Les jeunes sont plus vulnérables que leurs aînés aux accidents du travail, souligne Stéphanie Boini, responsable d’études à l’Institut national de recherche et de sécurité (INRS) en France, à l’occasion de la journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail samedi.
En quoi les jeunes travailleurs sont-ils particulièrement concernés par la question de la santé et la sécurité au travail ?
« On constate une sur-accidentalité des jeunes au travail. Selon la Cnam (Caisse nationale d’assurance-maladie), les taux de fréquence d’accidents au travail chez les jeunes sont autour de 100 pour 1 000, donc 10 %, alors que pour l’ensemble des salariés, on est autour de 39 pour 1 000 (derniers chiffres disponibles en 2009).
Différents éléments peuvent l’expliquer. Les jeunes sont plus vulnérables que les travailleurs âgés en raison d’un manque d’expérience professionnelle. Il existe pas mal d’études sur la perception des risques des jeunes, qui est différente de celle des travailleurs avec un peu plus d’expérience. Il y a enfin la volonté de s’intégrer à l’entreprise et au groupe.
Concernant les secteurs concernés, on retrouve ce qu’on voit chez l’ensemble des salariés : le BTP en particulier, la production ou l’industrie, et tout ce qui touche à la maintenance et à la logistique. »
Suivre un enseignement en santé et sécurité au travail permet-il d’améliorer ce constat ?
« C’est ce que l’on a cherché à évaluer à travers une étude auprès de jeunes qui quittaient l’école, en filière professionnelle (CAP, baccalauréat professionnel, BTS…) pour entrer dans la vie active. Après avoir complété un premier questionnaire sur leur parcours scolaire, nous les avons suivi tous les six mois pendant deux ans, pour savoir s’ils avaient trouvé un emploi, et s’ils avaient eu un accident du travail. Le recueil des données a eu lieu de 2009 à 2014, dans sept académies, avec au total 755 jeunes dont on a analysé les données.
Ce qu’on a montré, c’est que ceux qui avaient déclaré avoir reçu un enseignement en santé et sécurité au travail ont eu au cours de ces deux ans de suivi deux fois moins d’accidents au travail que les autres. C’est impressionnant.
Sur la nature des accidents du travail survenus, on a eu des informations grâce à un partenariat avec la direction des risques professionnels (de l’assurance maladie). En général, chez les jeunes, les accidents sont plus fréquents mais moins graves. Ce sont des plaies ou des blessures superficielles, des traumatismes externes, des foulures et entorses, essentiellement. »
Comment améliorer la prise en charge ?
« Dans l’étude, on a regardé les conditions d’accueil dans l’entreprise : le fait que les jeunes aient une information sur les risques professionnels ou une formation à la sécurité par l’employeur, et qu’ils aient eu une formation au poste par un autre collègue, un « parrain ». Une des pistes qui pourrait être intéressante à explorer, c’est : quelle modalité est la plus pertinente ? En termes de durée de formation, de délais par rapport à l’arrivée dans l’entreprise…
Ce qu’on a aussi vu, c’est que finalement il est important d’avoir un enseignement (à l’école) pas complètement ciblé sur le métier, puisque les jeunes ne vont pas forcément faire celui qui correspond au diplôme préparé. Une approche un peu généraliste permet de savoir comment réagir dans différentes situations. »
Le Quotidien/AFP