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[Rugby] Gillespie : «J’ai ressenti une certaine fierté»


Eugene Mark Gillespie, la force tranquille. (photo : serge feltes)

 Eugene Mark Gillespie vivra, ce samedi en Suède, sa première sélection avec le Luxembourg. À 50 ans!

Des tampons, Eugene Mark Gillespie aime en mettre. Et pas que sur le terrain. Son passeport en compte une multitude. Après une enfance passée entre Londres et l’Arabie saoudite, ce fils d’un ancien employé des forces aériennes saoudiennes a «visité» quelque «123 pays» avant de poser définitivement ses valises au Grand-Duché. Première ligne au RCL (Rugby Club Luxembourg), cet Anglais porte également les couleurs d’un club… brésilien. Entretien avec un gaillard dont la longévité s’expliquerait en partie par du… jus de betterave.

Quand avez-vous appris votre sélection?
Eugene Mark Gillespie : La semaine passée. Avec le RCL, on jouait dimanche à Heidelberg (Ndlr : en Bundesliga). La veille, Jonathan Flynn (NDLR : le sélectionneur) me dit qu’en raison de l’une ou l’autre absence, il a besoin d’un joueur en vue du match en Suède et va venir me voir jouer. Dimanche après-midi, il me dit que c’est bon, que je suis sélectionné. J’ai ressenti une certaine fierté.

Quelle a été la réaction de vos proches?
Ils étaient aux anges. Au club aussi, on m’a dit que c’était mérité. L’esprit du rugby, c’est ça : ne jamais baisser les bras, essayer d’être plus fort demain qu’hier et, à chaque fois que tu tombes, se relever. Avec le soutien de tes équipiers. De ton équipe. C’est ça le rugby.

À 50 ans, cela ne devient pas difficile d’être plus fort demain que la veille?
Cette formule ne se limite pas au rugby, c’est une philosophie de vie. Par exemple, j’ai décidé de disputer, l’an prochain, mon premier Ironman 70.3 à Remich. Il y a neuf ans, j’ai disputé mon premier ING Marathon. Depuis, je le cours tous les ans. Bon, je mets 5 heures pour le terminer mais quand tu pèses 114 kg, c’est déjà pas mal de courir 42 km. À Remich, l’objectif sera là aussi de le finir.

Au vu de votre corpulence, c’est l’enfer, non?
J’aime beaucoup nager, j’aime la bicyclette et je peux faire le semi-marathon. Le plus difficile, c’est après la seconde transition, les deux premiers kilomètres à pied… Je fais ça aussi pour les enfants, leur montrer qu’avec force et détermination, rien n’est vraiment impossible.

J’aimerais jouer 2 à 3 saisons avec mes deux fils, Eugene-Louis et Joshua  en équipe seniors

Les enfants semblent occuper une place importante dans votre vie…
Ils sont notre avenir. Pas pour nous mais pour le monde. On doit leur transmettre une discipline, un savoir-faire, leur apprendre de quelle manière réagir dans la vie. Et, à mon sens, le rugby est primordial pour ça. Le rugby, ce n’est pas la victoire à tout prix mais apprendre à relever la tête après une défaite, à redoubler d’efforts, à encourager celui qui est à côté de vous… Le rugby s’arrête quand tu n’as plus envie.

Savez-vous jusqu’à quel âge vous aimeriez continuer?

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Oui, j’ai une idée. J’aimerais jouer deux à trois saisons avec mes deux fils, Eugene-Louis (15 ans) et Joshua (14) en équipe seniors.

Ça demande une sacrée hygiène de vie…
Je ne fume pas et ne bois pas une goutte d’alcool. Ce choix, je l’assume complètement, et ce, pour différentes raisons. Je travaille à l’aéroport et alcool et aviation, ça ne fait pas un bon mélange; ensuite, comme j’habite à Echternach, je fais quand même 42 km pour aller m’entraîner à Cessange…

Vous ne correspondez pas au cliché du rugbyman anglais…
Mais c’est un cliché. Il y beaucoup de joueurs qui ne boivent plus. Et à Londres, il y a de plus en plus de pubs sans alcool. Non, d’ailleurs, je bois beaucoup de jus de betterave. Ça permet d’augmenter de 10 % la quantité d’oxygène dans l’organisme. Et les gars qui font le Tour de France en boivent aussi.

Vous travaillez dans l’aviation. En quoi consiste votre métier?
Je travaille chez Cargolux. Je suis dans les opérations de vols. On fait les plans de vols, etc. C’est un travail qui prend du temps. On fait les tournées. Tu peux commencer ta journée à 5 h, 8 h, 13 h, 17 h ou 20 h. Bref, tu peux finir à 15 h ou à 6 h du matin. À chaque début de mois, j’adapte mon emploi du temps. Mais ça ne m’empêche pas d’être, entre mes deux entraînements avec l’équipe A, les deux autres que je prodigue aux jeunes et les matches, en moyenne cinq fois par semaine à Cessange. Oui, je sais ma vie tourne autour du rugby.

D’un point de vue de l’horloge biologique, votre profession demande une certaine capacité d’adaptation…
Oui mais je n’ai jamais eu un travail « normal » sauf lorsqu’après avoir quitté l’armée britannique, j’ai rejoint le Haut-Commissariat du Canada à Londres. Et puis, je n’ai pas eu un parcours classique. Mon père travaillait aussi dans l’aviation. Dans les forces aériennes saoudiennes où il était chargé des aspects logistiques, planification des vols, etc. Jusqu’à 16-17 ans, ma vie se passait entre Londres et Dhahran. On avait deux maisons. J’allais à l’école à Londres et, pendant les vacances scolaires, je partais en Arabie saoudite. Je passais mes étés et Noël là-bas. C’était chouette. J’avais une petite moto, j’allais à la pêche, je faisais du ski nautique. Bon, il faisait un peu chaud mais c’était bien. Et puis, il y avait beaucoup d’expatriés et j’avais des amis anglais, écossais, néerlandais, américains… De temps à autre, on allait voir mes cousins aux États-Unis ou mes sœurs en Australie.

Avez-vous l’impression d’avoir eu une vie extraordinaire?
Oui, bien sûr. Grâce à mon père, qui bénéficiait de billets d’avions gratuits, je suis allé dans 123 pays! J’ai toujours énormément voyagé. Autre chose, après ma séparation d’avec la mère de mes enfants, je suis parti trois semaines au Brésil. J’ai trouvé un club de rugby à São Paulo, le Rio Claro avec qui je joue car sa saison commence quand le championnat se termine ici. Et en février, j’y vais pour jouer du Beach Rugby. J’ai de la chance, c’est un vol direct : 11 heures de vol, 2 heures de voiture et j’y suis!

Le rugby au Brésil, c’est…
(Il coupe) C’est le sport qui connaît le plus fort développement. Pour preuve, la création la saison passée d’une Ligue professionnelle de douze clubs. Et les meilleurs matches sont même télévisés sur ESPN. Parmi ces douze clubs, il y a le Pasteur Athlétique Club. C’est un club créé par des Français.

Revenons donc à ce Suède – Luxembourg et cette première sélection à 50 ans. Est-ce une première mondiale?
D’après ce que je sais, il y a un joueur qui a joué avec le Qatar à 57 ans, mais ça faisait déjà dix ans qu’il jouait en sélection. Après, je suis peut-être le plus vieux au monde à être appelé en sélection pour la première fois. Mais attention, normalement, je débuterai la rencontre sur le banc. Si je rentre ou que je débute, tant mieux, mais le plus important est de faire un bon résultat contre cette équipe suédoise.

Recueilli par Charles Michel

 

À l’école avec Tom Hardy

Le rugby, Eugene Mark Gillespie l’a débuté en Angleterre, à 6 ans. Pendant ses études, il continuera de pratiquer ce sport et était l’un des fers de lance de son équipe au lycée. «Ce n’était pas non plus le top niveau», glisse l’ancien pensionnaire de la Reed’s School, située à Surrey, qui côtoya un certain… Tom Hardy. «Il était moins âgé que moi mais il était déjà très bon pour jouer les acteurs. Par contre, un autre acteur est venu faire un cours de rugby avec nous à Luxembourg. Il s’appelle Danny Ligairi Badham et est à l’origine de The Barefoot Project. On récolte d’anciens équipements (t-shirt, chaussures…) et on les envoie à Nairobi (Kenya), Johannesbourg (Afrique du Sud) mais aussi aux Fidji. Danny a tourné un film avec Tom Hardy. Le monde du rugby est vraiment petit…»
C. M.

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