Le traditionnel Noël organisé par la Stëmm vun der Strooss s’est tenu jeudi. Des centaines de sans-abri ont bénéficié d’un repas et d’un après-midi jeux, au centre culturel de Bonnevoie.
Il faut voir le défilé dès l’ouverture des portes. Ils arrivent avec des doudounes usées, leurs visages sont abîmés, leurs mains gercées par le froid. À peine entrée, une grand-mère jauge la salle. Elle est petite, toute courbée, elle porte un survêtement aux couleurs défraîchies. Elle va rejoindre son groupe d’amis. Certains ont des gros sacs : une couverture, une écharpe en laine, un vieux livre… Toute leur vie sur leur dos. Un type débarque avec une barbe de marin et un bonnet rayé. «Ah, Bernard !», exulte un bonhomme à l’autre bout de la salle, un cocktail à la main. «Viens l’ami, viens par ici.» C’est la fête aujourd’hui, et malgré le froid, malgré la morosité, on se sert dans les bras à grandes accolades. Les regards méfiants de la rue s’effacent pour quelques heures de grâce : c’est ça, le Noël de la Stëmm vun der Strooss.
L’ASBL organise l’évènement depuis dix-huit ans. Pas d’inscription, il suffit de pousser la porte du centre culturel de Bonnevoie, comme des centaines de sans-abri l’ont fait jeudi. Le Noël de la Stëmm est si rassembleur que le couple grand-ducal y participe parfois. «Pas cette année», glisse Alexandra Oxacelay, la directrice de la Stëmm. Peu importe, la fête est belle. Dans la grande salle, 400 couverts ont été dressés. «Combien seront-ils ?, s’interroge la directrice. On ne sait jamais avec les gens qui vivent dans la rue. À cause de la précarité, on ne peut jamais vraiment anticiper.»
Bénévoles de tous les horizons
L’évènement requiert des semaines de préparation. Heureusement, l’équipe de la Stëmm n’est pas seule. Loin de là ! Le Noël de la rue repose sur un formidable élan bénévole, des entreprises du pays jusqu’aux scouts. «Jusqu’à mercredi soir, je ne savais pas si j’allais pouvoir me libérer, raconte Söeran, un jeune scout de Mamer. Finalement, j’ai pu rentrer de l’université à temps. C’est un moment important. On dit aux sans-abri : reposez-vous, mettez-vous au chaud, on s’occupe de tout.» La fédération laïque est représentée en cuisine, tandis que les scouts d’Europe ont préparé des centaines de petits gâteaux à l’avance.
Le monde de l’entreprise est également bien impliqué, notamment les institutions financières. La BNY Mellon, la Banque de Luxembourg, la State Street Bank… Chez BGL BNP Paribas, une plate-forme dédiée au bénévolat a carrément été mise en place en interne ! «Nous avons créé une interface web à destination des associations, explique Karin Schintgen, directrice de la Responsabilité sociétale au sein de la banque. Quand les associations ont besoin de bras, elles nous contactent sur le site et nous répercutons en interne.» Les employés de BGL BNP Paribas ont même le droit à des jours de bénévolat, en plus des congés. Ils étaient onze. Ça marche !
Hubert Gamelon