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Brexit : la finance londonienne pourrait choisir Francfort plutôt que Luxembourg


Parmi les atouts majeurs de Francfort, la présence de la Banque centrale européenne. (photo AFP)

Un an après le vote du Brexit, Francfort semble se détacher du peloton des villes européennes en concurrence pour accueillir la finance londonienne en quête d’un autre point d’attache, une avance qui pourrait encore se creuser.

La procédure de divorce entre l’Union Européenne et le Royaume-Uni vient à peine de commencer, mais plusieurs acteurs financiers implantés de longue date à Londres ont déjà annoncé vouloir déposer une demande de licence bancaire en Allemagne, en vue de déplacer une partie de leurs capacités vers les bords du Main. Dernière à se déclarer, Woori, une des plus grosses banques coréennes. Plus tôt, la banque d’investissement japonaise Nomura et sa concurrente Daiwa en ont fait autant. Signal notoire, une star de Wall Street, l’Américaine Goldman Sachs, compte « très probablement » doubler ses effectifs à Francfort, à ce jour de 200 personnes, a déclaré mi-juin son patron européen, Richard Gnodde, dans la Frankfurter Allgemeine Zeitung.

Un profil plus séduisant

Francfort semble ainsi avoir la cote à côté de Luxembourg, Amsterdam, Dublin, ou Paris, et la présence de la Banque centrale européenne y est pour quelque chose. Mais il y a bien plus. « Les patrons de banques en visite ici, surtout les Asiatiques, sont impressionnés par la variété des compétences développées en dehors de la branche financière, entre la high-tech, l’informatique, la santé et la chimie », note Eric Menges, directeur de la GmbH FrankfurtRheinMain, une société locale qui rencontre les acteurs financiers étrangers et répond à leurs sollicitations. « Quand d’autres villes font valoir des points forts précis, par exemple la fiscalité, Francfort séduit en présentant un profil d’ensemble concluant. »

La ville de Goethe « ressort souvent en tête dans la shortlist des banques », confirme Hubertus Väth, directeur de l’initiative Frankfurt Main Finance, vendant l’image de la ville à l’extérieur. « Sur une vingtaine d’établissements regardant de près une implantation ici, au moins une douzaine veut se décider en tout ou partie pour notre ville », ajoute le communiquant. Ces prétendants ont pour origine les États-Unis, le sud de l’Asie, la Russie, la Corée, la Suisse et le Royaume-Uni, précise-t-il. Déjà 80 % des 202 banques actives dans la ville au bord du Main sont des établissements étrangers, comptant environ 10.000 salariés sur place.

« Le Brexit va amener dans les deux prochaines années 3 000 à 5 000 emplois nouveaux à Francfort », a estimé récemment Stefan Winter, directeur le la fédération des banques étrangères VAB et membre du directoire d’UBS Europe, dans la Welt am Sonntag. Une chose est sûre, la mobilisation pour Francfort « est excellente », juge Eric Menges. Chaque lundi depuis un an, il anime une conférence téléphonique avec des acteurs représentant la ville, la région, la chambre de commerce… Les questions concrètes sont évoquées, comme le point sur l’accueil dans les écoles internationales.

Ville « prédestinée » selon Merkel

« Les chances pour Francfort de profiter du Brexit à venir ont nettement augmenté ces derniers mois », assure Michael Kemmer, directeur général du BDB, la fédération allemandes des banques privées. « Ce succès doit en particulier à la mobilisation de la politique, en incluant le niveau fédéral à Berlin », selon le patron du lobby bancaire. Sortant de sa réserve, la chancelière allemande Angela Merkel a récemment soutenu Francfort, ville « prédestinée » selon elle pour accueillir le régulateur européen des banques ABE, lui aussi appelé à quitter Londres.

Le Land de la Hesse se charge en ce moment de préparer un dossier de candidature qui sera déposé à Bruxelles avant fin juillet. Prenant son bâton de pèlerin, le président de la région, Volker Bouffier (CDU), avait traversé l’Atlantique dès novembre dernier pour rencontrer les patrons des géants de Wall Street, bien implantés dans la City. »Venez en Allemagne, un havre de stabilité », leur avait-il dit en substance.

Le Quotidien/AFP