mais l’accord de divorce conclu en novembre avec Bruxelles à l’issue d’âpres négociations peine à convaincre les députés de tous bords politiques, qu’ils soient partisans d’un Brexit sans concessions ou du maintien dans le club européen.

Poursuite des discussions ?

Confrontée à la probabilité d’un cuisant échec, Theresa May a repoussé à janvier le vote sur l’accord, initialement prévu le 11 décembre. Le risque d’un rejet du texte demeure toutefois très élevé: la dirigeante conservatrice est ressortie affaiblie d’un vote de confiance organisé au sein de son propre Parti conservateur, et elle n’a pas réussi à obtenir de nouvelles munitions pour convaincre le Parlement auprès des dirigeants européens réunis en sommet à Bruxelles la semaine dernière. Theresa May avait alors indiqué qu’elle poursuivrait les discussions avec l’UE afin d’obtenir des « assurances » sur l’accord, notamment une disposition destinée à éviter le retour d’une frontière physique entre l’Irlande et la province britannique d’Irlande du Nord, et son porte-parole a affirmé lundi que les échanges se poursuivaient « à tous les niveaux ».

Aucune rencontre avec Londres ne figure toutefois à l’agenda de l’UE, a déclaré lundi le porte-parole de la Commission européenne, Margaritis Schinas. « Le Conseil européen a fourni les clarifications qu’il était possible de donner à ce stade, aucune nouvelle réunion n’est donc prévue avec le Royaume-Uni ». Face aux divisions, de plus en plus de voix plaident pour un second référendum, dans l’opposition comme chez les conservateurs. Selon des médias britanniques, plusieurs membres du gouvernement, dont le numéro 2, David Lidington, œuvreraient en ce sens en coulisses.

Respecter la volonté du peuple

Theresa May a toujours rejeté cette éventualité qui trahirait selon elle la volonté du peuple britannique. Seules alternatives à son accord selon elle : un Brexit sans accord, potentiellement dévastateur pour l’économie britannique, ou pas de Brexit du tout. Durant le week-end, elle est montée au créneau contre un second référendum et s’est écharpée avec l’ancien chef de gouvernement travailliste Tony Blair, l’accusant de chercher à « saper » le Brexit. « Je n’ai jamais perdu de vue mon devoir, à savoir mettre en œuvre le résultat du référendum », a-t-elle insisté.

Tony Blair, au pouvoir de 1997 à 2007, a lui considéré comme « irresponsable (…) d’essayer de convaincre de force les députés d’accepter un accord qu’ils considèrent comme franchement mauvais en menaçant de quitter l’Union européenne sans accord s’ils ne suivent pas la ligne ». Comme Theresa May, l’ex-chef de la diplomatie et fervent Brexiter Boris Johnson a estimé qu’un second référendum « provoquerait un sentiment de trahison instantané, profond et permanent », lundi dans le Daily Telegraph.

Devant le spectre d’un rejet de l’accord, une troisième voie est défendue par plusieurs ministres : donner au Parlement la possibilité de voter de manière indicative sur différentes options possibles pour le Brexit, du maintien d’une relation très étroite avec l’UE à une sortie sans accord.

LQ/AFP