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Malvoyance : un travail pour tous au Bieschbecher Atelier de Rollingen


Dans la cuisine de la fondation, les gestes sont tout aussi appliqués que dans un restaurant.

La Fondation Lëtzebuerger Blannevereenegung propose aux aveugles et aux personnes malvoyantes un atelier d’inclusion afin de les aider à entrer dans le monde du travail.

Depuis 1955, la Fondation Lëtzebuerger Blannevereenegung (FLB) travaille à l’inclusion des personnes aveugles et malvoyantes. Au fil des décennies, elle a élargi son offre et développé ses activités afin de les accompagner dans toutes les étapes de leur vie. Une prise en charge complète dont toutes les composantes sont installées aujourd’hui sur son site de Rollingen, à Mersch. Difficile d’ailleurs pour le visiteur néophyte de s’y retrouver. Si le CIPA Blannenheem, une maison de retraite qui accueille aussi bien des pensionnaires souffrant de déficience visuelle que des valides, s’impose rapidement, la FLB propose bien d’autres services.

Un peu plus loin se tient par exemple le Bieschbecher Atelier. À l’intérieur, l’ambiance est décontractée mais toujours studieuse. Cet atelier d’insertion professionnelle emploie aveugles et malvoyants qui effectuent de petits travaux adaptés à leur handicap. «Nous avons commencé il y a 20 ans, avec neuf salariés, rappelle Martine Brochmann, la directrice. Aujourd’hui, nous en avons 43, encadrés par douze personnes.»

Décorations en céramique, travail du bois, cuisine, ménage, sous-traitance, logistique, jardinage… les domaines d’intervention sont nombreux. «Nous acceptons prioritairement les personnes souffrant d’une déficience visuelle, mais certaines ont aussi d’autres handicaps.»

Une nouvelle vie sociale

Le Bieschbecher Atelier offre une opportunité à tous ceux que le marché de l’emploi laisse de côté. Après avoir perdu leur travail à cause de leur handicap, certains passent parfois plusieurs années au chômage avant de retrouver ici un peu de stabilité. La FLB leur offre un salaire, mais également une nouvelle vie sociale. «Sans travail, certains se renferment et finissent par ne plus oser sortir de chez eux.»

Daniel Sousa, 39 ans, est là depuis les débuts, en 2004. Originaire du Portugal, il est arrivé au Luxembourg dans les années 90 quand il a rejoint sa mère. «Je suis aveugle à 100 %, mais je peux distinguer si une lumière est allumée ou non.» S’il travaille habituellement dans le secteur de la sous-traitance, qui s’occupe de la production de flyers pour le compte d’un imprimeur, il donne en ce moment un coup de main à l’atelier bois. «Je fais un peu de tout, raconte-t-il. Ce qui me plaît, c’est qu’il y a beaucoup de tâches différentes.»

À proximité, ses camarades préparent des cabanes pour les oiseaux tandis que d’autres assemblent des blocs-notes. Dans la pièce d’à côté, on est en pleine préparation de l’exposition qui ornera les jardins à l’occasion des 20 ans de l’atelier. En créant quelque chose de ses propres mains, chacun peut retrouver un peu de confiance en soi dans un monde qui ne lui fait habituellement pas de cadeau.

Mais Daniel refuse pour autant tout misérabilisme, bien décidé à revendiquer son autonomie. «J’ai aussi une vie sociale en dehors, tient-il à préciser. Je suis allé seul à un concert de thrash metal. Là-bas, les gens m’ont aidé à accéder à la salle.»

Un restaurant en projet

Pendant que Daniel continue de poncer le bois, une petite équipe s’affaire en cuisine. Handicap ou pas, les gestes sont aussi minutieux que dans un véritable restaurant. «Nous projetons de développer notre section cuisine, précise Martine Brochmann. Pour le moment, nous faisons surtout de la cuisine thérapeutique, mais nous voulons installer un petit restaurant sur place.» Celui-ci pourra notamment être alimenté par les légumes issus des serres de l’atelier, déjà vendus aux particuliers.

Avec son statut de SARL, le Bieschbecher Atelier fonctionne comme une petite entreprise et rémunère ses employés au salaire social minimum. «L’un des objectifs est aussi de leur permettre de revenir sur le marché ordinaire, mais c’est très difficile, reconnaît Martine Brochmann. La déficience visuelle est très handicapante. Avant, un salarié malvoyant pouvait travailler au standard d’une entreprise, mais aujourd’hui les tâches d’un travail de bureau sont très diversifiées.»

Et pourtant, rien ne les empêche de participer au bon fonctionnement de la fondation en s’occupant du ménage ou d’une partie de la logistique. Une petite communauté qui, sans vivre en autarcie complète, prouve qu’avec un peu d’adaptation, aucun handicap n’est insurmontable.

Premier handicap au Luxembourg

Le dernier recensement de la population réalisé par le Statec a permis de récolter de nombreuses informations sur le handicap au Luxembourg. Il en ressort que 56 000 personnes, soit 8,7 % de la population, se disent touchées par une déficience visuelle, ce qui en fait le handicap le plus courant au Grand-Duché. Même en excluant les formes les plus légères, la malvoyance reste le deuxième handicap le plus répandu avec 15 300 personnes concernées. Pour Paul Ensch, président du conseil d’administration de la FLB, ces chiffres offrent à la fondation «une légitimation supplémentaire pour sortir de notre discrétion en faveur de cette communauté importante de personnes». D’autant que même un handicap mineur peut avoir un impact sur le quotidien et demander un soutien supplémentaire pour vivre en toute autonomie.

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