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Micode, le youtubeur qui décode le net


(photo AFP)

De la création tumultueuse d’un réseau social pirate à ses vidéos cumulant des millions de vues où il infiltre des groupes de cybercriminels, Micode vit pour le frisson numérique.

Visage fraîchement rasé, franc sourire et faux air d’étudiant en école de commerce, le jeune homme âgé de 24 ans n’hésite pas à se faire passer pour un pirate informatique pour assister à des arnaques en direct ou encore à mettre des hackeurs au défi de le retrouver. «On s’expose, mais pas plus que d’autres médias d’investigation !», raconte ainsi Michaël de Marliave, alias Micode. «On n’est pas la police, on ne représente pas une menace» pour les arnaqueurs épinglés, dont certains l’ont même félicité pour son travail.

Dans l’une de ses vidéos les plus populaires, il infiltre un groupe de criminels spécialisés dans les fraudes par SMS en intégrant leurs boucles de messagerie. Utilisant leurs méthodes, il pousse l’un d’eux à tenter d’arnaquer un membre de son équipe. «La personne décroche le téléphone et appelle mon complice, qui est dans la salle d’à côté», retrace-t-il. «J’assiste à l’arnaque de bout en bout.» Ses chaînes Micode et Underscore, spécialisées dans la vulgarisation des nouvelles technologies, comptent respectivement 1,25 million et 640 000 abonnés sur YouTube et emploient huit personnes via sa société, la Micorp.

La connaissance permet d’avoir une relation bien plus apaisée à la technologie

Sa recette? «Faire vivre l’excitation de l’enquêteur» à ses spectateurs, en reconstituant minutieusement ses découvertes et en répondant à des questions pratiques sur l’utilité d’un réseau privé virtuel (VPN) ou encore les dangers du téléchargement illégal. «Très souvent, les gens ont peur pour de mauvaises raisons», constate Micode. «La connaissance permet d’avoir une relation bien plus apaisée à la technologie.»

Le tout est financé par des partenariats ou des conférences, en plus de la monétisation de ses vidéos sur la plateforme. Selon lui, «sur des formats éducatifs, on aurait vraiment beaucoup de mal à trouver un modèle qui dure». Des considérations bien loin des bancs de l’université Paris-Descartes, où, en 2017, l’étudiant en DUT informatique trompe l’ennui en imaginant ses premières vidéos sur le hacking, l’IA et le monde des ordinateurs. «Je faisais des découvertes dingues et personne ne semblait s’y intéresser», se souvient celui qui, deux ans auparavant, avait expérimenté de très près la viralité, et les côtés les plus sombres, d’internet.

Originaire de Pau, ce fils d’un ingénieur et d’une peintre se passionne très tôt pour l’informatique. Il se fait la main en craquant les mots de passe de l’ordinateur familial, instaurés par ses parents pour réfréner son usage des écrans. Lycéen dans les Yvelines, il crée en 2015 Gossip, un réseau social anonyme invitant ses camarades de la région à poster toutes sortes de messages. En deux semaines, le site compte plus de 2 500 inscrits et Michaël de Marliave, dont personne ne sait qu’il en est l’auteur, découvre alors «un truc un peu grisant». «Vous avez l’impression d’être Mark Zuckerberg!»

Mais, très vite, il perd le contrôle de sa création : «Il y avait du harcèlement, des messages ignobles qui étaient postés.» Devant l’émoi des responsables d’établissements scolaires et «sur les conseils d’un avocat», il ferme son site au bout de quinze jours. «J’étais probablement très naïf sur le sujet à l’époque. C’est une évidence que c’était une grosse bêtise», concède aujourd’hui Micode. «Mais c’est un événement assez fondateur dans mon histoire», ajoute-t-il, avouant avoir pris conscience à ce moment-là de vouloir «créer des projets qui marchent, mais pas à n’importe quel prix».

Avec ses chaînes, il cherche désormais à reproduire cette «étincelle de magie, mais avec des choses positives». Une activité qu’il combine avec une autre casquette : celle de patron d’une start-up. Depuis deux ans, il développe en effet un petit boîtier utilisant l’intelligence artificielle pour gérer un «studio de régie autonome» appelé OneClickStudio. Le but : réaliser une émission télévisée ou un direct sur une plateforme sans passer par une régie traditionnelle. Au point d’arrêter YouTube en cas de succès? «Je ne me vois pas vraiment investisseur», répond Micode. «Ce qui m’intéresse, c’est de créer.» S’il n’exclut pas de faire de sa chaîne «une activité plaisir» pour avoir le temps de développer d’autres choses, le jeune homme est bien loin de vouloir quitter son costume de défricheur de la jungle numérique.

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